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Reprise en main du processus constitutionnel à Fidji: les réactions fusent


Reprise en main du processus constitutionnel à Fidji: les réactions fusent
SUVA, mardi 15 janvier 2013 (Flash d’Océanie) – La reprise en main du processus d’élaboration de la Constitution fidjienne, annoncée jeudi 10 janvier 2013 par le Président Ratu Epeli Nailatikau et le Contre-amiral Premier ministre Franck Bainimarama, continue de susciter des réactions, à la fois aux plans local et international.
Après une première réaction en fin de semaine dernière de la part du ministre des affaires étrangères néo-zélandais, Murray McCully, qui exprimait sa déception et évoquait un substantiel « pas en arrière » tout en voulant continuer à travailler avec les autorités locales au retour vers la démocratie toujours annoncée pour le dernier trimestre 2014, c’est au tour du chef de la diplomatie australienne, Bob Carr, de s’exprimer sur la question.
En début de semaine, il a ainsi réitéré l’importance de la protection de la liberté d’expression, d’association et de la presse, tout en soulignant la volonté de Canberra de continuer malgré tout à accompagner le processus fidjien.
« L’Australie demeure engagée pour soutenir Fidji dans son processus de retour à la démocratie et nous suivrons de près la question », a sobrement déclaré M. Carr à la presse de son pays.
Cette posture tranche avec celle adoptée par Canberra et Wellington au cours des six dernières années, qui ont suivi le putsch du 5 décembre 2006, ayant précédé l’arrivée au pouvoir du Contre-amiral Bainimarama.

En annonçant cette reprise en main, qui prendra la forme d’amendement confiés au services juridiques du gouvernement fidjien au cours des semaines à venir, le Président et le Premier ministre fidjiens ont aussi mis en doute la pertinence du premier projet, fruit du travail d’une Commission Constitutionnelle présidée par l’universitaire kenyan Yash Ghai.
Ils reprochent à ce premier texte de recommander la création d’une nouvelle assemblée délibérante qui serait composée de personnalités non-élues.
Une fois les modifications effectuées, courant mars 2013, le projet « amendé » devrait être soumis à une Assemblée Constituante, dont la composition n’a toujours pas été annoncée.

M. Carr avait rencontré en Australie, en fin de semaine dernière son homologue fidjien, Ratu Inoke Kubuabola, dans le cadre d’entretiens désormais réguliers et censés, depuis juillet 2012, réchauffer les relations entre Suva et Canberra.
Ces réunions « tripartites » impliquent aussi la Nouvelle-Zélande au même niveau ministériel.

Mais en Australie, le mouvement syndical et l’une de ses principales confédérations, l’ACTU (Australian Council of Trade Unions), proche des travaillistes au pouvoir, semblait ne pas goûter la modération du chef de la diplomatie australienne.
Sa Présidente, Ged Kearney, s’est déclarée mardi « surprise » et « déçue » par cette posture tiède, face à ce qu’elle décrit comme un régime « dont il est clair qu’il n’a aucune intention de rétablir la démocratie et les droits humains à Fidji ».
Elle a appelé le gouvernement australien à « revoir sa position » concernant son récent réengagement avec l’archipel océanien.

Lors de son récent passage en Australie, en fin de semaine dernière, Ratu Inoke Kubuabola avait aussi rencontré son homologue papou, Rimbink Pato, qui se trouvait lui aussi en visite en Australie, à Sydney.
Le ministre papou s’est ensuite déclaré satisfait des récentes évolutions de la situation.

