Tahiti Infos

Feu vert de la commission des lois pour élargir les compétences des tāvana


Tahiti, le 19 novembre 2025 - Après le Sénat, la commission des Lois de l’Assemblée nationale a adopté ce mercredi la modification de l’article 43-2 du statut de la Polynésie française, donnant plus de marges d’action aux communes. Le texte va dans le sens de la quasi-totalité des tāvana (47 sur 48) et des députés autonomistes, soutenus par le gouvernement central, tandis que la députée indépendantiste Mereana Reid‑Arbelot défend la position opposée du président du Pays. L’examen en séance plénière du Palais Bourbon est prévu le 10 décembre.
 
Nouvelle avancée pour la réforme statutaire attendue par la quasi-totalité des tāvana de Polynésie française, seul le maire de Faa'a, Oscar Temaru y étant opposé. Réunie ce mercredi, la commission des Lois de l'Assemblée nationale a adopté la modification de l’article 43‑2, ouvrant la voie à un élargissement des compétences des communes et communautés de communes. Le texte, déjà validé au Sénat en mai dernier, permet désormais aux maires d’intervenir dans des domaines relevant normalement du Pays, via une simple convention, sans attendre une loi du Pays préalable.

Pour la députée Nicole Sanquer, rapporteure du texte, cette réforme est une réponse concrète aux contraintes auxquelles les maires sont confrontés : elle souligne que les tāvana sont parfois obligés, en raison de l’éloignement ou de l’urgence, d’agir dans des domaines variés relevant jusqu'ici de la compétence du Pays (aides sociales, urbanisme, culture, patrimoine, jeunesse et sport, environnement, énergie ou logement). Elle a insisté sur le fait que la proposition de loi organique (PPLO) déposée par les sénateurs Teva Rohfritsch et Lana Tetuanui sécurise enfin juridiquement ces interventions exercées de fait depuis longtemps : "On sait la mainmise que le Pays peut avoir sur les tāvana, cette PPLO vient un peu lever cette mainmise".

Dans le même esprit, Moerani Frébault a salué "une avancée qui permet aux communes de mieux répondre aux besoins de leurs administrés sans attendre que l’administration du Pays freine ou complexifie l’action locale. C’est un pas vers la responsabilisation et l’efficacité des maires". Le texte prévoit également un délai de six mois avant sa mise en œuvre. Durant cette période, une convention peut être conclue entre le Pays et la commune, tout en laissant la possibilité au Pays de légiférer pour encadrer l’action envisagée, afin de sécuriser juridiquement les interventions communales déjà exercées de fait.
 
Brotherson, Temaru et Reid‑Arbelot seuls contre tous
 
Si le texte bénéficie d’un soutien massif parmi les élus autonomistes et la quasi-totalité des maires, Mereana Reid‑Arbelot a défendu trois amendements rejetés, incarnant la position du président du Pays, Moetai Brotherson, qui s'est opposé dès le départ à cette modification statutaire. "En sous-estimant les fortes disparités entre les 48 communes polynésiennes, ce texte ouvre largement l’intervention municipale sur les compétences du Pays et risque de fragiliser les collectivités les moins dotées en moyens techniques, en moyens de formation et en ingénierie", s'est-elle inquiétée, estimant que si "les maires ont raison de vouloir agir en toute légalité", "cette proposition n’y répond pas car elle crée au contraire de nouvelles fragilités juridiques".

Autrement dit, l’opposition se réduit à peau de chagrin : seuls Moetai Brotherson, Oscar Temaru et Mereana Reid-Arbelot restent contre, alors que même des tāvana indépendantistes comme Antony Géros, maire de Paea, ont soutenu le texte, illustrant l’ampleur du consensus local.

Rappelons par ailleurs que juste avant leur départ pour le 107e congrès des maires à Paris, les tāvana ont reçu un courrier du Premier ministre Sébastien Lecornu leur assurant le soutien du gouvernement dans cette démarche. Et dans un communiqué transmis ce mercredi matin, le Tapura se réjouit de "cette adoption" qui constitue, selon le parti d'Édouard Fritch, "un pas supplémentaire pour renforcer les communes et reconnaître pleinement l’action quotidienne de nos tāvana au service des Polynésiens". Le vote de la commission des Lois de l'Assemblée nationale marque ainsi une avancée concrète pour la reconnaissance du rôle des maires et pour sécuriser leur action dans des domaines essentiels pour leurs administrés. Le texte sera examiné en séance publique le 10 décembre, permettant ainsi aux tāvana d'agir dans un cadre légal renforcé avant les municipales. Un joli cadeau de Noël à l'approche de cette prochaine échéance électorale.

Rédigé par Stéphanie Delorme le Mercredi 19 Novembre 2025 à 09:17 | Lu 1380 fois