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Violences sexuelles dans le patinage: Gailhaguet se défend et cible Maracineanu


Paris, France | AFP | mercredi 05/02/2020 - En plein scandale de violences sexuelles dans le patinage français, son inamovible patron Didier Gailhaguet s'est défendu mercredi: il a assuré n'avoir jamais couvert aucun cas d'abus dans son sport et a ciblé la ministre "moralisatrice" Roxana Maracineanu, qui a appelé à sa démission.

"Mme la ministre ne m'a pas entendu, elle est drapée dans ses certitudes", a déclaré M. Gailhaguet, 66 ans, lors d'une conférence de presse, dénonçant "une ministre moralisatrice et des opportunistes de circonstances que l'on n'a pas vus dans les patinoires depuis 10 ans".
Sa démission ? Il a réaffirmé qu'il se positionnerait une fois rendues les conclusions d'une nouvelle enquête administrative, diligentée par le ministère. Autant dire au moins plusieurs semaines.
Juste avant qu'il ne s'exprime, la porte-parole du gouvernement, Sibeth N'Diaye, avait assuré qu'"évidemment", la demande de son départ était "partagée par l'ensemble du gouvernement".
Ce choix de Didier Gailhaguet de s'accrocher à la présidence qu'il occupe depuis 1998 (sauf une interruption entre 2004 et 2007) n'a pas fait l'unanimité en interne: quatre membres du bureau exécutif (sur seize) de la FFSG ont démissionné. 
 

- "je n'ai pas protégé Beyer" -

 
Jusqu'où ira Gailhaguet, déjà éclaboussé par une affaire de tricherie aux JO de Salt Lake City en 2002, puis contraint en 2004 à la démission de la FFSG à cause d'une mauvaise gestion, mais qui avait retrouvé la présidence en 2007 ?
Mercredi, il a en tout cas refusé de porter le chapeau dans la gestion du cas Beyer, du nom de l'ex-entraîneur soupçonné d'abus sexuels sur des patineuses, et accusé de viols depuis la semaine dernière par une ancienne figure de ce sport, Sarah Abitbol.
"Je n'ai absolument pas protégé Gilles Beyer", a résumé Gailhaguet, exprimant son "dégoût" pour les faits rapportés.
Concrètement, Roxana Maracineanu reproche à la fédération dirigée par Didier Gailhaguet d'avoir remis Gilles Beyer dans le circuit, au début des années 2000, malgré une enquête administrative soulignant des attitudes inappropriées avec de jeunes patineuses. L'enquête avait conduit le ministère à sortir Beyer de ses rangs en 2001, mais l'entraîneur avait retrouvé une place dans son club d'origine, les Français volants. Il a également exercé des mandats à la Fédération jusqu'en 2018.
Gailhaguet a affirmé qu'il avait lui-même demandé une enquête administrative à la prédécesseure de Roxana Maracineanu, Marie-George Buffet (1997-2002), et qu'ensuite, les ministères des Sports et de l'Education nationale s'étaient refilés la patate chaude.
Le rapport issu de cette enquête administrative, en 2000, dont l'AFP a eu connaissance, montre que Gailhaguet était précisément le destinataire du courrier de parents donnant la première alerte.
Le patron du patinage assure aussi qu'il était intervenu auprès de Beyer, aux Français volants, pour l'intimer de ne plus encadrer des mineurs.
"Je me suis fait un peu réprimander, il m'a affirmé que la direction régionale de la jeunesse et des sports", dépendant du ministère des Sports, "lui avait rendu sa carte professionnelle", a affirmé Gailhaguet.
Enfin, sur les mandats détenus par Beyer au bureau exécutif de la FFSG jusqu'en 2018, Gailhaguet a assuré qu'il n'y pouvait pas grand-chose parce que l'ancien entraîneur y avait été élu.
Gilles Beyer a aussi organisé dans les années 2010 plusieurs tournées de gala de l'équipe de France de patinage artistique.
 

- "Sans voix" -

Quelques heures plus tôt, Roxana Maracineanu avait exprimé son sentiment sur sa rencontre lundi avec Didier Gailhaguet.
"Je reste un peu sans voix devant ce Monsieur que j'ai rencontré pendant une heure il y a deux jours et qui a passé la moitié du temps à se défendre. A aucun moment, il n'a dit devant moi quelle était sa vision par rapport à cette problématique qui touche sa fédération", a déploré la ministre sur France 2.
Depuis que l'affaire a éclaté la semaine dernière, Gilles Beyer, 62 ans, a concédé avoir eu "des relations intimes" et "inappropriées" avec Sarah Abitbol, lui présentant des "excuses" que cette dernière a refusées.
Même si les faits dénoncés dans le livre de Sarah Abitbol, "Un si long silence" (Plon), paraissent prescrits car ils remontent aux années 1990 à 1992, quand elle avait 15 à 17 ans, le parquet de Paris a annoncé mardi l'ouverture d'une enquête pour viols et agressions sexuelles sur mineurs par personne ayant autorité sur la victime.

le Mercredi 5 Février 2020 à 06:14 | Lu 314 fois