Toujours au plan international, mardi, c’est le Secrétaire Général du Commonwealth, Kamalesh Sharma, qui s’est fendu d’un communiqué consacré à Fidji.
Il y exprime notamment son « regret » au vu de la décision de Fidji de « rejeter l’ébauche de Constitution préparé par la Commission Constitutionnelle présidée par le professeur Yash Ghai ».
Mettant en avant les « valeurs et principes du Commonwealth », M. Sharma a poursuivi en soulignant, en matière de démocratie, « le droit inaliénable des individus de participer, au moyen de processus libres et démocratiques, à l’élaboration de la société dans laquelle ils vivent ».
Ces principes « engagent aussi les gouvernements du Commonwealth vis-à-vis des principes fondamentaux de non-exclusion et de légitimité », poursuit-il.
« Pour être légitime t durable pour les générations à venir, la Constitution de Fidji doit provenir de la réflexion et de la participation par le peuple et pour le peuple de Fidji. La décision de la part du gouvernement fidjien de mettre de côté le texte préparé à grands efforts par la Commission, au terme de larges consultations, est regrettable », ajoute-t-il.

Au plan intérieur, plusieurs partis, organisations non gouvernementales et syndicales, ont aussi vivement réagi depuis le 10 janvier 2013.
Pour la plupart d’entre elles, la condamnation est un leitmotiv, tout comme ce qui est décrit comme un non-respect du travail initial, sous forme de texte provisoire, remis au Président fidjien quelques jours seulement avant cette annonce.


Le Contre-amiral Bainimarama
Le Contre-amiral Bainimarama
Assurances réitérées

Selon le gouvernement fidjien, environ trois cent personnes ont formulé leur candidature afin de faire partie de cette assemblée constituante censée examiner le projet final de Constitution, tel qu’amendé par les services du gouvernement.
Au cours de la même intervention, la semaine dernière, le Contre-amiral fidjien avait annoncé la publication cette semaine d’un décret relatif aux conditions d’enregistrement des partis politiques.
Il avait aussi annoncé la publication d’un appel d’offres, y compris à l’international, concernant la fourniture de matériel électoral (urnes, kits électoraux, encre indélébile, isoloirs).
Les travaux de cette assemblée sont toujours annoncés pour débuter en février 2013.
« Le gouvernement Bainimarama est déterminé non seulement à respecter les échéances électorales de septembre 2014, mais également à conduire ce scrutin selon les plus hauts critères internationaux », a assuré l’Attorney General et ministre en charge des élections, Aiyaz Sayed-Khaiyum, dans un communiqué lundi.

Nouvelles conditions d’enregistrement pour les partis politiques

Mardi, en fin de journée (GMT+13), la presse locale levait un coin du voile concernant les nouvelles conditions d’enregistrement pour les partis politiques.
Ces nouvelles dispositions, prises par décret, concernent notamment un réenregistrement obligatoire pour tout parti politique existant et conformément aux nouvelles conditions.
Ce décret interdit aussi à tout dirigeant syndical ou à tout fonctionnaire en exercice de briguer un mandat électif.

Ce processus d’enregistrement, moyennant la somme de cinq mille dollars fidjiens (2.100 euros), débute vendredi 18 janvier 2013 et devrait durer 28 jours, a expliqué mardi l’Attorney General Aiyaz Sayed-Khaiyum à la radio nationale.
Passée cette date, tout parti n’ayant pas satisfait aux nouveaux critères sera dissout.

Ce dernier a aussi précisé qu’actuellement, 16 partis politiques étaient dûment enregistrés.
Selon les nouvelles conditions, tout parti doit désormais se choisir un nom en langue anglais (et non plus en langue hindoustani ou fidjienne).
Pour pouvoir être reconnu, désormais, toute formation politique doit pouvoir prouver qu’elle possède au moins cinq mille adhérents (contre 180 selon les anciennes règles), rapporte mardi la radio nationale privée Legend FM.
Une autre partie du décret est consacrée aux modalités de financement des partis politiques : selon le texte, les revenus de tout parti ne devront provenir que des cotisations de ses membres, de contributions volontaires, mais en aucun cas d’une société privée, d’un gouvernement étranger, d’une organisation non-gouvernementale ou d’une agence régionale ou internationale.
Les particuliers peuvent faire un don à un parti politique, sans toutefois excéder la somme annuelle de dix mille dollars (4.200 euros).
Les partis devront désormais tenir une comptabilité stricte et transparente.

pad

Rédigé par PAD le Mardi 15 Janvier 2013 à 05:42 | Lu 352 fois