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Le cancer qui n'existait pas, le nerf coupé à tort: l'enfer des accidents médicaux


Paris, France | AFP | jeudi 05/02/2015 - Annick, traitée pour un cancer qu'elle n'avait jamais eu, Inès, gravement touchée par une "maladresse chirurgicale" qui l'handicape: des victimes ou leurs proches témoignent alors que se tiennent les Etats généraux sur les infections nosocomiales et la sécurité des patients.

"J'ai vraiment eu la totale dans les deux sens du terme!" "On ne m'a pas ratée", résume Annick Santucci, une Corse dynamique de 51 ans, traitée pour un cancer qui n'existait pas.

En 2012, elle prend "un grand coup sur la tête" lorsqu'on lui annonce une forme de sarcome de l'utérus, un cancer agressif. Elle subit 15 séances d'une pénible chimiothérapie. Avec cette tumeur, "vous en avez au mieux pour 6 mois à un an, je me suis renseigné sur internet", indique Patrick, son mari, qui peste contre "les erreurs médicales accumulées" et le "je-m'en-foutisme".

Au départ, Annick souffre "de grosses douleurs" dans le bas du dos que son médecin traite sans succès pendant deux mois à coups de "calmants et de cortisone". Mais "jamais de prise de sang qui aurait pu repérer une infection", regrette-t-elle.

- 'Un grand tunnel noir' -

"Un malaise au travail" conduit à faire des examens qui révèlent une infection pelvienne étendue. Opération totale en gynécologie le 19 décembre 2011: on lui ôte l'utérus, les trompes... Le chirurgien est rassurant. Des prélèvements sont toutefois envoyés à un laboratoire d'anatomopathologie pour analyse. Les résultats? "C'est moi qui l'interroge lors d'une consultation pour une reprise de travail le 3 février 2012. Il avait oublié. Il regarde et dit +Rasseyez-vous, vous allez entrer dans un grand tunnel noir.+"

Ensuite, la chimiothérapie est décidée, mais aucun des médecins concernés ne se préoccupe d'obtenir "une relecture des lames" de tissus prélevés pour confirmer le diagnostic, comme le réclame le mari, ce qui aurait de toute façon dû être fait. Le couple apprendra l'absence de cancer le 30 mai lors d'une séance de chimio. "Celle-ci aurait pu être évitée si l'information n'avait pas encore traîné trois heures dans les méandres des services..." s'indigne le mari.

La responsabilité de la femme médecin anatomopathologiste à l'origine de l'erreur de diagnostic a été reconnue par le tribunal de Nanterre le 20 janvier 2015. Elle n'a pas procédé aux vérifications d'usage, ne s'est pas précitée non plus pour transmettre aux cancérologues deux avis de spécialistes qui ne voyaient pas de cancer les 21 mars et 30 avril 2012 alors que le traitement inutile avait commencé le 19 février. Les hôpitaux d'Ajaccio et Bastia se sont excusés.

"J'ai eu de la chance, j'ai échappé aux rayons" prévus, dit Annick qui a repris son travail. Mais le traitement "n'a pas arrangé son rein", désormais perdu.

- 'Paralysie du muscle' -

Pour Inès, 11 ans, née avec une luxation congénitale des hanches, rétive aux traitements, c'est une "maladresse" d'un chirurgien qui est en cause et qui a aggravé son état.

Son père Sid Ahmed Horri ne décolère pas: "A l'hôpital d'Argenteuil, le chirurgien s'est acharné, il lui a raccourci l'os du fémur de 5 cm en disant ça repousse!" Et puis à l'âge de 9 ans en 2009, il lui a sectionné le nerf du quadriceps, une lésion qui a entraîné une paralysie du muscle de la cuisse servant à tenir debout. "Résultat, elle ne peut pas verrouiller le genou pour marcher, sa jambe droite se dérobe. Elle ne peut pas soulever sa jambe sans s'aider de la main", dit-il. "Elle a une béquille, mais ne veut pas mettre ses chaussures orthopédiques."

Le chirurgien est décédé depuis, mais l'expertise atteste que la lésion nerveuse a bien été causée par une "maladresse chirurgicale", la responsabilité revenant à l'hôpital.

Inès poursuit sa croissance et son état de santé n'est pas encore stabilisé et devra encore être réévalué par les experts.

Rédigé par () le Jeudi 5 Février 2015 à 06:22 | Lu 695 fois