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Recours déposés contre la réforme RNS


Tahiti, le 29 octobre 2025 - Comme annoncé et validé en assemblée générale du 26 septembre dernier, la CPME a déposé son recours devant le Conseil d'État le 8 octobre contre la loi du Pays réformant les conditions d'affiliation au régime des non-salariés (RNS). Le Medef ne s'est pas joint à cette action, certains de ses amendements ayant été pris en compte par le gouvernement. Mais un entrepreneur salarié et patenté, Jonathan Crawford, a lui aussi saisi la plus haute juridiction administrative à titre personnel.  
 

Adoptée aux forceps après des heures de débat à l'assemblée le 1er septembre dernier, la loi du Pays du ministre de la Santé, Cédric Mercadal, fait l'objet de deux recours devant le Conseil d'État. Pas par les élus de la minorité mais par la société civile. L'un déposé le 8 octobre dernier par la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) pilotée par Christophe Plée, et le second par un particulier, Jonathan Crawford, la veille. Cet entrepreneur patenté s'était notamment longuement exprimé sur les réseaux pour dénoncer un texte concocté par des dirigeants qui se prennent pour des “Robin des bois” sans connaître la réalité du terrain. Le Medef, de son côté, n'a pas souhaité saisir la justice, Steeve Hamblin estimant avoir “limité la casse” en ayant réussi à intégrer plusieurs amendements au projet de loi de Cédric Mercadal.
 
Mais Christophe Plée n'a jamais caché sa farouche opposition à cette réforme synonyme d'impôt sur le revenu. Ce dont s'est toujours défendu le gouvernement, l'argument développé par Cédric Mercadal étant toujours le même : “remettre les gens dans les bonnes cases” au titre de l'équité sociale, oubliant toutefois de préciser que l'objectif final de la réforme de notre protection sociale généralisée (PSG) tend à l'unification des régimes. 
 
Un texte “irresponsable”, “démagogique” et “électoraliste”
 
Ses détracteurs martèlent quant à eux que non seulement cette réforme ne propose pas de droits nouveaux à ceux qui devront cotiser à deux régimes, mais qu'elle créée au contraire des inégalités face à la maladie, sans traiter le volet retraite. Christophe Plée prenait un exemple concret : “Un salarié qui touche 150 000 francs de retraite devra payer à hauteur de 4,92 % sa cotisation maladie, alors qu'un patenté qui a 150 000 francs de revenus pour sa retraite, cotisera à hauteur de 9,84 %”, expliquait-il à ses adhérents, s'étonnant de la différence de traitement entre “ces deux ressortissants pour une protection égale”. Jonathan Crawford, de son côté, a décidé lui aussi de déposer une requête pour demander au Conseil d'État d'annuler cette loi du Pays. Salarié et patenté, ce jeune entrepreneur se fait le porte-voix de ceux qui, comme lui, sont directement impactés par les nouvelles obligations d'affiliation et de cotisations de cette loi du Pays. “On cotise déjà à la CST (contribution de solidarité territoriale, NDLR) sur les deux régimes”, rappelle-t-il, jugeant ce texte “irresponsable”, “démagogique” et “électoraliste”.
 
D'abord parce que le Pays dispose d'une belle trésorerie de 38 milliards de francs qu'il ferait mieux de mettre à profit pour agir sur le coût du travail et les dépenses de santé plutôt que de venir taxer “ceux qui font tourner l'économie”. Ensuite, parce que sous prétexte de “solidarité”, le gouvernement ne fait qu'encourager l'assistanat au lieu de traiter le mal à la racine en menant une véritable politique publique de l'emploi ou et de la santé.
 
Une loi “entachée de vices de procédure”
 
“Quand tu vois qu'on arrive à atteindre les 70 % de personnes qui sont en surpoids, ce n'est pas en taxant davantage qu'on va enrayer le fléau”, explique-t-il, avant d'ajouter : “Dernièrement, je voulais recruter deux femmes de ménage. Je ne vais pas exagérer, 17 sont passées. Elles ont fait deux jours et ont arrêté. Elles m'ont dit qu'au lieu de gagner 150 000 francs par mois, elles préféraient gagner 90 000 à rester à la maison.”
 
Sur un plan plus juridique, sa requête soutient que cette loi votée le 1er septembre dernier est “entachée d'atteintes aux droits fondamentaux” et de “multiples ruptures d'égalité”. Mais aussi de “vices substantiels de procédure”, notamment concernant le droit à l'information des élus de l'assemblée et du Cesec qui n'a pas été respecté (absence d'étude d'impact, pas de vision consolidée des comptes de la PSG, incertitude budgétaire pour le Pays qui ne peut pas garantir l'équilibre financier de la PSG). Le Conseil d'État a normalement trois mois pour statuer.

Rédigé par Stéphanie Delorme le Mercredi 29 Octobre 2025 à 15:43 | Lu 4414 fois