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​Fritch tient ferme sa majorité pour le budget


Tahiti, le 10 décembre 2019 - Edouard Fritch a fait une mise au point autoritaire, mardi matin, pour rappeler la discipline de groupe aux élus du Tapura Huiraatira, après la récente démission de Nicole Sanquer. Le budget primitif 2020 de la Polynésie française a ensuite été examiné et adopté sans problème en début de soirée à l'issue d'une journée marathon.

Si des tensions couvent au sein de la majorité à quatre mois des élections municipales, de l’aveu de Nicole Sanquer, ce n’est pas à l’occasion de l’examen du projet de budget primitif, mardi à l’assemblée, qu’elles se seront révélées par une cacophonie dans les débats. 
 
Le budget primitif de l’exercice 2020 a été adopté à l'unanimité par 49 voix, mardi en début de soirée à Tarahoi, à l'issue de la première journée de la 6e et dernière séance plénière de la session budgétaire. L'opposition Tahoera'a a voté favorablement avec le Tapura, le groupe Tavini Huiraatira s'est abstenu.
 
Les moyens financiers que prévoit de gérer le Pays l’an prochain sont en augmentation d’environ 1,6 % par rapport au budget 2019. La collectivité table sur un budget de 170,2 milliards de Fcfp pour l’exercice 2020, dont 130,9 milliards Fcfp en section de fonctionnement et 39,2 milliards pour les investissements.
 
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Lors de cette séance plénière de l'assemblée de la Polynésie française, dernier rendez-vous de la session budgétaire 2019, le président Fritch, leader du Tapura Huiraatira, aura surtout saisi, dès l'entame, l’opportunité de travailler publiquement et avec fermeté sur l’unité de sa majorité, à l’appui de la récente démission de Nicole Sanquer et d’un principe clair : "On ne peut pas être dedans et dehors à la fois".
 
La députée a quitté le groupe rouge et blanc, jeudi 6 décembre. S’il est finalement sans effet sur la cohésion de la majorité, ce départ n’est pas sans conséquences pour l’avenir politique de l’élue. Aujourd’hui, tout le monde est prévenu. Dans le discours prononcé devant les représentants polynésiens, Edouard Fritch a d’emblée fait un rappel à l’ordre en direction de sa majorité, mardi matin. En deuxième rideau, et pour l’exemple, ce message devrait être suivi dès ce mercredi soir par l’expulsion du parti politique de l’élue démissionnaire. Un conseil politique du Tapura est convoqué pour statuer sur la question.

​​Syndrome du "pito"

La parlementaire élue Tapura sur la deuxième circonscription législative de Polynésie en juin 2017, a justifié sa décision rejoindre les non-inscrits en mettant en avant son refus de suivre systématiquement la discipline de vote du groupe. Notamment sur les textes avec lesquels elle est en "désaccord". 

Une position délétère pour l’unité du groupe qu’Edouard Fritch a dénoncé en ces termes : "L’ennemi sournois de la majorité, c’est la division (…)Lorsque l’on est tourné vers l’intérêt général, toutes les autres raisons ou motifs d’insatisfaction éventuelle relèvent de la futilité ou de l’égoïsme ou tout simplement de l’égocentrisme, ce que j’appelle le syndrome du « pito ».", a-t-il taclé avant lancer au groupe des 39 élus Tapura : "Or, je vous rappelle que nous avons construit ensemble une famille politique, sur la base de la confiance qui s’appuie sur la responsabilisation, une liberté qui s’appuie sur la responsabilité et une gouvernance qui privilégie la concertation et la collégialité sur les dossiers essentiels. Cependant, liberté, confiance, responsabilisation et concertation ne signifient pas anarchie et individualisme. Certains d’entre vous n’ont pris que la liberté et pas la responsabilité qui va nécessairement avec. Les droits s’accompagnent toujours de devoirs et d’obligations." 
 
Et plus directement en direction de Nicole Sanquer : "On me dit que la désobéissance civile n'est pas l'ennemie de la démocratie ; c'est l'obéissance servile qui est la plus à craindre. A ceux-là je leur réponds qu'un mouvement politique n'est audible que s'il ne parle que d'une seule voix et même voix".
 
Si certains avaient envisagé la voie de la distinction pour l’examen du budget, ils se seront de toute évidence ressaisis. La séance marathon consacrée sur toute la journée de mardi à l'examen du budget de la Polynésie française pour 2020 pouvait débuter. 

​Tapura et Tahoera'a : "La même chose" pour Nicole Sanquer

La question d'une éventuelle expulsion du Tapura Huiraatira doit notamment être évoquée, lors d'un conseil politique organisée ce mercredi par le parti. Interrogée sur la perspective de son expulsion du Tapura Huiraatira, Nicole Sanquer a semblé affectée, mardi, par un sentiment d'injustice. Edouard Fritch ne prononcera pas la sentence. "Non, je ne m'appelle pas... Je ne fais pas ça moi", a-t-il dit par opposition à celui qui fut son mentor en politique pendant 30 ans, Gaston Flosse. Mais comme l'a rappelé mardi le leader du Tapura, aux élus du groupe de la majorité, "on ne peut pas être dedans et dehors à la fois". Nicole Sanquer espérait rester dans le parti politique de la majorité tout en se désolidarisant du groupe à l'assemblée. Compte tenu du sort que semble lui réserver le parti, elle a déclaré mardi au micro de Tahiti Infos qu'au Tapura, "il est arrivé que des personnes s’expriment. Je pense à Jacquie Graffe qui avait demandé un « congé » avant les élections législatives, afin de pouvoir soutenir sa candidate et non celle soutenue par le Tapura. Ensuite, il y a eu les quatre parlementaires qui ont décidé publiquement de ne pas participer aux élections européennes. Aujourd’hui, j’explique au président pourquoi je souhaite me mettre dans les non-inscrits. Vu les propos qu’il a tenus ce matin, je pense qu’il n’a pas compris ma démarche et je m’attends à une sanction, en effet", a-t-elle dit, ouvertement touchée par la situation. "Mais il fallait s’y attendre. Vous savez, j’ai été exclue du Tahoera’a Huiraatira, parce qu’à un moment donné nous avons pris position contre les décisions d’en-haut. Aujourd’hui, je constate qu’au Tapura, c’est la même chose".

Rédigé par Jean-Pierre Viatge le Mardi 10 Décembre 2019 à 19:19 | Lu 2882 fois