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Michel Bourez : "Le CT est la meilleure option pour être à Teahupo'o en 2024"


Photo WSL-DAMIEN POULLENOT
Photo WSL-DAMIEN POULLENOT
Tahiti, le 15 décembre 2021 - Après son élimination prématurée à Haleiwa, fin novembre, qui a précipité sa sortie du Championship Tour (CT), Michel Bourez est de retour au fenua depuis quelques jours. Le Spartan a dresse le bilan de cette année "à oublier", et réaffirme son ambition de se requalifier pour le CT en vue des Jeux olympiques de 2024, avec les épreuves de surf programmées à Teahupo'o. 

Michel, 2021 a été une année très compliquée pour toi. Elle s'est terminée par ta sortie du tour mondial, après 12 saisons au plus haut niveau. Avec un peu de recul, quel bilan tires-tu de cette année 2021 ?
“Il y a eu plus de bas que de hauts et ça a été une année très compliquée. Il faut rappeler que lorsque le tour a redémarré en avril/mai, c'était le début des réouvertures des frontières. Pour aller en Australie, où le tour a repris, avec ma famille, on a dû aller en France, rester une semaine, revenir à Los Angeles où on est resté une semaine aussi et puis enfin prendre un vol charter vers l'Australie où on a été 14 jours à l'isolement. Et en sortant de la quatorzaine on lance la compétition sur des vagues qui n'étaient pas à la hauteur du CT.”
 
Il y a eu quatre étapes (sur sept) en Australie entre avril et mai. Et comme tu l'as rappelé, les conditions n'étaient pas optimales pour que tu puisses t'exprimer. Est-ce-que c'est sur cette tournée en Australie que s'est joué ton année ?
“Non ça s'est joué sur toute l'année honnêtement. Mais oui en Australie, on a été sur des spots qui n'ont pas été favorables à mon surf. Et reprendre dans ces conditions, après une saison blanche et deux semaines après un isolement, ça a été dur à avaler mentalement. Après les conditions étaient les mêmes pour tout le monde et il faut savoir surfer dans les toutes les conditions et ce n'est juste pas passé pour moi.”
 
Et puis en juillet la WSL a décidé d'annuler la dernière étape du tour à Teahupo'o...
“C'est le coup qui m'a achevé. Je venais de me faire éliminer au Mexique et j'ai appris le lendemain que la compétition à Tahiti était annulée. A ce moment-là, j'étais hors du tour alors que j'avais en tête encore une possibilité de me requalifier à la maison. L'objectif était de faire un gros résultat à Teahupo'o et c'était possible. Mais finalement je n'ai pas eu cette possibilité.”
 
Tu as fait aussi une demande de “wild-card” (invitation) à la WSL parce que tu avais manqué la cinquième étape du Ranch, en juin, à cause d'une blessure. Mais finalement les deux invitations ont été accordées à l'Australien Owen Wright et à l'Américain Kolohe Andino. Comment tu as pris cette nouvelle ?
“Pour Kolohe Andino, je comprends qu'une invitation lui soit revenue parce qu'il a raté pratiquement toute l'année. Et pour Owen Wright j'avoue que la décision m'est restée un peu au travers de la gorge. Il était présent sur les étapes même s'il se plaignait de douleurs au pied. Et puis la WSL a trainé un pour rendre sa décision sur ses invitations. Quand j'ai appris que je n'avais pas la wild-card, c'était au Portugal, en octobre, sur la deuxième étape des Challenger Series (CS). J'étais parti très tranquille sur les deux premières étapes des CS, en me disant que j'aurais forcément eu l'une des deux invitations. Et puis finalement j'apprends que non et ça a été un nouveau coup dur pour moi. Derrière, je me remobilise au Pro France fin octobre. Je me fais mal au genou en huitièmes de finale, mais j'ai forcé pour arriver en finale où je perds. C'est simple si je gagne la finale au Pro France, je reste sur le tour. Puis je rentre à Tahiti où je ne surfe pas pendant un mois avant la compétition à Haleiwa. Je me suis concentré sur la récupération et sur les soins pour mon genou et ma nuque. Et ce n'est qu'à Hawaii, deux jours avant la compétition que je resurfe.”

"C'est simple si je gagne la finale au Pro France je reste sur le tour"

Michel Bourez, au Pro France à la mi-octobre, où il a atteint la finale. (Photo  WSL  LAURENT MASUREL)
Michel Bourez, au Pro France à la mi-octobre, où il a atteint la finale. (Photo WSL LAURENT MASUREL)
Tu abordes donc cette dernière étape diminué physiquement mais sur un spot, Haleiwa, qui t'as souri par le passé (deux victoires sur le spot). Mais finalement tu sors dès ton entrée en lice...
“Chaque fois que j'étais à l'eau les premières vagues que je prenais me faisaient mal. Après la douleur passait, une fois que j'étais chaud. Mais franchement, sur cette série je me suis saboté tout seul. J'étais trop excité et je partais sur n'importe quoi ou je m'engageais sur des vagues que je pensais bonne mais qui ne l'étaient pas. En résumé, il fallait juste être plus patient et j'aurais passé cette série.”
 
