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Les "business angels" de la forêt au secours de l'industrie du bois


PARIS, 28 juin 2014 - Pour aider l'industrie du bois en difficulté, quoi de mieux que les propriétaires forestiers eux-mêmes? Avec 4 millions d'euros investis en quatre ans, ces nouveaux "business angels" donnent un coup de pouce à la filière, des scieries à la chimie verte.

Le projet est parti d'un constat: l'industrie du bois, qui emploie 450.000 personnes, est l'un des secteurs avec le déficit commercial le plus important du pays. Car la France exporte beaucoup de bois brut vers l'étranger, avant d'en réimporter une partie sous forme de meubles et de parquets, perdant au passage la valeur ajoutée.

En cause notamment, la Chine, qui multiplie les achats de bois brut hexagonal depuis quelques années.

"Il faut que la compétitivité des industriels français leur permette de rattraper le différentiel de main-d'oeuvre. Il faut plus d'investissements et mieux", affirme Henri Plauche-Gillon, président de la Fédération des forestiers privés de France.

D'où l'idée, lancée en 2010 par les forestiers privés, d'investir eux-même dans les entreprises du secteur, pour les aider à devenir plus performantes. L'association Forinvest Business Angels était née.

"J'ai toujours souffert de voir qu'il n'y avait pas assez de valorisation du bois en France par rapport à des pays comme l'Allemagne, la Suède ou la Finlande", confirme Christian Bouthillon, l'un des business angels, propriétaire de 400 hectares dans le Limousin et lui-même gestionnaire professionnel de forêts.

Le nombre potentiel de personnes concernées n'est pas négligeable. La France compte 3,5 millions de propriétaires de forêts, dont 70% détiennent moins d'un hectare.

"Quand on aime la forêt et qu'on est entrepreneur dans l'âme, on a envie que la forêt se développe. Ce que j'aime, c'est trouver des niches d'innovation", témoigne Christian Leclerc, médecin, qui a acheté par passion 300 hectares de forêt dans le Cher.

- 'Investissement qui ait du sens' -

Des financements ont ainsi été accordés à un bureau d'études inventeur d'un ingénieux système de filtration des eaux polluées aux matériaux lourds avec de l'écorce de bois, qui pourrait intéresser l'industrie de l'uranium.

Mais aussi à un fabricant de plancher en bois dit "de bout", beaucoup plus résistant, ou une entreprise qui a mis au point des enzymes pour faire baisser la pollution et la consommation d'énergie de l'industrie papetière.

Forinvest regroupe aujourd'hui 130 adhérents, qui ont investi depuis le départ un total de 4 millions d'euros dans 14 entreprises. Cinq à six dossiers sont retenus chaque année, sur la trentaine étudiée.

La plus petite mise de départ est de 1.000 euros et peut aller jusqu'à plusieurs dizaines de milliers d'euros.

Tous les participants "veulent faire un investissement qui ait du sens" et apportent "des compétences en plus des capitaux", car ils exercent généralement un autre métier à côté, explique Eric Toppan, secrétaire général de Forinvest.

La démarche des business angels revêt une dimension de conseil: les propriétaires forestiers apportent leur expertise aux projets qu'ils encouragent.

"On regarde de très près les business plans, qui ont parfois besoin d'accompagnement. Nous avons parmi nous d'anciens commissaires aux comptes, chefs d'entreprises ou experts comptables qui sont heureux de donner de leur temps pour aider à développer ces entreprises", explique M. Bouthillon.

"On ne donne pas simplement de l'argent, on fait aussi des comités de pilotage tous les mois pendant 18 mois-2 ans (...) Pour une entreprise qui naît, il y a plein de dangers. Si on peut les aider à en éviter quelques-uns...", souligne M. Leclerc, qui a d'ailleurs vu deux projets échouer.

L'implication et les connaissances des business angels forestiers a aussi permis de donner confiance à d'autres investisseurs, privés notamment, qui se montraient frileux, assure Eric Toppan.

Le fait que des propriétaires de forêts s'engagent leur donne confiance car "ils ne comprennent pas la filière. C'est de l'industrie lourde, il faut beaucoup de capitaux pour des rentabilités mesurées dans un premier temps", rappelle-t-il.

Rédigé par AFP le Vendredi 27 Juin 2014 à 20:09 | Lu 269 fois