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Prudence tous azimuts pour le budget 2023


Tahiti, le 19 octobre 2022 - Alors que le budget du Pays doit être adopté à la fin de l’année, les représentants à l’assemblée ont reçu le rapport présentant les orientations budgétaires du gouvernement. Des grandes lignes dessinées dans un contexte mondial imposant à la collectivité de rester "prudente et vertueuse dans la gestion de ses finances publiques" en conjuguant des faibles perspectives de croissance avec la nécessité de réduire la dette.

De la pandémie de Covid-19, "période éprouvante", aux problèmes d’approvisionnement et au conflit en Ukraine, à l’origine d’une "résurgence d’un cycle inflationniste", le rapport d’orientations budgétaires (ROB), adressé aux représentants à Tarahoi le 14 octobre dernier, ne manque pas de rappeler que la Polynésie française est en souffrance. Dans ce contexte, réussir à mettre en adéquation les actions du Pays avec ses finances relève d’un numéro d’équilibriste par grand vent. Pour le gouvernement, le contexte oblige la Polynésie à "rester prudente et vertueuse dans la gestion de ses finances publiques afin d’une part de conserver une marge de manœuvre pour répondre à de potentielles situations exceptionnelles, mais aussi pour poursuivre les réformes et les investissements nécessaires pour se projeter dans l’avenir". Une prudence qui transpire du ROB avec, dans le domaine économique, une visibilité minimale.
 
Prudence et désendettement
 
Le gouvernement cherche donc à préparer demain, tout en continuant à craindre le pire. Une position qui explique les hypothèses de travail retenues pour la préparation du budget. Si le budget du gouvernement central, en cours de discussion à l’Assemblée nationale, a été construit sur la base d’une croissance de +1% en 2023, "l’évolution de la croissance polynésienne la plus réaliste serait une croissance réelle comprise entre 0,5% et 1%". Un optimisme qui peut apparaitre faible, alors que la communication gouvernementale s’articule depuis plusieurs semaines autour de voyants économiques revenus au vert et des niveaux d’avant-crise dépassés. Cette prudence se retrouve dans l’évolution prévue des recettes fiscales directes (-10%). Les hausses de la masse salariale et des coûts d’achat des marchandises réduisent notamment l’assiette imposable. Des recettes moindres qui obligeront l’administration polynésienne à se serrer la ceinture. Ainsi, les dépenses de personnel "seront contenues à un niveau moindre que celui de 2022 par la modération des créations de postes et des recrutements temporaires".
 
Un serrage de ceinture qui concerne également les investissements compte tenu du niveau d’endettement déjà élevé du Pays et qu’il faut ainsi "contenir". Pour ce faire, le gouvernement affiche sa "volonté d’amorcer le désendettement de la Polynésie française dès 2023" avec un recours à l’emprunt limité. En 2023, seulement 9 milliards seront empruntés alors que le Pays a inscrit au budget 2022 plus de 62 milliards de Fcfp. Il est également prévu que "les nouvelles opérations prioritaires seront axées sur celles financées par des partenariats financiers permettant un effet levier plus conséquent en termes de retombées économiques". En un mot, investir mieux avec l’argent des autres.
 
Économie et emploi, le flou
 
Sur cette base, trois orientations stratégiques ont été définies : à savoir protéger l’économie et l’emploi, asseoir sa résilience et préserver la cohésion sociale. S’agissant du premier axe, le document communiqué aux élus de l’APF abonde de considérations générales et de peu d’annonces précises sur les actions en faveur des entrepreneurs. Ainsi, le gouvernement veut "rénover le cadre juridique existant pour simplifier la vie des entreprises à toutes leurs phases de développement" dans l’idée "d'inscrire le corpus réglementaire qui nous régit en matière économique dans son siècle". Quant aux aides et subventions, il est sobrement indiqué que "les modalités d’intervention publique en faveur de l’économie doivent être interrogées". L’examen de leur efficacité et de leurs impacts conduira le Pays "à proposer des dispositifs alternatifs ainsi qu’une harmonisation des outils et méthodes". Côté commande publique, rien que du classique. Bétonnage des routes, sécurisation des rivières, amélioration des infrastructures portuaires et aéroportuaires, principalement avec le financement de l’Etat, sont au programme. Coté grands travaux, la ferme aquacole de Hao, non mentionnée, apparait donc définitivement aux oubliettes. Quant au Village Tahitien, le projet connaitra en 2023, selon le document, "de réelles avancées".
 
Au niveau des actions en matière d’emploi, le cadre n’est pas plus explicite. Une réforme des mesures d’aide est annoncée, destinée à "favoriser la montée en compétence et l’employabilité des bénéficiaires". La formation professionnelle occupera, quant à elle, "une place stratégique dans le plan d’actions 2023". Enfin, probablement plus contestée, la poursuite de la modernisation du code du travail doit permettre de "développer un droit du travail moderne, équilibré et pleinement adapté aux besoins de la société polynésienne". Une notion d’équilibre qu’il faudra mettre en application lors des futures discussions avec les syndicats et le patronat sur le sujet alors que cette réforme des lois du travail était déjà annoncé par le président Fritch lors du débat d’orientations budgétaires en octobre 2018. Enfin, après avoir consacré près de 10 milliards de Fcfp sur la seule année 2022 pour le maintien des prix des hydrocarbures jusqu’au 31 décembre prochain, la transition énergétique est annoncée comme "une nécessité absolue" pour réduire "notre dépendance aux carburants fossiles". Dont acte.

 
 

Rédigé par Sébastien Petit le Mercredi 19 Octobre 2022 à 19:06 | Lu 1507 fois