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Moruroa et Fangataufa sous surveillance radiologique


Moruroa et Fangataufa sous surveillance radiologique
PAPEETE, vendredi 15 mars 2013 – Le patrouilleur Revi a appareillé vers 13 h 30 pour sa mission interarmées annuelle de surveillance radiologique des sites français d’expérimentations nucléaires de Moruroa et Fagantaufa, à 1 250 kilomètres de Tahiti, dans le sud est de l’archipel des Tuamotu.

Les deux atolls sont classés Installations nucléaires intéressant la Défense (INID). Près d’un million d’euros (119 millions Fcfp) est consacré à cette mission de vigilance.

Au cours des cinq prochaines semaines, jusqu’au 25 avril sur ces deux sites de la Défense, la mission baptisée Turbo 2013 doit effectuer des prélèvements d’eaux de mer, d’eaux souterraines, de sédiments et de sols. Des échantillons biologiques tels que plancton, mollusques, poissons, eau de coco et coprah seront également recueillis. Près de deux tonnes d’échantillons devraient être prélevées. Tout ce matériel sera ensuite analysé par des laboratoires accrédités par le Comité français d'accréditation (Cofrac).

Les données ainsi recueillies seront enfin certifiées par l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) pour la mesure de la radioactivité, en vue de la publication d’un rapport de surveillance radiologique, courant 2015.

"La Défense a souvent été gênée aux entournures pour communiquer au sujet de ce qui est mis en œuvre en matière de surveillance", reconnait le Contre-amiral Anne Cullerre, commandant supérieur des forces armées en Polynésie française. "La raison de cette mission est de rassurer et d’informer en toute transparence au sujet de ce qu’il se passe en termes de rémanence radiologique sur ces deux sites classés INID"

500 kg de plutonium dans les sous-sols

Le rapport de l’AIEA, l’Agence internationale de l’énergie atomique, communiqué en 1998 sur l’état radiologique de Moruroa et Fangataufa avait conclu à "l’absence de nécessité d’une surveillance particulière" de ces sites, rappelle le Contre-amiral Anne Cullerre. En dépit de cet avis, "ce rapport a marqué l’année zéro des missions de surveillance annuelle", précise le ComSup.

Depuis, Turbo 2013 est la seizième mission du genre.

Lors de l'enquête AIEA de 1996, des prélèvements ont été effectués sur les fonds de lagon des deux atolls. Cela a permis de cartographier la présence de plutonium, notamment dans la zone proche des points zéro des essais nucléaires aériens, face aux blockhaus Denise, Dindon et Frégate.

Après avoir procédé à 46 tirs nucléaires aériens à partir de 1966, de 1975 au 27 janvier 1996 la France a effectué 147 essais souterrains à Moruroa et Fangataufa. Les explosions ont été réalisées dans le socle basaltique de ces deux atolls, au pied de forages profonds de 600 à 900 mètres. Aussi, l’intégralité des résidus de plutonium produits par ces expérimentations est-elle encore concentrée au fond des 10 puits aménagés pour réaliser ces 147 explosions souterrainnes d'une puissance de 5 à 150 kilotonnes équivalent TNT.

Un réseau de surveillance géo-mécanique est installé sur ces atolls pour observer les effets possibles d’une modification de leur structure géologique profonde et, consécutivement aux puissantes explosions, à la formation de zones de fracture ayant pu altérer leur stabilité, voire leur étanchéité.

On estime que les sous-sols de Moruroa et de Fangataufa peuvent contenir une masse résiduelle d'environ 500 kg de plutonium 239. Cette masse de matière nucléaire extrêmement radiotoxicique - environ 250 000 fois plus nocive par gramme que l'uranium 238 - ne sera pas dissipée avant 240 000 ans.

Le Contre-amiral Anne Cullerre, commandant supérieur des forces armées en Polynésie française, le 15 mars à la présentation de la mission Turbo 2013.
Le Contre-amiral Anne Cullerre, commandant supérieur des forces armées en Polynésie française, le 15 mars à la présentation de la mission Turbo 2013.

Rédigé par Jean-Pierre Viatge le Vendredi 15 Mars 2013 à 15:47 | Lu 2517 fois