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Le grand débat national ne suscite pas l'engouement Outre-mer


Paris, France | AFP | vendredi 18/01/2019 - Concurrencé par les Assises des Outre-mer, une consultation qui s'est tenue pendant huit mois, le grand débat national ne suscite pas l'engouement dans les territoires ultramarins, malgré des situations sociales et économiques souvent douloureuses.

Taux de chômage élevé, PIB par habitant inférieur à la moyenne nationale, accès aux soins et à l'éducation difficile, cherté de la vie lié à l'éloignement et à l'insularité, les Outre-mer cumulent des difficultés plus importantes qu'en métropole.  
Mais à l'exception de La Réunion, où les "gilets jaunes" ont bloqué l'île pendant quinze jours en décembre pour dénoncer les inégalités sociales, le mouvement de contestation populaire qui embrase l'Hexagone a peu pris en Outre-mer. Et le grand débat proposé par Emmanuel Macron "n'est pas le grand enjeu" des territoires, a reconnu une source proche du dossier au ministère des Outre-mer. 
Même si on assure au ministère que "le grand débat aura bien lieu dans les Outre-mer", sur le terrain peu de maires ont mis en place des cahiers de doléances, ont constaté les correspondants de l'AFP.
Beaucoup d'élus mettent en avant les nombreuses consultations qui ont déjà eu lieu en Outre-mer, à l'instar de Gilbert Eustache, maire du Diamant en Martinique: "le gouvernement a déjà tous les éléments, toutes les clés en main pour nous accompagner", après les "états généraux" de l’ère Sarkozy, et surtout les récentes "Assises des Outre-mer". 
Ces Assises ont abouti à la rédaction en juin dernier d’un livre bleu, dans lequel le gouvernement a pris des engagements en matière de logement, transport, lutte contre les risques climatiques, sécurité, accès aux soins, développement économique, etc. 
"Beaucoup de sujets ont été traités, mais on peut discuter de sujets complémentaires, comme les institutions, la démocratie participative ou la question de la fiscalité", insiste le ministère. 
A La Réunion, le grand débat est pourtant lancé dans l'indifférence, et Stéphane Fouassin, président de l'Association des maires, craint qu'il soit une simple réplique des Assises. "Peut-être que nous aurons un +livre jaune+ cette fois-ci. C'est bien beau de faire des documents, mais il faut qu’ils servent", dit-il.
Sans attendre le débat national, les collectifs "gilets jaunes" ont érigé depuis plusieurs semaines des "kaz du peuple", petites maisons en palettes où ils discutent référendum d'initiative populaire, minimum vieillesse ou octroi de mer (impôt local). Une plateforme collaborative a aussi été lancée sur Internet. 
 

- "flottement" -

A l'inverse, rien n'est fait à Mayotte, qui a connu en 2018 plusieurs semaines de contestation populaire contre l'insécurité et l'immigration. "Il n'y a pas vraiment de demande des administrés", explique un responsable municipal d'une commune du nord. Selon lui, "les élus voient ce grand débat comme une occasion de se faire taper dessus", en pleine période "de pré-campagne" pour les municipales. D'autres évoquent "une perte de temps" ou ont été "échaudés" par les consultations précédentes, note-t-il.
Mais le Collectif des Citoyens de Mayotte regrette "le flottement qui règne" et déplore que les Mahorais, "peu connectés", sont "bien en peine de trouver les cahiers de doléances", "alors que nous avons beaucoup à dire". 
En Guyane, théâtre d'un long blocage au printemps 2017 pour réclamer un rattrapage économique et social, quelques maires commencent à installer des cahiers de doléances. Mais David Riché, président de l'association des maires, estime que "ce débat nous l'avons déjà eu avec les accords de Guyane" consécutifs au mouvement social, "les Assises" et "les Etats généraux de Guyane" lancés par la Collectivité en 2018. "Il n'y a plus rien à dire. On sait ce qu'on veut".   
Pourtant, Yvane Goua, porte-parole des 500 frères et Trop Violans, associations leaders du mouvement contestataire, appelle de ses voeux des "réunions publiques" pour évoquer les sujets "laissés à l'abandon depuis 2001", sur le désenclavement par exemple.
En Polynésie et en Nouvelle-Calédonie, plus autonomes, le débat est inexistant, tout comme à St-Barth, où les seuls "gilets jaunes" sont ceux déguisés pour le carnaval. "Il y a dans ce débat des problématiques qui ne nous concernent pas" comme "le pouvoir d’achat et la fiscalité", explique Bruno Magras, président de la collectivité, où "on ne paie pas d'impôt sur la fortune (...) pas d’impôt sur le revenu et pas de droits de succession". 

le Vendredi 18 Janvier 2019 à 06:19 | Lu 297 fois