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Retour sur les débuts de Miss Tahiti avec Dominique Pétras


Retour sur les débuts de Miss Tahiti avec Dominique Pétras
TAHITI, le 4 mai 2021 - Dans le cadre des 60 ans de Miss Tahiti, Tahiti Infos lance une série de portraits. La publication de ces portraits durera jusqu’à l’élection de la prochaine Miss. Pour démarrer, la parole est donnée à Dominique Pétras qui, en 1994, a déposé la marque Miss Tahiti et créé le comité Miss Tahiti Nui.

Tahiti Infos : D’où vous vient cette passion pour la mode ?
Dominique Pétras : "Je suis née à Tahiti d’un père slave et d’une mère chinoise. Depuis 27 ans, je vis à Bora où je gère avec mon mari et mes enfants ‘Bora Bora Original’ un concept store qui réunit mes passions : la photographie, la mode, l’art, la décoration.
Ma mère Claire était couturière, diplômée d’une école de Paris. Elle avait son atelier rue Colette au coin du marché́ de Papeete. Lorsque je rentrais des cours, je l’aidais à ranger les tissus, à coudre les ourlets, les fermetures et boutons. Je grimpais ensuite dans la mezzanine pour regarder le défilé́ des beautés de l’époque : les épouses des gouverneurs Sicurani et Angeli dont elle était la styliste officielle, Tarita Brando, Maea Flohr, Marie Moua, Maire Martin... Ces femmes avaient un sens inné pour la mode : elles portaient des robes stylées, avec des sacs joliment assortis, des chaussures à talons fins, les cheveux en chignons ou soigneusement lâchés, une couronne sur la tête, une fleur à l’oreille. L’élégance ‘effortless’ me fascinait déjà̀
."

Tahiti Infos: Vous avez créé la marque Miss Tahiti et le comité, comment cela s’est-il passé ?
Dominique Pétras : "De 1979 à 1993 j’ai apporté ma collaboration au Syndicat d’initiative de Piu Bambridge en tant que chorégraphe. En 1994 je lui ai proposé de racheter l’événement, car je ressentais le besoin d’y apporter ma touche personnelle. J’ai déposé la marque Miss Tahiti, et créé le Comité Miss Tahiti Nui."

Tahiti Infos : Vous travailliez avec une équipe, qui était-elle et qu’avez-vous apporté ?
Dominique Pétras : "J’étais entourée d’une équipe exceptionnelle : Yolande Dexter, Louise Ellacott, Manutea, Teiki et Lorenzo, Nel’s, Orama Noble, Nicole Chung. Leur collaboration, leur dévotion et leur amitié m’ont été précieuses tout au long de cette belle aventure pour défendre les valeurs auxquelles je tenais. Ensemble, nous avons créé le fameux passage en robes végétales. Les trophées « made in China » ont laissé la place à des sculptures réalisées par des artisans polynésiens. Le tissu synthétique des maillots de bain a été remplacé par du pareu pour le fameux passage ’Vahine Hinano’. Les écharpes auparavant cousues dans du satin ont été réalisées avec du tapa, du kere ha’ari et de la nacre. Du mieux que nous avons pu, nous avons donné la priorité aux artistes du fenua. En 2002 j’ai revendu le concours."

Tahiti Infos : Quels sont les moments plus forts de cette aventure ?
Dominique Pétras : "L’élection de Mareva Galanter, Miss France 1999, et notre déplacement à Nancy avec Mareva Georges pour sa consécration. La remontée des Champs Elysées escortés par les motards de la police nationale pour arriver au studio de Canal Plus à temps…
Je repense aussi au voyage en Afrique du Sud pour l’élection de Miss Monde en 1994 à laquelle participait Vaea Olanda. À mon arrivée à Johannesburg, j’ai fait huit heures de voiture dans la nuit, avec le journaliste Christian Durocher pour rejoindre Sun City où se déroulait le concours. À chaque feu on craignait de se retrouver avec un fusil sur la tempe… L’époque était encore, disons, ‘délicate’… C’était surréaliste pour la fille des îles que j’étais…
Vaea Olanda et Timeri Baudry ont été les premières polynésiennes à rencontrer le président Nelson Mandela. Les décors, les costumes, les chorégraphies, les structures…Ce concours m’a beaucoup marquée par son organisation spectaculaire. C’était une sacrée leçon de rigueur, de discipline…. et d’humilité.
"

Tahiti Infos : Quels sont tes plus beaux souvenirs ?
Dominique Pétras : "Je n’ai que ça des beaux souvenirs : il y a eu beaucoup de rires, de fous rires, de larmes de joie, de rencontres incroyables, de moments inoubliables. Les retrouvailles avec l’équipe, les réunions artistiques, les coulisses, les créations des thèmes, les échanges avec les artistes locaux…Les très rares moments difficiles étaient convertis en positif, cette élection nous a fait grandir. "

Tahiti Infos : As-tu eu des difficultés particulières ?
Dominique Pétras : "Lorsqu’on se lance dans cette aventure il ne faut pas s’attendre à ce que ce soit un long fleuve tranquille. J’ai pour principe de ne garder que le positif de mes expériences, la vie est bien trop courte pour s’encombrer de mauvais souvenirs. Et nos ‘difficultés’ sont tellement ridicules à côté des réels problèmes que rencontrent les gens dans leur quotidien."

Tahiti Infos : Depuis, les choses ont changé …
Dominique Pétras : "Les réseaux sociaux ont bouleversé les mentalités, c’est indéniable. Aujourd’hui, les candidates ont intérêt à avoir un fort caractère pour ne pas craquer. Elles doivent être très soutenues et encadrées car les critiques sont constantes, d’une violence et d’une sournoiserie extrêmes. Mais elles en sortent forcément armées… et prêtes à affronter les épreuves encore plus impitoyables de Miss France, Miss Monde ou Miss Univers.
C’est une sacrée école de la vie. On ne peut éviter l’évolution des mentalités, de la mode et ... du monde. La Polynésie, c’est la joie de vivre, les chants, les couleurs, les danses, les belles chevelures, la beauté naturelle. Comment faire valoir nos atouts dans les concours internationaux ? A l’ère d’Instagram, Facebook ou Tik Tok, le réel challenge est de garder son identité.
"

Tahiti Infos : Voilà plus de 20 ans vous suivez une autre route, pourquoi ?
Dominique Pétras : "Mon mari m’a proposé un jour qu’on s’installe à Bora pour y créer un ranch. Je suis immédiatement tombée amoureuse de cette île. Miss Tahiti est un concours qui demande une implication importante. J’ai donc pris la décision de vendre l’événement car je savais qu’il deviendrait compliqué d’organiser l’élection à distance."

Tahiti Infos : Quelle relation gardez-vous avec Miss Tahiti ?
Dominique Pétras : "J’ai continué indirectement l’aventure en coachant Mihimana Sachet, Hinarere Taputu, Vaea Ferrand et Vaimalama Chaves mais aujourd’hui j’ai décidé de refermer le livre de Miss Tahiti tout en gardant des souvenirs émouvants pour cet événement qui a tellement marqué ma vie.
J’ai de l’admiration, un immense respect et beaucoup d’amitié pour Leiana, Rava et Vaeana. De nos jours faire de l’événementiel demande tellement d’investissement tant financier qu’émotionnel.
"

Tatie Yo et Dominique Petras, la joie de vivre.
Tatie Yo et Dominique Petras, la joie de vivre.

Rédigé par Delphine Barrais le Mardi 4 Mai 2021 à 08:48 | Lu 6903 fois