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Prison ferme pour les importateurs d’ice


PAPEETE, le 18 janvier 2018 - Trois individus étaient jugés ce jeudi en comparution immédiate pour des infractions à la loi sur les stupéfiants. Deux d’entre eux étaient poursuivis pour s’être fait livrer de l’ice commandé sur le darknet à cinq reprises. Il était reproché au troisième homme d’avoir servi de chauffeur lors de la réception de l’un des colis.

L’affaire d’importation d’ice jugée ce jeudi en comparution immédiate a été l’occasion de faire une passionnante et inquiétante incursion dans le monde du darknet.

Le 11 janvier dernier, les douaniers interpellent un homme de 30 ans qui vient récupérer un colis contenant 28 grammes d’ice. La drogue, en provenance du Canada, est cachée dans une enveloppe qui se trouve dans un magazine dont les pages ont été collées. Deux autres individus sont rapidement interpellés dans un véhicule qui se trouve non loin du lieu de l’arrestation. Le premier a servi de chauffeur, le second a pour rôle d’écouler la drogue à des grossistes. Car l’enquête laisse vite apparaître que c’est le cinquième sachet que les trafiquants se sont fait livrer depuis le 1er janvier 2017 pour une quantité totale de 63 grammes.

Darknet et bitcoins

Lors de l’audience, deux des trois individus ont comparu détenus. Interrogé par le président du tribunal sur les démarches à suivre pour commander de la drogue sur le darknet, le prévenu interpellé à la réception du colis s’est livré à une explication très claire : « l’un de mes amis commandait des stéroïdes sur le darknet, il a essayé de m’expliquer mais je ne comprenais pas. Alors, j’ai regardé un tuto sur YouTube pour savoir comment installer le logiciel de cryptologie. » Ce à quoi le magistrat a ajouté : « sur le principe, le Darknet est un peu comme Amazon mais l’on y commande des kalachnikovs et des stupéfiants ! » Le prévenu utilisait le compte de son ami pour payer l’ice en bitcoins.

Questionné sur la revente de l’ice, le prévenu qui était en charge de cette partie du trafic a indiqué que les consommateurs, au regard des récentes et multiples arrestations, se montraient frileux. Il avait cependant déclaré aux gendarmes qu’il revendait le gramme à hauteur de 110 000 francs. La drogue venait du Canada et l’expéditeur remboursait la moitié des quantités si celles-ci étaient interceptées par les douanes.

Analysant rétrospectivement ses actes, l’instigateur du réseau, dont le casier comporte trois condamnations pour conduite en état d’ébriété s’est montré sincère à la barre : « j’ai pu réfléchir ces derniers jours à mon enfant qui naîtra dans quelques mois (…) Nuutania, c’est juste une horreur que je ne souhaite à personne (…) je regrette profondément. »

Quant au troisième homme, considéré comme le chauffeur, il avait accepté de conduire les deux prévenus sans savoir quel était le dessein de l’expédition. Il souhaitait juste récupérer l’argent que lui devait le revendeur.

Lors de ses réquisitions, le procureur de la République a évoqué la singularité du dossier en matière de stupéfiants : « tout passe par le darknet avec une technicité effrayante (…) Je me dois de rappeler que l’ice est une véritable calamité et que le message donné par la justice doit être constant et empreint d’une extrême sévérité. » A l’encontre du « chauffeur », le représentant du ministère public a requis un an d’emprisonnement avec sursis. Puis 4 ans de prison dont deux avec sursis pour l’instigateur. Enfin, le procureur de la République a demandé une peine de trois ans de prison dont 2 avec sursis contre le revendeur.

Le chauffeur a finalement écopé d’un an de prison avec sursis. L’instigateur a été condamné à 4 ans de prison dont 2 ans avec sursis mise à l’épreuve. Le revendeur devrait passer 18 mois en prison suivis d’une mise à l’épreuve de 24 mois. Les deux derniers prévenus seront solidairement contraints de payer une amende douanière de 7 millions de francs.

Rédigé par Garance Colbert le Jeudi 18 Janvier 2018 à 19:12 | Lu 3716 fois