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Mieux comprendre les dessous des cartes marines


Mieux comprendre les dessous des cartes marines
PAPEETE, le 14 mars 2016 - Tous les navires utilisent des cartes marines pour se diriger. En Polynésie, elles sont particulièrement intéressantes pour entrer dans les passes parfois peu profondes avec de nombreux reliefs accidentés. Le Service hydrographique national, le SHOM, produit, entretient et diffuse les cartes marines officielles des espaces maritimes français. Une antenne est basée à Papeete. Rencontre avec Régis Coindet, chef de la base hydrographique de Polynésie française.

Depuis toujours, la carte marine trône au milieu des passerelles des navires. Sans le service hydrographique national (SHOM), ces cartes n'existeraient pas. Le SHOM est l’héritier du premier service hydrographique officiel au monde datant de 1720 ! 521 personnes travaillent au sein de cette institution, la plupart sont basées à Brest. Deux antennes existent en Outre-Mer : à Papeete et Nouméa.

Le SHOM édite des cartes marines, quelles sont vos missions au quotidien ?
Régis Coindet : "Pour vulgariser, nous faisons la même chose que l'Institut géographique nationale (carte terrestre) mais pour les cartes maritimes. Nous décrivons l'environnement physique, les fonds marins, le littoral, les traits de côte (ligne qui représente la limite entre la terre et la mer), etc. Cela permet de décrire les reliefs sous-marins mais aussi de mesurer et prévoir les différentes marées, les courants et également de diffuser l'information aux usagers de la mer et du littoral.

La convention internationale sur la sauvegarde de la vie humaine en mer (SOLAS) impose des règles pour assurer la sécurité de navigation. De notre côté, nous compilons toutes les informations nécessaires à cette sécurité en effectuant des relevés des fonds marins et en récupérant les données transmises par les autres organismes publics ou des entreprises privées ou des particuliers."


Comment procédez-vous pour relever les fonds ?
"La Marine nationale met à la disposition du SHOM des navires hydro-océanographiques, basés à Brest, équipés notamment de sondeurs acoustiques permettant de faire de la bathymétrie (mesure des profondeurs).A Papeete, nous effectuons les relevés avec une vedette dans laquelle nous emmenons les sondeurs.
Concrètement, nous prenons nos mesures à l’aide de sondeurs acoustiques qui vont calculer le temps aller-retour des ondes sonores qu’ils émettent. D’autres systèmes nous permettent aussi de calculer la vitesse du son dans l’eau afin de garantir la précision des mesures réalisées. Ces informations combinées nous permettent de déduire la profondeur des fonds marins. Par ailleurs ces informations sont complétées par des données GPS afin de positionner précisément ces sondes. Enfin, à l’aide de sonars remorqués et rasant le fond, nous pouvons faire de l’imagerie qui nous permettra de détecter les petits objets, naturels ou artificiels, pouvant constituer des dangers pour la navigation. Ces imageries permettent de distinguer clairement une épave de bateau ou un pinacle corallien isolé par exemple.
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Vos technologies permettent-elles d'aider à la préservation de l'environnement ?
"Grâce à nos calculs, nous étudions les courants, la salinité de l'eau, etc. Par exemple, quand un bateau pétrolier coule, nous pouvons prévoir la trajectoire de la nappe de pétrole."

Quelles sont les spécificités des fonds marins polynésiens ?
"Les eaux polynésiennes sont très profondes. Les enjeux de navigation se trouvent dans les atolls car loin des côtes il n'y a plus vraiment de danger du fait de la profondeur. S'il y a une nouvelle obstruction, la carte est mise à jour. Une de nos prochaines missions en Polynésie, sera de relever des fonds marins pour délimiter un chenal d'accès dans le lagon de Raiatea. Nous allons mesurer le fond et voir avec quel tirant d'eau les bateaux passent ou pas. Cette mission devrait durer trois semaines. Les fonds marins Polynésiens sont complexes, ils sont parsemés de nombreuses patates de corail délicates à cartographier et constituant de réels écueils pour la navigation.
Dans le Pacifique, nous mesurons en permanence le niveau de la mer avec des marégraphes qui servent également pour la prévention du risque tsunami). Grâce à ces capteurs, nous pouvons déceler et étudier la propagation d'un tsunami. En Polynésie, cinq capteurs appartenant à l'Université de Polynésie Française sont entretenus par le SHOM. Ils sont placés à Rangiroa, sur la presqu'ile de Tahiti, Makemo, Mangareva et Tubuai. Les américains en ont 2 aux Marquises et 1 à Papeete.
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Comment les frontières maritimes sont-elles délimitées ?
"Les cartes marines sont le support officiel des délimitations maritimes. Certaines limites sont reconnues, d’autres peuvent faire l’objet de revendications en cas de désaccord avec les états riverains. Récemment, l'institut Français de recherche pour l'exploitation de la mer (IFREMER) a mené un projet d’extension du plateau continental en Polynésie, visant à agrandir la zone économique exclusive (ZEE) polynésienne. De tels dossiers sont ensuite envoyés à l'ONU auprès d'une commission qui tranchera sur l’extension des frontières. L'étude d’un dossier peut prendre parfois dix ans. En somme, l'extension du plateau continental polynésien n'est pas pour tout de suite, le dossier est en cours, il faudra attendre Le verdict de l’ONU.
Le SHOM a la responsabilité d’entretenir la base de données officielle des limites maritimes des espaces français et de les porter sur les cartes marines.
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L'image d'Epinal du navigateur avec son compas est très ancrée. Aujourd'hui, utilisent-ils plus des cartes numériques ?
"En 2014, le portefeuille de cartes du SHOM comprend 900 cartes papier et 417 cartes numériques. Les versions numériques (ENC : Electronic Navigational Chart) obéissent à des règles strictes de l’OHI (Organisation Hydrographique Internationale). Les cartes aident les navigateurs à planifier leur trajet. En version numérique, elle prend en compte, par exemple, le tirant d'eau du bateau. Lors de la planification du trajet, si jamais ça ne passe pas, une alarme se déclenche. La norme Solas impose par exemple aux bateaux à grande vitesse de se munir d'une carte marine numérique car ils n'ont pas toujours le temps de reporter les données sur le papier avant un obstacle."

Les fonctions du SHOM

Le SHOM a pour mission de connaître et de décrire l’environnement physique marin dans ses relations avec l’atmosphère, avec les fonds marins et les zones littorales, d’en prévoir l’évolution et d’assurer la diffusion des informations correspondantes. (Code de la défense, Art. R3416-3)
La fonction socle du SHOM est de constituer des bases de données de référence (les cartes marines notamment). Il apporte aussi des soutiens à la défense et aux politiques publiques maritimes et du littoral.


Travailler au SHOM

Le SHOM emploi des militaires (ingénieurs, officiers mariniers) et surtout des civils (civils du ministère de la défense et contractuels).Cette institution possède une école qui forme des ingénieurs hydrographes (avec l'ENSTA Bretagne) et des techniciens hydrographes. Seule école francophone à dispenser des formations homologuées par l'International Hydrographic organization (OHI).

En savoir plus

www.shom.fr
Data.shom.fr


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Rédigé par Noémie Debot-Ducloyer le Lundi 14 Mars 2016 à 09:36 | Lu 3888 fois