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Richard Tuheiava interpelle Gaston Flosse sur le nucléaire et la dette


Richard Tuheiava interpelle Gaston Flosse sur le nucléaire et la dette
PAPEETE, vendredi 28 juin 2013. A deux reprises le sénateur Richard Tuheiava s’en est pris frontalement au président du Pays, Gaston Flosse à l’assemblée de Polynésie ce vendredi. Au cours des questions orales au gouvernement tout d’abord, le représentant UPLD a posé la question de l’indemnisation effective des victimes des essais du nucléaire en Polynésie française et a demandé expressément au président du Pays s’il adhérait «à la thèse officielle de l’innocuité des essais nucléaires français en Polynésie française, et en particulier ceux réalisés en milieu atmosphérique de 1966 à 1974». Le véritable motif de cette interpellation étant de savoir si la zone d’indemnisation éligible ne devrait pas être étendue à l’ensemble des cinq archipels polynésiens.

Ce faisant, Richard Tuheiava s’appuie sur les résultats très médiocres jusqu’ici pour la Polynésie de la mise en application de la Loi Morin, datant de 2009, sensée reconnaître les conséquences sanitaires des essais nucléaires et offrir une indemnisation aux victimes. Pour l’instant la Loi Morin limite les zones géographiques éligibles à l’indemnisation aux personnes résidant à Moruroa, Fangataufa, à l’archipel des Gambier et à quelques communes de Tahiti. Ainsi, le premier Comité d’indemnisation réuni en décembre 2012 n’a retenu sur 786 dossiers déposés qu’une dizaine de cas polynésiens et seules six victimes habitant les Gambier, Reao et Pukurua ont obtenu des recommandations en vue d’une indemnisation. «C’est un très maigre résultat» commente Richard Tuheiava. D’autant que selon des éléments issus des 58 documents secret-défense déclassifiés le 20 décembre dernier, et selon l’analyse effectuée par les associations Moruroa e Tatou et l’Aven (association des victimes des essais nucléaires), «il ressort que ce sont toutes les îles des cinq archipels polynésiens qui ont été touchées par des retombées radioactives du temps des essais aériens».

La réponse de Gaston Flosse a été courte mais cinglante. «C’est une question qui n’intéresse personne. Comme toujours vous avez voulu vous rendre intéressant. J’ai déjà pris position à ce sujet : j’ai souhaité que chaque fois qu’il y avait une maladie due aux expérimentations que les personnes soient indemnisées, les trois députés Tahoeraa sont intervenus à l’assemblée nationale. Victorin Lurel lui aussi a dit lors de sa visite ici que la question de l’extension géographique était posée. Vous lui faites un procès d’intention avec cette question».


« Des emprunts qui ont servi à financer vos folies des grandeurs»

La deuxième salve de Richard Tuheiava à l’encontre de Gaston Flosse est venue au moment de débattre du compte administratif 2012 de la Polynésie française. «Savez-vous que l’encours de la dette actuelle comprend des emprunts que le Président a contractés lui-même pendant les années de règne absolu ? L’emprunt le plus ancien remonte à 26 ans, maintenant c’est-à-dire à 1987, les autres ayant été réalisés en 1990, 1992, 1995, 1997, 2000, 2001, 2003 ? Dans le compte administratif que nous examinons, les emprunts que vous avez réalisés représentent un encours de plus de 7 milliards de francs figurant dans la dette de 2013, que nous continuerons à rembourser malheureusement pendant encore des décennies (…) Ces emprunts ont servi à financer vos folies des grandeurs : votre palais présidentiel du quartier Broche, votre hôtel particulier de Tupai, aujourd’hui tombé en ruine, le freeway de Fakarava pour desservir Makarea, votre centre de plaisirs et de vacances, le port surdimensionné d’Uturoa, la mairie de Pirae totalement démesurée et disproportionnée, financée en partie par le Pays, votre ATR 72 et j’en passe (…) Pourquoi ne dites-vous pas que l’annuité de la dette de 14,6 milliards réglés en 2011 par le gouvernement Temaru s’explique en partie par le remboursement du capital de l’échéance in fine de l’emprunt obligataire que vous avez contracté en l’an 2000 ?»

Sur cette présentation des faits le président Gaston Flosse qui avait déjà quitté l’assemblée après les questions orales n’a pas pu répondre. Mais Sandra Lévy-Agami pour le Tahoeraa est venue apporter des précisions : «Sur l’annuité des emprunts qui est de 14 milliards de Fcfp, les anciens emprunts ne pèsent plus aujourd’hui que de 34 millions. Les emprunts contractés de 2001 jusqu’à aujourd’hui, au cours de la 2e partie de cette décennie, représentent désormais la part principale».

Au cours de l’année 2012 et avant le prêt consenti au Pays par l’AFD, le précédent gouvernement Temaru avait contracté pas moins de six emprunts différents pour un montant total de 13,7 milliards de Fcfp ce qui représentait alors 15% du montant total de la dette du Pays, évaluée à la fin de l’année 2012 à 88 milliards de Fcfp. Trois de ces emprunts dont le remboursement s’étalait sur 11 ans, qualifiés de crédits structurés sensibles ont été refinancés tout récemment par le nouveau vice-président Nuihau Laurey et transformés en crédits classiques.

Rédigé par Mireille Loubet le Vendredi 28 Juin 2013 à 21:37 | Lu 2218 fois