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Trois ans ferme requis en appel contre l'instituteur sadique


Tahiti, le 7 janvier 2020 - Un instituteur de 61 ans, condamné en première instance à quatre ans de prison dont deux ferme pour des violences commises sur ses élèves mineurs, a comparu jeudi matin devant la cour d'appel qu'il avait saisie au motif qu'il n'avait pu s'expliquer correctement lors de son premier procès. Quatre ans de prison dont trois ans ferme ont cette fois été requis à son encontre. La cour d'appel rendra sa décision le 4 février.
 
Le procès d'un instituteur "sadique" et "manipulateur", Massimo Raveino, s'est ouvert devant la cour d'appel de Papeete jeudi matin pour plus de trois heures de débats. Le 8 septembre dernier, le sexagénaire avait été condamné par le tribunal de première instance à quatre ans de prison dont deux avec sursis pour avoir infligé toutes sortes de maltraitances à ses élèves lorsqu'il était instituteur à l'école de Vaiaha de Faa'a. Le directeur de cet établissement, avait quant à lui écopé de quatre mois de prison avec sursis pour non dénonciation des faits.
 
Cette affaire sordide qui avait choqué l'opinion publique avait été mise au jour grâce à la mère de l'un des élèves de Massimo Raveino. En mars 2019, cette femme avait signalé des violences subis par son petit garçon alors que ce dernier avait 9 ans. Un jour, l'enfant était rentré de l'école avec les oreilles "violettes". Interrogé par sa famille, le petit avait relaté une scène surréaliste. S'étant trompé dans un exercice, son instituteur lui avait ordonné d'embrasser une camarade de classe. Face au refus de l'enfant, Massimo Raveino avait demandé aux autres élèves de la classe de tirer les oreilles du malheureux.
 

Plaisir à humilier ses élèves

Les éléments recueillis lors de l'enquête menée par les gendarmes après le signalement de la mère avaient permis de dresser le portrait d'un instituteur sadique et pervers qui prenait plaisir à humilier ses petits élèves. L'homme leur crachait dans la bouche, leur donnait des tapes sur la tête, leur administrait de douloureux "massages thaïlandais" sur les épaules et les encourageait à se battre. Il leur donnait des noms humiliants, en fonction de leur physique notamment. Les fortes têtes de la classe devaient défiler "comme des miss" au tableau lorsqu'elles agaçaient Massimo Raveino et les élèves devaient se taire en échange de très modiques sommes d'argent. L'instituteur revendait également le matériel de l'école, cahiers, crayons, aux élèves.
 

Responsabilité

Lors de la révélation de cette affaire, le sexagénaire était pourtant déjà connu de la justice puisqu'il avait déjà été condamné en 2006 pour des atteintes sexuelles commises sur sa belle-fille mineure. Malgré cette condamnation, il avait conservé son emploi dans la fonction publique et sa dernière notation avait fait état d'un travail "très satisfaisant".
 
Après leur condamnation en première instance, l'instituteur et son directeur avaient tous deux fait appel. Ils ont donc comparu devant la juridiction jeudi matin. Le premier a expliqué qu'il avait choisi cette mesure afin de pouvoir s'expliquer de manière plus pertinente car il n'était pas assisté d'un avocat lors de son premier procès. Le second a, quant à lui, indiqué à la cour qu'il contestait la qualification des faits qui lui étaient reprochés – la "non dénonciation" – car cela laisser "supposer" qu'il avait su mais n'avait rien fait.
 

Enfance difficile

Lors de son audition à la barre, Massimo Raveino a quelque peu agacé la cour en tentant de faire endosser sa responsabilité à ses pauvres élèves. Semblant prendre peu conscience de ses actes, il a invoqué son enfance passée à Huahine dans un contexte où il avait l'habitude d'être sévèrement réprimandé. Faible prise de conscience chez l'ancien directeur de l'école également, Felix Yau, qui a quant à lui expliqué difficilement qu'il avait eu vent de certaines maltraitances mais qu'il n'avait pas de preuve. "Mais qu'avez-vous fait, Monsieur ? Des parents, des enfants et des femmes de ménage de l'école vous ont rapporté ces faits ! Cela méritait au moins de vous renseigner et vous n'avez rien fait !" s'est emportée la présidente du tribunal face aux molles dénégations de l'ancien directeur à la barre.
 
Après que les avocats des 22 parties civiles ont dénoncé les "violences physiques et morales abominables" exercées par l'instituteur sur ses jeunes élèves, le procureur de la République leur a emboîté le pas en affirmant tout d'abord que Felix Yau n'avait rien dit par "peur qu'un scandale touche son école". Concernant Massimo Raveino, le représentant du ministère public a souligné son "sadisme" et sa "violence". Six mois de prison avec sursis ont été requis contre le premier, quatre ans de prison dont trois ans ferme contre le second, soit un an ferme de plus qu'en première instance.
 

L'absence du Pays

En défense pour Felix Yau, Me Peytavit a dénoncé une "incurie administrative" en rappelant que l'instituteur avait été condamné en 2006 et qu'il exerçait toujours en 2019 dans la fonction publique. Selon l'avocat de Massimo Raveino, ce dernier n'a fait que "reproduire ce qu'il a subi" et avait, l'année des faits, "perdu le contrôle sur sa classe" alors que c'était un homme qui avait auparavant obtenu d'excellents résultats. La cour d'appel rendra sa décision le 4 février.
 
Notons par ailleurs que le Pays, qui avait brillé par son absence lors du procès de première instance, s'était cette fois constitué et que sa représentante est venue expliquer à la barre qu'il y avait eu "un problème de communication". Elle a en effet indiqué que c'est seulement en novembre dernier, soit deux mois après la condamnation ultra médiatisée de l'instituteur, que le Pays avait été informé de ce dossier.
 

Rédigé par Garance Colbert le Jeudi 7 Janvier 2021 à 16:43 | Lu 3193 fois