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Saisies criminelles au fenua : "Nous irons chercher le produit de vos crimes"


Saisies criminelles au fenua : "Nous irons chercher le produit de vos crimes"
Tahiti, le 8 février 2021 - Au terme d'une année marquée par la crise sanitaire et économique, le commandant de la gendarmerie pour la Polynésie française, le général Saulnier, dresse un bilan positif mais contrasté. Si la délinquance générale a connu une baisse de -9,1% en 2020, il rappelle que les motifs de cette baisse sont, pour certains, "indéniablement liés à l'effet Covid".

Un bilan de la délinquance en 2020 a été effectué le 3 février au haut-commissariat, quels enseignements tirez-vous de l'année écoulée ?
 
"Il convient de retenir en premier lieu que la délinquance en Polynésie est modérée, maîtrisée et en baisse cette année. Ainsi, à titre d'exemple, la délinquance générale qui regroupe les indicateurs statistiques est en baisse de -9,1% pour la gendarmerie, soit une baisse de 779 faits. C'est loin d'être négligeable. Dans le détail, les atteintes volontaires à l'intégrité physique sont stables avec une baisse très sensible des violences physiques dites crapuleuses (-21,9%), et une hausse légère des violences physiques non crapuleuses (+3,8%), qui comprennent notamment les violences intrafamiliales. Nous avons constaté une très forte augmentation des violences intrafamiliales en début d'année avec un effet de libération de la parole très fort, à mettre en lien notamment avec un plan très volontariste mis en œuvre en novembre 2019."
 
Quels sont, selon vous, les motifs de cette baisse de la délinquance ?
 
"Les motifs sont doubles. Le premier est indéniablement l'effet Covid, avec une plus grande sédentarité des personnes au regard des contraintes de mobilité en lien avec le couvre-feu ou le confinement. 2020 est clairement à ce titre une année atypique dont il faut appréhender les bilans avec circonspection. Les contraintes sanitaires ont eu de fait un impact notamment sur les atteintes aux biens. J'en souligne un second pour ma part, à mettre au crédit des enquêteurs : l'excellent taux de résolution des affaires judiciaires. À titre d'exemple, le taux de résolution des cambriolages en zone gendarmerie est de 39%, soit trois fois le résultat enregistré en métropole. C'est un signe fort adressé aux délinquants potentiels : nous vous retrouverons et traduirons devant la justice sans délai. Je salue l'action des militaires de la gendarmerie qui ont su répondre présent, répondre à toutes les sollicitations, celles traditionnelles, du quotidien, mais aussi celles exceptionnelles liées au Covid."
 

"Le taux de résolution des cambriolages, trois fois plus haut qu'en métropole"

Quel est le bilan dans le domaine de la sécurité routière ?
 
"Nous terminons l'année en baisse sur le nombre d'accidents et de blessés et en stabilité sur le nombre de tués avec 29 décès sur l'ensemble de la Polynésie en 2020. Mais ce bilan est décevant car nous souhaitions tous que la moindre mobilité engendrée par les contraintes sanitaires se retrouve plus nettement dans les bilans statistiques. Cela n'a pas été le cas et les tendances lourdes constatées demeurent, avec notamment la problématique de l'alcool et/ou des stupéfiants que l'on retrouve dans 76% des accidents mortels, comme d'ailleurs très souvent dans les violences aux personnes."
 
Ice et violences conjugales, les priorités restent les mêmes pour la gendarmerie ?
 
