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Le statut d’autonomie revu le 13 février au Sénat


Le gouvernement français ayant engagé la procédure accélérée sur les deux textes le 12 décembre, ceux-ci pourraient ne faire l’objet que d’une seule lecture au Parlement. Photo : AFP
Le gouvernement français ayant engagé la procédure accélérée sur les deux textes le 12 décembre, ceux-ci pourraient ne faire l’objet que d’une seule lecture au Parlement. Photo : AFP
PARIS, le 6 février 2019. La commission des lois du Sénat a examiné ce mercredi le projet de loi organique modifiant le statut d’autonomie de la Polynésie française. Les sénateurs examineront le texte à partir du 13 février.

La commission des lois du Sénat a donné son feu vert mercredi à l’actualisation du statut de la Polynésie française, en adoptant deux projets de loi (l’un organique, l’autre ordinaire). L’objectif pour le gouvernement français est de reconnaître la contribution de la Polynésie française à la construction de la capacité de dissuasion nucléaire française, de faciliter l’exercice de leurs compétences par la Polynésie française et les communes polynésiennes et de garantir la stabilité des institutions polynésiennes et en particulier de l’assemblée de la Polynésie française.

« Le Sénat rappelle ainsi son attachement à la Polynésie française et à son autonomie dans la République », a commenté Philippe Bas, président de la commission des lois et sénateur Les Républicains. « Il appartient désormais à l’État de respecter ses engagements, notamment en matière financière, pour permettre aux collectivités polynésiennes d’exercer au mieux leurs compétences au service de nos concitoyens. »

La commission des lois a adopté 62 amendements afin d’enrichir les textes du gouvernement et de mieux répondre aux attentes des Polynésiens.

Sur le plan institutionnel, la commission a encouragé la coopération entre les communes et la collectivité de la Polynésie française, notamment pour le recouvrement des impôts locaux et l’exercice concomitant de certaines compétences (politique de la ville, protection et mise en valeur de l’environnement, etc.).
Les compétences des communautés de communes ont été redéfinies pour faciliter le développement de l’intercommunalité en Polynésie française.

La commission a également revu le régime des lois du Pays adoptées par l’assemblée de la Polynésie française pour qu’elles puissent être promulguées plus rapidement. En novembre dernier, l’assemblée de Polynésie avait en effet dans son avis indiqué qu’elle souhaitait que les recours contre les lois du Pays ne soient plus suspensifs. Par le passé, le coût du retard dans la mise en œuvre de certaines lois du Pays sur des réformes d'importance a été significatif alors que les recours contre ces lois du Pays se sont soldés par un rejet de la part du Conseil d'Etat.

En matière foncière, la commission a facilité la sortie de l’indivision et pérennisé l’aide juridictionnelle apportée par le Pays aux particuliers, afin de mettre fin à des situations inextricables qui empêchent l’exploitation des terrains.
« Les textes adoptés par la commission des lois sont à la fois consensuels et porteurs de véritables avancées pour la Polynésie française », a indiqué Mathieu Darnaud, rapporteur. « Ils sont le fruit d’un dialogue constant avec les autorités de la Polynésie française et avec notre collègue de la commission, Lana Tetuanui ».
Le projet de loi organique et le projet de loi seront débattus en séance publique le mercredi 13 février.

Reconnaissance du fait nucléaire : « ces dispositions sont largement dépourvues de portée normative »

Le projet de loi organique qui sera examiné mi-février au Sénat prévoit la reconnaissance de la contribution de la Polynésie française à la construction de la capacité de dissuasion nucléaire française. Le projet de loi propose qu'il soit inscrit que "La République reconnaît la contribution de la Polynésie française à la construction de la capacité de dissuasion nucléaire et à la défense de la Nation", que "l’État assure l’entretien et la surveillance des sites concernés des atolls de Mururoa (Moruroa, ndlr) et Fangataufa" et "accompagne la reconversion de l’économie polynésienne consécutivement à la cessation des essais nucléaires".
« Le Conseil d’Etat observe que ces dispositions sont largement dépourvues de portée normative et, en tout état de cause, que plusieurs des « principes » qu’elles énoncent sont redondants sur le plan juridique, dès lors notamment que le législateur ordinaire a d’ores et déjà défini les conditions de reconnaissance et d’indemnisation des victimes des essais nucléaires français (…) et que le code de la défense prévoit que « les anciens sites d'expérimentations nucléaires du Pacifique » relèvent du régime des installations et activités intéressant la défense nationale », souligne le Conseil d’Etat dans son avis rendu fin novembre. « Il constate en outre qu’elles ne se rattachent, même indirectement, à aucune des différentes catégories de règles ou de mesures énumérées par l’article 74 de la Constitution. Elles ne présentent donc pas, en tout état de cause, un caractère organique ». « Dans ces conditions, le Conseil d’Etat ne retient pas ces dispositions dans le projet de loi organique. Il demeure évidemment loisible au Gouvernement de rappeler ces principes dans l’exposé des motifs du projet. »


Terre rares : le projet de loi organique « ne modifie pas » la législation actuelle

Dans un article, le projet de loi organique modifiant le statut d’autonomie de la Polynésie française aborde la question des compétences concernant les terres rares. Celui-ci « ne modifie pas l’état du droit existant mais se borne à l’expliciter», analyse le Conseil d’Etat.
Le projet de loi organique confère à la Polynésie française le soin de réglementer et exercer « le droit d’exploration et le droit d’exploitation des ressources naturelles biologiques et non biologiques des eaux intérieures (…), du sol, du sous-sol et des eaux sur-jacentes de la mer territoriale », pour préciser que cette énumération inclut les « éléments des terres rares ». Après avoir examiné ce texte, le Conseil d’Etat observe que la notion de « terres rares », « bien qu’elle semble faire l’objet d’un consensus scientifique tendant à y inclure 17 métaux (…), n’a reçu, à ce jour, qu’une définition juridique partielle ». « En tout état de cause, un tel ajout ne modifie pas l’état du droit existant mais se borne à l’expliciter. » Pour faire simple, cet article ne donne pas plus de compétences à la Polynésie s’agissant des terres rares. La Constitution prévoit en que « pour des motifs relevant de la défense nationale, certaines terres rares devaient être classées comme « matières premières stratégiques » (…), l’Etat serait compétent pour réglementer leur exploration et leur exploitation. »


Rédigé par Mélanie Thomas le Mercredi 6 Février 2019 à 14:13 | Lu 814 fois