C'était à Haleiwa en 2008 où tu avais validé ta qualification sur le CT. Ça aurait été un signe du destin pour toi de te requalifier sur ce même spot…
“J'y ai pensé aussi et j'ai abordé la compétition avec trop de confiance. J'aurais dû être plus calme et prendre plus de recul. J'étais en mode “je veux tout fracasser”. J'avais de coachs pour me conseiller, mais je me disais aussi “qui peut me donner des conseils pour surfer cette vague”. Et c'est ça qui m'a coûté l'année une deuxième fois. Mais c'est comme ça qu'on apprend.”
 
Il y a eu aussi la parenthèse des Jeux olympiques à Tokyo, où tu es sorti en quarts de finale par le triple champion du monde brésilien Gabriel Medina. Tu l'as dit et répété, tu souhaites continuer jusqu'aux JO de 2024 avec les épreuves de surf à Teahupo'o. Malgré ta sortie du CT, est-ce-que c'est toujours le cas ?
“Oui toujours. C'est pour cette raison que je veux rester sur le tour c'est pour pouvoir être là en 2024 à Teahupo'o. C'est toujours l'objectif. Si ce n'était pas chez nous, j'aurais déjà arrêté, dès l'année dernière. A un moment, il faut se dire que ça suffit. Et puis avec le Covid ça devient difficile de voyager, j'ai du mal aussi à gérer l'éloignement avec ma famille. Mais pour le moment on ne connait pas encore le mode de qualification pour les JO de 2024. Mais si on prend le même système de qualification que pour Tokyo, les dix premiers du CT l'année avant les JO étaient qualifiés. Le CT est la meilleure option pour moi pour être à Teahupo'o en 2024. Du coup ce n'est pas plus mal pour moi de ne pas être sur le tour en 2022. Aujourd'hui, c'est plus difficile de se maintenir sur le CT que d'y rentrer.”

"Si je dois me faire opérer du ménisque, il me faudra un gros mois pour retourner à l'eau"

Quel est ton programme pour les prochaines semaines, sachant que les premières étapes du QS de la zone Hawaii/Tahiti sont organisées généralement début mars à Papara et à Rangiroa ?
“J'ai repris les entraînements, mais je ne peux pas encore trop surfer. Dès que je force trop, j'ai mal au genou. Je vais voir prochainement mon physio, Karyl Peyrolle. Je verrai avec lui si je dois me faire opérer ou pas. Mais si je dois me faire opérer du ménisque, il me faudra un gros mois pour retourner à l'eau. Mais avant je ferai aussi d'autres examens médicaux et en fonction de tout ça j'en saurais plus sur mon programme. Après j'ai juste envie de surfer de bonnes vagues et de me faire plaisir.”


 

Kauli Vaast et Vahine Fierro ont fait le choix de la zone Europe pour le QS. Est-ce qu'il y a une différence de niveau entre les deux régions ?
“Ils ont fait le choix de l'Europe parce qu'ils ont des engagements à respecter avec leur sponsor. Et à mon avis il est plus difficile de se qualifier en Europe parce qu'il faut vraiment faire toutes les petites compétitions. Moi j'ai fait le choix de la zone Hawaii/Tahiti parce que ce sont des spots que je connais comme Papara et Rangiroa et j'ai donc plus de chance de me requalifier pour le tour.”
 
Le CT doit reprendre fin janvier avec une première étape à Pipeline. Qu'est-ce-que ça va te faire de suivre tout ça de loin ?
“Ça m'a fait un peu bizarre au tout début à Hawaii. Mais aujourd'hui ça ne me touche plus vraiment. Maintenant, j'ai vraiment besoin de souffler un peu, de m'occuper de ma famille et surtout d'oublier cette année, de mettre ça de côté et de repartir sur de bonnes bases. Et puis j'ai demandé une invitation pour l'étape de Pipe, même si ça m'étonnerait que je l'aie. On verra ce qui se passe. Mais si je suis retenu et que je fais de bons résultats à Pipe et à Sunset dans la foulée, il y a moyen que je sois encore sur le tour l'année prochaine. On verra.”
 
Le lendemain de ton élimination et de ta sortie du CT, le 30 novembre, on titrait à la Une de Tahiti Infos “OUT”. Cette Une a suscité pas mal de réactions de la part de ta famille et tes proches. Et toi comme l'as-tu prise ?
“Quand je l'ai vu ça ne m'a pas choqué. Déjà ce n'est pas faux parce que je suis “out”, mais j'avais l'impression aussi que beaucoup de gens attendaient que je sois out en fait. Et la chose par contre que je n'ai pas forcément aimé, c'est que ce n'est pas dans nos habitudes à Tahiti d'afficher quelqu'un de cette manière-là. C'est juste ça qui m'a pincé. Après j'ai vu que beaucoup de mes proches, mes amis ont pris mon parti et même des gens que je ne connaissais pas. Tout ce soutien ça m'a fait chaud au cœur et en général ça a été très positif pour moi.”
 
Ce sont les fêtes de fin d'année, qu'est-ce qu'on peut te souhaiter pour 2022 ?
“In. Cette fois-ci (rires). Plus sérieusement, retrouver mon physique, éviter les blessures, surfer et repartir. Je ne m'arrête pas.”

Rédigé par Désiré Teivao le Mercredi 15 Décembre 2021 à 16:26 | Lu 1679 fois