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Le Président de Nauru annonce son gouvernement


Baron Waqa
Baron Waqa
YAREN, vendredi 14 juin 2013 (Flash d’Océanie) – Baron Waqa, élu Président de Nauru en début de semaine à l’issue des législatives tenues le week-end dernier, a annoncé jeudi la composition de son gouvernement, au sein duquel figurent quelques vétérans de la politique locale, mais aussi des nouveaux venus.

Parmi les nouveaux venus : Aaron Cook, qui marque son entrée au Parlement, devient ministre du commerce, de l’industrie et des loisirs.
La seule femme députée, Charmaine Scotty, elle aussi élue pour la première fois, hérite des importants portefeuilles de l’intérieur, de l’éducation, de la jeunesse et de la gestion foncière.
Chez les vétérans, David Adeang, déjà membre de plusieurs gouvernements précédents, prend en charge les finances, le développement durable et la justice.
Le nouveau ministre de la santé, des transports et des pêcheries est M. Valdon Dowiyogo.
En charge des télécommunications, de l’équipement et du sensible dossier des royalties de la quasi-défunte activité d’exploitation du phosphate : Shadlog Bernicke.
M. Waqa a choisi de prendre directement sous sa responsabilité les affaires étrangères et le commerce extérieur, la police, la fonction publique, les changements climatiques et les services d’urgence.

En annonçant la composition de son équipe, M. Waqa a une nouvelle fois insisté sur l’importance, désormais, d’assurer une stabilité politique dans ce pays qui a été marqué, ces dernières années, par une succession de renversements et d’alternance, au gré, le plus souvent, de changements d’alliance et de votes de motions de censure.
Ces derniers mois, un blocage des institutions au niveau parlementaire avait rendu cette institution inopérante, séparée en deux camps strictement égaux de neuf députés de chaque côté.
Juste avant les élections, le Président sortant Sprent Dabwido était parvenu, en vue de réduire les facteurs d’instabilité et de paralysie, à faire passer le nombre de circonscriptions et donc de siège à l’Assemblée de 18 à 19.


Le Président de Nauru annonce son gouvernement
Évoquant rapidement le dossier sensible de l’hébergement par Nauru d’un camp de détention pour immigrants clandestins interceptés au large des côtes australiennes, le Président Waqa n’a pas exclu cette semaine la possibilité de relâcher les conditions de détention de ces demandeurs d’asile qui attendent le traitement de leur dossier par les autorités australiennes.
Ces mesures pourraient signifier une libre semi-liberté restreinte à cette petite île.
« Mais avant cela, nous voulons être sûrs que nos concitoyens se sentent suffisamment à l’aise avec cette idée, qu’ils se sentent suffisamment en sécurité », a-t-il nuancé.
Cette semaine, dans le petit tribunal de la Cour Suprême de Yaren, la justice examine un recours déposé par des militants de groupes australiens de défense des droits humains, et qui vise à contester la légalité d’un tel centre établi sur cette île, à la demande de l’Australie.
Le groupe de militants s’est attaché les services d’un avocat de haute volée, Julian Burnside.
Tout au long de la semaine, le juge australien John von Doussa a entendu des témoignages concernant notamment les conditions de détentions dans ce centre.
Ce centre, réactivé en septembre 2012, accueille actuellement environ quatre cent personnes, pour la plupart venues du Moyen Orient et du Sri Lanka.
Si la Cour Suprême de Nauru devait trancher en faveur des demandeurs, l’une des conséquences les plus immédiates pourrait être la remise en liberté sur l’île des pensionnaires de ce camp, pour cause d’insalubrité des installations dans lesquelles ils avaient été placés depuis leur arrivée.


Le dossier du camp de détention pour immigrants clandestins

Le Président de Nauru annonce son gouvernement
L’exploitation du phosphate a fait les beaux jours de Nauru durant la plus grande partie du vingtième siècle, avant de laisser place à une quasi-faillite à partir des années 1990.
Depuis, l’une des seules sources de revenus de l’État de Nauru vient sous forme de subsides et de compensations australiennes en échange de la réouverture d’un camp de détention pour immigrants clandestins expédiés dans le cadre de ce qu’il est convenu d’appeler la « Solution Pacifique » de Canberra, une réponse forte aux flux continus d’immigration clandestine en provenance du Moyen Orient ou encore du Sri Lanka, via un réseau de passeurs en Indonésie, toute proche au Nord des côtes Nord-occidentales australiennes.

Ce camp, réactivé en septembre 2012 à la demande de Canberra, accueille depuis sa réouverture plus de cinq cent individus, dans des conditions sans cesse contestées par les associations de défense des droits humains ainsi que le Haut-commissariat des Nations-Unies aux Réfugiés, qui à plusieurs reprises a rappelé l’Australie à ses obligations internationales en tant que signataires de plusieurs conventions relatives aux droits humains.

