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Nouveau week-end de violences à Mayotte, envoi d'une unité du Raid


Crédit Gregoire MEROT / AFP
Crédit Gregoire MEROT / AFP
Mamoudzou, France | AFP | lundi 21/11/2022 - Les tensions entre jeunes de quartiers rivaux causées par le meurtre d'un jeune homme la semaine dernière ont persisté lundi à Mayotte, après un week-end de violences marqué par des attaques à la machette, des barrages et des incendies.

En soirée, les forces de l'ordre ont signalé de l'agitation au nord de l'agglomération de Mamoudzou, entre Kawéni et Majikavo, alors que des bandes des deux villages étaient déterminées à en découdre. Les élèves du secteur ont d'abord été confinés dans les collèges et lycées avant de rentrer à pied, faute de bus.

Le ramassage scolaire, arrêté depuis mercredi dernier dans l'île, devrait reprendre mardi mais ne desservira aucun des deux villages, a-t-on appris à l'issue d'une réunion entre le département et le syndicat des conducteurs de bus.

Le chef-lieu de Mayotte est secoué depuis une dizaine de jours par des conflits inter-quartiers qui ont fait un mort le 12 novembre, un jeune de 20 ans tué à la machette, et plusieurs blessés.

Le quartier de Kawéni, d'où était originaire la victime, s'est embrasé mercredi et jeudi derniers après l'attaque d'un bus scolaire. Samedi, 200 à 250 jeunes issus de ce quartier se sont réunis pour en découdre avec ceux du quartier de Doujani, plus au sud, selon la police.

Dimanche, un automobiliste a été poignardé à Mtsapéré Bonovo, un autre quartier de Mamoudzou, selon une source policière. "Son pronostic vital est engagé", a précisé une autre source policière.

"Traumatisé"

Les affrontements ont donné lieu à des "jets de projectiles" sur les forces de l'ordre, des "dégradations de véhicules et de commerces", des "coupures de tuyaux d'alimentation d'eau" et l'incendie d'une casse automobile, selon la première source.

"Des habitants se sont armés de barres de fer et machettes pour se défendre contre les bandes", a-t-elle ajouté.

Des barricades ont été dressées, selon l'autre source policière.

Il n'y a eu aucune interpellation.

À Mtaspéré Mro Handra, où les jeunes de Kawéni ont voulu tendre un piège à leurs rivaux de Doujani, Mustapha, 50 ans, ne veut pas croire ce qui s'est passé la veille.

"Je n'ai pas encore dormi, je suis traumatisé. Je n'ai jamais vu autant de violence et pourtant, je me suis déjà fait agresser tellement de fois", se désole-t-il, découvrant son dos pour laisser apparaître de nombreuses traces de coups de machette.

Les jeunes venus en découdre "étaient des dizaines, peut-être des centaines, avec des machettes", décrit-il.

"Ils ont mis le feu au garage, il y avait tout qui brûlait de partout, on étouffait, on ne voyait plus rien, on voyait juste que ça courait dans tous les sens, ça criait et puis les policiers qui tiraient leurs grenades", raconte-t-il encore.

Autour de lui, voitures calcinées, pierres et cartouches de gaz lacrymogène par centaines jonchent le sol, témoignant de la violence de la scène.

"Guerre civile"

"La différence avec d'habitude, c'est que les violences n'étaient pas à un endroit fixe, ce week-end, Mamoudzou brûlait de partout", raconte Abdel Aziz Sakhi, secrétaire zonal du syndicat Alternative police, qui était sur le terrain ce week-end.

Ainsi à Cavani, un bourg du sud de Mamoudzou.

"Les jeunes étaient une centaine à nous faire face, à frotter leurs machettes sur le sol pour montrer qu'ils voulaient en découdre avec nous. Ils ont attaqué, on a dû se replier... Ensuite, on n'a pas eu d'autre choix que de forcer le barrage, de foncer avec nos véhicules pour les disperser", livre le policier "complètement crevé".

"Entre eux, il y a sûrement des blessés, voire des morts mais on ne peut pas le savoir, ils ne viennent pas nous voir pour nous le signaler", dit-il.

"C'est ingérable, ce n'est plus possible de subir comme ça. On n'est plus dans des violences urbaines mais dans de la guérilla", poursuit le syndicaliste, qui réclame le déploiement permanent d'une compagnie de CRS sur le territoire. 

Une "dizaine de policiers" du Raid, l'unité d'intervention d'élite de la police, va être déployé d'ici à mardi à Mayotte, selon le ministère de l'Intérieur.

Le député Mansour Kamardine a déploré que l'archipel de l'océan Indien "bascule dans la guerre civile" et demandé au gouvernement de "franchir un saut quantitatif et qualitatif en matière de lutte contre l’insécurité". 

le Lundi 21 Novembre 2022 à 13:15 | Lu 197 fois