Tahiti Infos

Reconverti dans le bâtiment, il soutire 90 millions Fcfp à deux clients et leur laisse des constructions inachevées sur les bras


"Mon client à 73 ans, il est malade, il ne s'en remet pas, cet homme à la mauvaise foi sans limite ne se rend pas compte des dégâts qu'il a causé dans ces familles" dénonce l'avocat d'une des victimes.
"Mon client à 73 ans, il est malade, il ne s'en remet pas, cet homme à la mauvaise foi sans limite ne se rend pas compte des dégâts qu'il a causé dans ces familles" dénonce l'avocat d'une des victimes.
PAPEETE, le 8 décembre 2015 - Le parquet a requis 2 ans de prison avec sursis pour abus de confiance, ce mardi au tribunal correctionnel, contre un retraité qui s'était inventé une seconde carrière d'entrepreneur en bâtiment. Pour le plus grand malheur de ses victimes, qui lui avaient confié toutes leurs économies. Le jugement sera rendu le 22 décembre.


Les faits commencent à dater, mais quatre ans après, les victimes en paient encore le prix fort. "Mes clients ont honte, ils sont désemparés, ils y ont laissé toutes leurs économies" explique Me Robin Quinquis au tribunal. 30 millions de Fcfp très exactement. Une somme que ce couple avait intégralement versée au prévenu, 57 ans, afin qu'il réalise la maison dont ils rêvaient pour leurs vieux jours sur leur terrain de Papara. Il ne leur reste aujourd'hui en lieu et place qu'une terre à l'abandon jonchée de gravas.

L'ardoise est encore plus salée pour la deuxième victime de cet homme qui n'y connaissait en réalité rien du tout au bâtiment et qui sortait par ailleurs de dix ans de faillite personnelle, preuve de sa capacité de gérer et d'entreprendre. On parle cette fois de 60 millions de Fcfp. Le projet était plus ambitieux : la construction d'un immeuble d'habitation dont la victime espérait retirer des revenus locatifs pour ses vieux jours.

Là encore, après quelques mois, les travaux ont été abandonnés et le chantier laissé en friche. Le prévenu n'a jamais payé ses sous-traitants qui ont fini par laisser tomber, tout juste avait-il acheté pour quelques millions de francs de matériaux. Il n'a pas non plus commencé à rembourser le moindre centime à ceux qu'il a floué. "Mon client à 73 ans, il est malade, il ne s'en remet pas, cet homme à la mauvaise foi sans limite ne se rend pas compte des dégâts qu'il a causé dans ces familles", a pour sa part insisté Me Bourion, avocat de la seconde victime.

L'escroc finance les études de ses enfants à l'étranger avec l'argent

Mais où est donc passé le reste de la manne ? Le président du tribunal donne la réponse : "En partie pour son usage familial, et notamment l'entretien et le financement des études de ses enfants à l'étranger. Qui ont bien réussi d'ailleurs… Vous avez aussi acheté quatre voitures sur cette période, dont une à plus de 9 millions de francs. Et vous avez également acquis un stock de boissons énergisantes d'une valeur de 11 millions de Fcfp pour le compte d'une de vos sociétés commerciales en nom propre". On est bien loin des projets de construction initiaux.

L'affaire avait été mise à jour grâce à un signalement du service Tracfin de lutte contre le blanchiment d'argent. Le service avait été alerté par les importants mouvements de fonds entre les comptes bancaires des victimes et celui, personnel, du prévenu. Car ce dernier n'avait, en outre, pas jugé utile de créer de compte pour sa "société" de construction. Pas plus qu'il ne tenait de comptabilité. Le quinquagénaire a tenté à l'audience de répondre aux interrogations des juges sans que personne ne comprenne vraiment quoi que ce soit à ses explications embrouillées. Les experts pendant l'enquête avaient été bien plus clairs en revanche, "scandalisés par ces pratiques commerciales entretenant la confusion et des contrats malhonnêtes".

Les victimes avaient fait confiance à cet homme rencontré à l'église, de confession mormone comme elles. Le tribunal a mis sa décision en délibéré au 22 décembre.


Rédigé par Raphaël Pierre le Mardi 8 Décembre 2015 à 16:46 | Lu 4895 fois