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Lana Tetuanui insiste pour que la dette nucléaire soit inscrite dans le "marbre"


PARIS, le 13 février 2019. La sénatrice Lana Tetuanui a regretté ce mercredi que la dette nucléaire et les "garanties financières" ne soient inscrites dans le projet de loi organique. Elle a demandé "des garanties de la part du gouvernement au titre du prochain projet de loi de finances pour 2020".

Lors de l'examen du projet de loi organique portant modification du statut d'autonomie de la Polynésie française et le projet de loi portant diverses dispositions institutionnelles en Polynésie française, Lana Tetuanui a indiqué : "nous nous sentons quand même un peu frustrés…" La sénatrice en a ensuite détaillé les raisons en indiquant que les élus polynésiens regrettent que le montant des "engagements financiers de l'Etat" ne soient pas inscrits dans le "marbre"
: "nous tenons tout particulièrement à l'inscription, dans notre loi statutaire, de notre contribution à la puissance nucléaire de la France (...) et à l'instauration de garanties financières qui ne peut, hélas !, être inscrite dans un projet de loi organique. Il ne s'agit pas de créer une nouvelle charge pour vous, mais de conforter la volonté de nos élus d'inscrire dans le marbre le respect des engagements financiers de l'État. Nous souhaitons sanctuariser et globaliser la dette nucléaire de l'État, et ce au titre d'une véritable autonomie de gestion de cette dotation."

"Nous sollicitons en conséquence, madame la ministre, des garanties de la part du gouvernement au titre du prochain projet de loi de finances pour 2020, afin de singulariser et consolider cette dette", a poursuivi la sénatrice.
"La dotation liée au fait nucléaire dans son ensemble doit être pérenne. Elle correspond à un engagement pris par le Président de la République, Jacques Chirac – on l'appelait alors la dotation globale de développement économique, la DGDE –, pour environ 150 millions d'euros, soit 18 milliards de francs Pacifique. Elle doit être respectée."

Intervention de Lana Tetuanui


La ministre des Outre-mer, Annick Girardin, en ouverture de séance, avait pourtant tenté de rassurer les élus polynésiens. "L'interpellation de l'assemblée du Pays m'a amené à demander à mes services une étude sur les dotations dont bénéficient les collectivités en Polynésie française", a-t-elle indiqué. "Ce travail a mis en évidence une particularité : 99 % des dotations du pays relèvent du programme 123, c'est-à-dire du ministère des outre-mer. De ce fait, la Polynésie française pèse beaucoup dans le budget du ministère et subit les aléas de gestion de manière plus forte que les autres collectivités, qui, elles, bénéficient pour la plupart de la dotation globale de fonctionnement – la DGF. Cela en fait la seule collectivité de la République dont la principale dotation, votée en loi de finances, peut fluctuer en gestion."

"C'est pourquoi, sur ma demande, le Gouvernement a décidé de retirer la dotation globale d'autonomie, ou DGA, qui représente plus de 90 millions d'euros par an, du budget du ministère des outre-mer. Dans le cadre du prochain projet de loi de finances, cette dotation sera transformée, à l'instar de la DGF, en un prélèvement sur recette d'un montant identique", a poursuivi la ministre. "Cela permettra de régler une problématique de fonds, qui a longtemps contraint le budget de la collectivité."

Annick Girardin a indiqué que les autres instruments financiers demeureront bien dans le programme 123 du ministère des outre-mer. "L'assemblée de la Polynésie française a donc eu raison de soulever cette question et, grâce à sa mobilisation, la sanctuarisation de la DGA sera à l'avenir une réalité juridique concrète", a souligné la ministre.


Comme Lana Tetuanui, les sénateurs Jean-Pierre Sueur et Robert Laufoaulu ont demandé au gouvernement d'aller plus loin. "L'article 1er du projet de loi organique reconnaît en effet la contribution de la Polynésie à la construction de la capacité de dissuasion nucléaire de la Nation", a souligné l'élu de Wallis et Futuna. "Mais dire cela, c'est bien peu dire. De l'avis même du Conseil d'État, les dispositions de l'article 1er sont largement dépourvues de valeur normative. Nous comprenons cependant la nécessité d'une telle inscription. Plus de 90 % des essais nucléaires français ont été réalisés à Mururoa et à Fangataufa. Au total, c'est environ 700 fois la puissance de la bombe d'Hiroshima qui a été libérée dans le ciel et dans le sol de Polynésie durant une trentaine d'années. Malgré cela, nous avons assisté ces dernières années à des mesures de tâtonnement qui ne sont pas à la hauteur des enjeux ni de l'histoire. Il ne faut pas minimiser les conséquences de ces essais à la fois sur la population, mais aussi sur l'environnement. Il faut une juste reconnaissance, un juste accompagnement et une juste indemnisation."

Les explications de vote sur ces deux textes sont prévues mardi 19 février à 15 heures. Elles seront suivies d’un vote solennel sur le projet de loi organique, organisé en salle des Conférences, puis du vote sur le projet de loi.


Intervention d'Annick Girardin


Rédigé par Mélanie Thomas le Mercredi 13 Février 2019 à 14:10 | Lu 1356 fois