Tahiti Infos

"Un retour aux urnes ? Je dis oui"


Arue - Au lendemain de l'audience du tribunal administratif et des conclusions d'annulation des élections de Arue prises par le rapporteur public, la tāvana de Arue, Teura Iriti, a accordé une interview à Tahiti Infos. Elle redit "chiche" pour un retour aux urnes, affirme que personne n'a été forcé à remettre sa procuration et évoque sa prise de distance avec le Tahoeraa –son "envol"– depuis le début de son mandat.

Vous n'étiez pas présente mardi au tribunal administratif ?
"Tous les mardis matin depuis mon investiture, je reçois la population. Et pour moi, c'est primordial pour prendre la température et voir ce qui se passe dans ma commune, avoir une bonne topographie pour comprendre ce qui se passe dans tel ou tel quartier. (…)"

Comment appréhendez-vous la décision du tribunal ?
"Je dis, on laisse les choses se faire. Aujourd'hui, je vis pleinement ce que je partage avec beaucoup. Adviendra que pourra, mais rien ne me perturbe. Quoiqu'il arrive, je continuerai de servir ma population. Je suis très confiante et je dirais que c'est magique cette équipe que j'ai, car je ne connais pas tout le monde, c'est une équipe composée. (…)"
"Un retour aux urnes, je l'ai toujours dit : "chiche". 

Vous envisagez un éventuel retour aux urnes ?
"Un retour aux urnes, je l'ai toujours dit : "chiche". Et puis ce n'est pas nouveau pour nous. On dit en tahitien "ia vai ineine noa 'oe". Et un retour aux urnes, c'est quoi ? C'est retourner auprès de sa population. C'est discuter avec eux. Et c'est ce qu'on fait actuellement. Je pense que quand on est élu, on doit toujours être au plus près de sa population pour prendre les meilleures décisions. Donc cela ne changera pas grand-chose pour nous, c'est toujours d'être dans les quartiers, les recevoir, et les accompagner au mieux."

Le rapporteur public n'a pas demandé votre inéligibilité, c'est un soulagement ?
"Je dis d'abord, merci seigneur. On l'a toujours annoncé depuis juillet dernier qu'on laisse le tribunal faire son travail. Au départ, cela a été un choc car nous ne nous y attendions pas du tout, d'autant que ce qui a été mis dans leur recours me semble très gros, comme les procurations frauduleuses…"

Des procurations établies par une personne de votre liste…
"Alors je ne vais pas rentrer dans le détail. Mais ce qui est important, c'est que nous n'avons à aucun moment forcé qui que ce soit à nous remettre leur procuration. Pendant six mois, les enquêteurs ont fait leur boulot, ils ont fait leur enquête. Je leur fais confiance et aujourd'hui on me dit qu'il n'y a aucune preuve (NDLR : La rapporteure publique a pourtant bien fait état mardi de "manœuvres" commises par l'équipe de campagne dans l'établissement des procurations irrégulières). Maintenant je ne veux pas rentrer dans les détails. Je veux juste dire : laissez-nous travailler. Le message que je donne à mes équipes, c'est 'ne nous laissons pas appesantir par ce recours'. Et demain on acceptera ce qui sera décidé, mais nous sommes très sereins. Je sais ce que j'ai fait et je n'ai pas à m'inquiéter."

N'est-ce pas plus difficile de travailler avec cette épée de Damoclès au-dessus de la tête ?
"L'épée de Damoclès, c'est un peu trop fort. Si on est bien dans sa tête, et si on aime ce qu'on fait et qu'on n'a rien à se reprocher, le chemin est libre et il suffit juste de l'emprunter et de ne pas s'asseoir et attendre. Nous avons fait nos preuves pendant six mois. Des actions ont été menées. On essaie de réaliser ce qu'on a dit lors de nos campagnes. Il faut qu'au bout de ce mandat, on ait réalisé un maximum de projets qui ont été soumis à la population. (…)"

Si vous perdez les élections quel sera votre plus grand regret ? 
"Je ne suis même pas dans cet état d'esprit. Mon parcours politique depuis 2003, il y a eu des hauts et des bas. Des défaites comme des victoires. Mais les défaites, je les prends comme des victoires car cela nous forge (...). Ce sont aussi les défaites qui m'ont fait grandir. Aujourd'hui, rien ne m'effraie. Tout ce que je sais, c'est 'qu'est-ce que je peux apporter pour l'autre ?' (…)"
 
Cela fait longtemps qu'on ne vous voit plus participer aux réunions du Tahoeraa ?
"Je dirais que je suis très occupée. Pendant plus d'un an et demi, j'ai fait campagne sur Arue pour les communales. Et c'est vrai que j'ai rencontré mon président, je lui ai fait part de ma volonté de vraiment courir à Arue, mais autrement. Je voulais courir en tant que tamarii Arue."

Et pas en tant que Tahoeraa ?     
"Non, du tout. On est allé chercher d'autres bords politiques mais je ne voyais pas cela. Je voyais des enfants de Arue. Donc, pendant un an et demi ensemble, on a œuvré sur Arue. Enfin on a gagné. Nous avons gagné, nous, tamarii Arue, sans les partis politiques. Nous avons œuvré. Nous nous sommes battus et nous sommes arrivés à ce résultat. Nous voulons continuer, car si on l'a fait c'est qu'on a vraiment envie de servir Arue et d'apporter notre pierre."

Et donc il n'y a pas de dissension avec Gaston Flosse ?  
"Non, pas du tout. D'autant plus qu'il est bien entouré aussi, donc je connais très bien mon président et lui aussi. Je suis en bons termes avec tout le monde. Je suis en bons termes avec M. Gaston Flosse, je suis en bons termes avec M. Oscar Temaru et M. Édouard Fritch. Et là aussi, j'ai pris de la graine comme on dit. Les années ont passé. Ce n'est plus la petite Teura qui apprend en politique. Aujourd'hui, c'est celle qui a été bien formée et donc je remercie ceux qui ont été sur mon chemin. Maintenant, c'est comme toute chose. Un enfant, quand il grandit et lorsqu'il a la majorité, il prend son envol."

Rédigé par Vaite Urarii Pambrun le Jeudi 28 Janvier 2021 à 07:06 | Lu 3001 fois