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Le portail de la discorde à Punaauia


Les propriétaires du terrain longtemps inoccupé et que le voisinage avait pris l’habitude de traverser pour gagner la plage ont décidé de s’installer et de construire. Le site a été clôturé et le fait passe mal au PK 12,5.
Les propriétaires du terrain longtemps inoccupé et que le voisinage avait pris l’habitude de traverser pour gagner la plage ont décidé de s’installer et de construire. Le site a été clôturé et le fait passe mal au PK 12,5.
Tahiti le 9 mai 2025 – À Punaauia, certains riverains du PK 12,5 avaient pris l’habitude de rejoindre la mer en traversant une propriété privée longtemps laissée inoccupée. Aujourd’hui les propriétaires ont décidé de construire et de clôturer leur terrain en fermant cet accès au grand dam des habitués du voisinage.
 
Un résident qui a grandi côté montagne au PK 12,5 à Punaauia, Gassmann Peu, est en colère car il n’a plus accès à la mer par la servitude “Puamaru”. “J’ai grandi ici. Je travaille mais je vais à la pêche tous les jours. Lorsque les matahiapo vivaient toujours, c’est le chemin qu’on empruntait, et on n’a jamais eu de souci (…). Ils nous disaient tant que c’est pour nourrir la famille, on ne vous interdit pas de passer.”
 
Il regrette qu’aujourd’hui les choses aient changé et que les propriétaires aient installé un portail à l’entrée de leur propriété dans le but de privatiser les lieux alors qu’ils ont le projet de s’installer à demeure. “Comment on fait maintenant pour aller pêcher ?” s’indigne Gassman.
 
Ce riverain explique aussi qu’il a rencontré la propriétaire des lieux. Elle l’a prévenu que dès la fin du mois il ne pourrait plus emprunter la servitude jusqu’à la mer “car on va fermer l’accès”, lui a-t-elle dit. “Je l’ai supplié de nous laisser un passage pour aller à la pêche. Certains de mes enfants n’ont pas de travail et la pêche est un moyen de subsistance”. La seule réponse qu’il aurait eu de la propriétaire est un laconique ‘je vais voir’, nous explique-t-il.
 
Une semaine après cette discussion, alors que Gassmann Peu revenait de la pêche par le chemin habituel, quelle ne fût pas sa surprise devant l’obstacle : “Le portail avait été installé. Je suis donc passé par la plage avec toutes mes affaires jusqu’à l’école 2 + 2 pour revenir chez moi”, dit-il. “Elle n’a pas eu pitié de moi, me suis-je dit.”
 
Sans compter que cette fermeture de l’accès à la plage concerne également le site de mise au sec des pirogues de pêche, traditionnellement installées en sécurité sur la propriété privée. “Autrefois on attachait nos pirogues sur ces poteaux pour les protéger en cas de forte houle. Et là ils ont tiré le grillage (…). Et ils ont mis nos pirogues dehors. Si je n’avais pas eu la jugeote de venir chercher mes pirogues [elles seraient parties avec la mer].”

“Ce sont les envahisseurs et c’est nous les méchants ?”

La propriétaire des lieux, Taianapa Pambrun, se dit “déçue” et qualifie la récente “intervention” de son voisin, sur les réseaux sociaux de “très basse”. Comme elle s’en défend tout le voisinage est au courant de ce dossier, y compris les forces de l’ordre. Son avocat a même saisi le tribunal. “J’essaie de faire les choses bien et eux utilisent les réseaux sociaux pour essayer de m’atteindre (…). Je trouve cela gamin et immature (…). Et je me heurte à toute cette méchanceté”, s’indigne la jeune femme qui a simplement décidé, en toute légitimité, de “construire” sur son terrain.
 
“Ici c’est chez mon arrière-grand-père, Aimé Pambrun, et ce terrain devait revenir à mon papa (…). Je n’ai pas fait ça pour les chasser (…). Moi je ne vais pas chez les autres, je ne quémande rien. Ici je suis chez moi ; c’est mon droit.” Et, rien à faire pour Taianapa Pambrun : son terrain n’est pas un “accès” à la mer. Elle rappelle d’ailleurs que l’accès à la plage se trouvait, naguère, dans le chemin suivant. Cet accès public se trouve aujourd’hui au niveau de l’école primaire 2+2=4.
 
Comme elle l’explique aussi, elle s’est entretenue avec Grassmann Peu à plusieurs reprises au sujet de son projet, contrairement à ce qu’il a déclaré. Et lorsqu’elle lui a annoncé la fermeture de l’accès, il lui aurait fait un “chantage” en la menaçant de “l’empêcher de passer par devant”, outre les “méchancetés et agressions verbales” dont elle a été la cible ces derniers mois de la part de ce dernier et de plusieurs voisins. “Quand mon papa est là, personne ne m’embête. Mais lorsque je suis toute seule je me fais engueuler et insulter à répétition et ce n’est pas comme si ça ne me blessait pas.”
 
Taianapa Pambrun est consciente de “déranger leurs habitudes”, mais “ils se sont octroyé un droit car on a été gentil. Et maintenant ils veulent imposer un droit qui n’existe pas (…). Ils viennent chez moi et aujourd’hui je veux reprendre mes droits ; c’est moi la méchante ? C’est les envahisseurs et c’est nous les méchants ?”

Rédigé par Vaite Urarii Pambrun le Lundi 12 Mai 2025 à 07:00 | Lu 13281 fois