Le 16 mai 2013, le parlement fédéral australien a adopté un texte de loi rendant impossible toute demande d’asile sur l’ensemble de l’île-continent.
Cette nouvelle loi, qui « excise » de facto l’ensemble du territoire australien de la zone d’immigration, a été adoptée par les travaillistes au pouvoir, avec le soutien de l’opposition conservatrice, en dépit de l’opposition du groupe parlementaire des Verts, qui parle de « tache sur l’image de l’Australie ».
Ces dispositions entrent dans le cadre d’une politique dure de réponse à une vague d’immigration clandestine, principalement sur des embarcations de fortune en provenance de l’Indonésie toute proche, où transitent des immigrants clandestins afghans, ou sri-lankais, via des passeurs.
Déjà, les clandestins interceptés par les autorités australiennes près des îles australiennes (les îles Ashmore, Cartier, Christmas et Cocos) hors continent, au large à l’Ouest, étaient traités en mode « excision » et étaient déportés dans des centres de détention, y compris les deux centres extraterritoriaux réactivés en septembre et en octobre 2012 à Nauru et sur l’île de Manus (Papouasie-Nouvelle-Guinée).
En vertu de cette nouvelle loi, désormais, toute arrivée sur le continent tombera sous le même régime, ont annoncé les autorités, qui soulignent le caractère dissuasif d’une telle mesure.
Tout comme pour les camps de Manus et de Nauru, ces mesures d’excision avaient été fortement envisagées sous un précédent gouvernement conservateur dirigé par John Howard, en 2006, mais elles s’étaient heurtées à une fronde au sein même de la majorité de l’époque.
La politique mise en œuvre par le gouvernement travailliste de la Première ministre Julia Gillard fait suite aux recommandations remises par un panel d’experts, en août 2012.
Entre-temps, toujours mi-mai 2013, 57 ressortissants Sri-lankais répartis en deux vols ont quitté l’Australie à bord d’un avion charter, affrété par le gouvernement, a précisé le ministre de l’immigration et de la citoyenneté, Brendan O'Connor.
Près d’un millier de ressortissants de ce pays ont ainsi été renvoyés chez eux depuis août 2012, a ajouté le ministre.
« Renvoyer ces groupes au Sri Lanka envoie un message fort aux gens qui paient des passeurs pour leur dire qu’ils jettent leur argent par les fenêtres et risquent même leur vie », a martelé le ministre.

Depuis la réouverture des camps de Nauru et de l’île de Manus (Papouasie-Nouvelle-Guinée, là aussi à la demande de l’Australie), en septembre-octobre 2012, les clandestins déportés ont multiplié les actes de protestation, de grèves de la faim, d’automutilation, voire même de tentatives de suicides, afin de s’élever contre les conditions de vie dans ces « centres de traitement », ainsi que contre le fait qu’aucune durée limitée limite n’est fixée pour leur séjour insulaire.
Ian Rintoul, responsable de l’une des ONG (RAC, Refugee Action Coalition) particulièrement impliquée dans ce dossier des camps extraterritoriaux de Nauru et de Manus, estimait début mars 2013 que la situation actuelle, au plan politique local, était plutôt faite pour « arranger » le gouvernement australien, dans la mesure où les dysfonctionnements permettent aussi de ne pas traiter de manière diligente les nombreuses demandes d’accès aux réfugiés formulées par les ONG et l’ONU.
M. Rintoul cite notamment le cas de Kieren Keke, l’un des ministres démissionnaires, qui occupait le poste de ministre des affaires étrangères à Nauru et qui, à ce titre, était donc engagé dans la poursuite de négociations avec Canberra sur cet épineux dossier.
Dans le cadre de l’accord signé entre l’Australie et Nauru, concernant ce camp, la gestion de ces installations et le maintien de l’ordre sont du ressort de la juridiction locale et ne tombent par conséquent pas sous le coup des lois australiennes.
Même au plan intérieur politique australien, le parti des Verts, sous la houlette de la Sénatrice Sarah Hanson Young, mettait en garde début avril 2013 le gouvernement fédéral australien de la travailliste Julia Gillard contre l’éventuelle tentation de se servir de la situation politique à Nauru comme excuse pour faire traîner le traitement des dossiers de demandeurs d’asiles envoyés à Nauru.
« Le traitement des dossiers de demande d’asile de ces gens doit commencer dès maintenant. Et si cela ne peut être fait par les autorités locales, alors ces gens doivent être ramenés sur le sol australien. C’est aussi simple que ça », avait-elle alors lancé.

pad

Rédigé par PAD le Vendredi 14 Juin 2013 à 05:24 | Lu 415 fois