"Effectivement, nous nous attachons à fortifier encore notre réponse. Nous avons signé mercredi un plan ice, avec les partenaires engagés dans la lutte sur un plan de la répression, prévention et de la communication. Dans le domaine répressif, je voudrais souligner la création depuis le 1er octobre dernier, d'une Cellule de renseignement opérationnel sur les stupéfiants (CROSS) qui revêt un caractère permanent, réunit l'ensemble des partenaires engagés dans la lutte, police, douane, gendarmerie et police aux frontières, et qui vise à mieux centraliser, enrichir, partager et diffuser au service le mieux à même de le traiter les renseignements relatifs aux trafics de stupéfiants. Le parquet, le haut-commissariat ou encore le bureau de l'action de l'État en mer sont également associés aux travaux lorsque les réunions présentent une dimension maritime. Cette CROSS est rattachée à une nouvelle création effective depuis le 1er janvier, celle d'une antenne de l'OFAST (office antistupéfiants). Il faut bien comprendre que la création de la CROSS et de l'antenne OFAST sont un tout visant à densifier la lutte avec un meilleur échange et partage du renseignement et une amélioration de la coopération à l'international avec nos partenaires traditionnels tels que les États-Unis, l'Australie et la Nouvelle-Zélande."
 

"Un signe fort adressé aux délinquants potentiels"

Qu'en est-il des saisies d'avoirs criminels ?
 
"Vous le comprenez, notre approche doit être globale et sous un prisme international notamment. Par global, j'entends que notre réponse soit également sur le plan de la saisie du produit du crime. C'est la raison pour laquelle j'ai tenu à implanter en un même lieu la section de recherches de gendarmerie, la CROSS, l'antenne OFAST et le GIR (Groupe interministériel de recherches) dont la finalité est de lutter contre l'économie souterraine avec pour objectif notamment les stupéfiants. Cette proximité, cette unité de lieu au sein de la sections de recherches de gendarmerie est en soi un facteur d'efficacité accrue de la réponse. La saisie des avoirs des trafiquants est un facteur-clef de la démarche engagée et j'y suis très attaché. C'est la raison pour laquelle la gendarmerie a également créé depuis le 22 janvier une cellule régionale des avoirs criminels afin de dynamiser et d'accompagner dans la durée la manœuvre de captation des avoirs criminels. À cet égard, je tiens à souligner que le dernier réseau démantelé à Faa'a par la gendarmerie en décembre 2020 est un modèle du genre avec près de 2OO millions de Fcfp de biens saisis. Il faut que les délinquants le sachent : nous irons chercher le produit de vos crimes."
 
Quels sont les autres domaines dans lesquels l'action de la gendarmerie va être renforcée ?
 
"Oui. au-delà de la sécurité routière, j'ai soulevé récemment la nécessité d'un traitement de la problématique des chiens en Polynésie. Qu'ils soient errants ou non d'ailleurs, nous constatons trop régulièrement des attaques comme celles en mai 2020 ou une personne âgée avait été tuée par des chiens errants. Fin 2020, un enfant tout juste âgé de 7 ans a été mordu gravement et défiguré. Atteintes aux personnels régulières et récentes, prophylaxie au regard des déjections sur les plages  notamment, sécurité routière, les constats opérés nécessitent un traitement ad hoc et une convergence d'actions."

"Je relève également une augmentation des accidents maritimes  (apnée, pêche, noyades, accidents bateaux/nageurs, personnes disparues en mer...) : 23 faits en 2020 contre 13 et 14 respectivement en 2019 et 2018. Enfin, j'ajoute que j'ai pour ambition également de structurer davantage également la réponse de la Gendarmerie pour préparer l'avenir et faire face à un autre enjeu  pour la Polynésie : la protection de l'environnement. Je sens que les Polynésiens sont très légitimement   attachés à la protection du FENUA et cela constitue clairement un enjeu stratégique, dans le domaine touristique notamment, mais pas seulement. La Gendarmerie est déjà impliqué dans ce combat et de belles affaires ont été traitées en 2020 pour la protection d'espèces protégées (braconnages de tortues) ou la lutte contre les pollutions terrestres ou maritimes.  Mon projet est d'armer encore davantage le COMGENDPF sur ce contentieux avec davantage dans nos rangs de référents atteintes environnement santé publique, RAESP) ,ou enquêteurs atteintes environnement santé publique (EASP), organisation en miroir en déconcentré et relais de l'office central du même nom, l' OCLAESP (office central de lutte contre les atteintes à l'environnement et à la santé publique)."


 
 

Rédigé par Garance Colbert le Lundi 8 Février 2021 à 17:18 | Lu 2115 fois