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Teava Magyari, le voyage comme passion, la photo comme outil


TAHITI, le 11 août 2021 - Il est le fondateur de la revue Heiva dont le premier numéro a été publié en 2010. Professeur d’anglais en Polynésie, il a consacré ses vacances au voyage, à la photographie, à la revue. Il a voyagé en Iran, en Corée du nord, en Alaska… et espère bientôt, repartir à l’aventure. Il a encore tant de projets !

Ça me fait plaisir qu’on s’intéresse à moi”, reconnaît Teava Magyari tout à fait disposé à raconter ses voyages, à détailler son engouement pour la photographie mais aussi à revenir sur son parcours professionnel.

Il est professeur d’anglais au lycée du Diadème. Un métier choisi depuis l’obtention de son baccalauréat. “J’avais des facilités dans cette langue et ça me plaisait”. Plus jeune, il passait toutes ses grandes vacances de juillet-août aux États-Unis, chez un ami américain de ses parents. “Il s’appelait Tom et vivait dans la banlieue de Los Angeles. Il est un autre de mes pères, une personne importante dans ma vie”.

En plus d’apprécier l’anglais, Teava Magyari a toujours aimé transmettre, partager son savoir. Il a donc démarré une maîtrise à l’université de Polynésie française pour devenir professeur. Puis, il a enchaîné avec un Capes dont les oraux se déroulaient à Bordeaux. En 1999, il démarrait l’enseignement en tant que contractuel. En 2004, il devenait titulaire d’un poste à Mahina. “Je commence à être un vieux prof”, commente-t-il avec humour.

Moto et photo

À l’occasion d’un voyage en Espagne en fin d’année 2009, Teava Magyari a assisté à une course de motos. “C’était une course de MotoGP”, précise-t-il. “Le top du top, je suis vraiment fan !” Mais il a été frustré de ne pas pouvoir saisir parfaitement certains instants de l’événement. Il n’a pas réussi à faire de photographies “convenables” avec son “petit compact”. Il est rentré sans images de la course mais avec la ferme envie de se plonger dans la pratique du 8e art.

De retour en Polynésie, il a questionné son frère qui lui en savait déjà beaucoup sur le sujet. “Il m’a donné des tuyaux et j’ai potassé sur le net”. En décembre 2009, il a acheté son premier reflex numérique pour aller aux États-Unis. Sur place il a acheté de nouveaux équipements et surtout, “énormément de documentation”. Il a appris “dans les livres”. Les cours ont repris. Teava Magyari a repris le chemin de l’école en janvier. Il a pris l’habitude de se balader avec un appareil photo. Petit à petit, l’idée d’une revue sur les fêtes de juillet a germé.

Matareva, l’équipe soudée

Une équipe s’est formée autour de Teava Magyari, “elle était constitué de copains photographes”. Puis, elle s’est étoffée de rédacteurs. Matareva est née, elle a suivi son premier Heiva (qui a donné le nom à la revue de Matareva) en 2010. “Le début a été plutôt chaotique. Quand tu créé quelque chose, souvent, tu ne sais pas trop comment ça peut se faire, quelle ligne directrice suivre, ça part un peu dans tous les sens”.

Moana’ura, chorégraphe bien connu du fenua, évoluant dans le monde de la danse depuis longtemps, a accepté de jouer le rôle du rédacteur en chef. Huit photographes et quatre rédacteurs ont signé la première édition. L’équipe a été soutenue en coulisse par la mère du fondateur qui a assuré la logistique, a trouvé des annonceurs…

Aujourd’hui Matareva compte 15 photographes et 11 rédacteurs. Mareva Leu est la rédactrice en chef. La revue n’a pas pu sortir l’an passé, elle ne sortira pas non plus cette année. Car le Heiva, une fois n’est pas coutume, a laissé place à un festival baptisé Ti’a Mai. Les conditions sanitaires ont mis l’édition de la revue sur pause. “On reprendra quand le Heiva reprendra”, annonce Teava Magyari qui espère par ailleurs pouvoir reprendre ses voyages.

Passion voyage

Teava Magyari a la passion du voyage. Le premier qu’il ait fait en tant que photographe date de 2010. C’était en Scandinavie, il voulait voir les aurores boréales. Mais avec le recul, il insiste : “Je ne me considère pas comme un photographe voyageur car la photo n’est qu’un outil. En dehors des voyages, je ne me balade plus avec un appareil à portée de main tout le temps. Je n’ai même pas l’envie de le sortir”.

Il aime ensuite partager ce qu’il voit, sent, entend. Il écrit toujours un texte plus ou moins long pour faire savoir ce qu’il a vécu à ses proches restés en Polynésie. En Iran par exemple, il a visité le pays avec un guide, Abbas. Ensemble, ils ont beaucoup roulé en voiture profitant du temps pour découvrir la culture musicale de l’autre. "Il me faisait écouter son rap et sa dance music iranienne. Je lui faisais écouter Bobby et Angelo”. Depuis ils sont restés en contact et s’appellent au moins une fois l’an.

En Islande en 2012, Teava Magyari a découvert qu’il pouvait plonger. Il n’a pas hésité et, en combinaison étanche, a “plané entre deux continents !” Le site où il a plongé, baptisé la Silfrugjá, est une faille entre la plaque eurasienne et la plaque nord-américaine. La température de l’eau ne dépassait pas les 2°C.

De Tchernobyl, il garde le souvenir “d’un endroit un peu glauque”. Une ville fantôme, désertée par ses 200 000 habitants en quelques heures. La ville la plus proche de la centrale nucléaire, Pripiat, se trouve à trois kilomètres et se visite. “Sur place on avait une heure de visite libre, je me suis greffé à un groupe espagnol pour ne pas rester seul”. Les groupes pouvaient choisir un bâtiment qu’ils pouvaient visiter de bas en haut. “Il y avait de très longs couloirs sombres. Quand je voulais prendre une photo, je m’avançais de 5 ou 10 mètres mais je ne trainais pas, je courrais retrouver le groupe”. Il a été très marqué par la visite du musée de Kiev dédié à la centrale et à l’accident. “Il y a des photos des habitants, c’est très émouvant, j’ai pleuré”, confie-t-il.

Pour rejoindre Oslo en Norvège en 2010, il a dû faire transit à Paris Charles de Gaulles. Le transit a duré près de 48 heures en raison de fortes tempêtes de neige. “Je dormais dans un sac de couchage dans le terminal, les vols étaient annulés les uns après les autres”. Finalement, il a réussi à rejoindre la capitale norvégienne. Son sac, en revanche, n’est jamais arrivé. “J’ai débarqué en pull et petit manteau de ville alors qu’il faisait - 25°C”.

Toutes ces anecdotes ne sont que des échantillons des moments forts vécus ces dernières années et immortalisés, pour certains, grâce aux appareils toujours plus performants et à une technique toujours mieux maîtrisée. Son dernier séjour mémorable a eu lieu en 2019, en Alaska, pour revoir les aurores boréales. “Depuis, je tiens, ça va, mais j’ai hâte de repartir !” Tant de destinations l’appellent : la Russie, l’Amérique du sud, l’Afrique, l’Éthiopie, la Namibie… une vie n’y suffira pas.


Rédigé par Delphine Barrais le Mercredi 11 Août 2021 à 22:26 | Lu 3443 fois