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"La majorité des salariés est contre le maintien de M. Pastour à la tête d'ATN", selon le SPNT


"La majorité des salariés est contre le maintien de M. Pastour à la tête d'ATN", selon le SPNT
« Vous voyez, on n’est pas si méchants que ça » ! C’est dans une ambiance détendue que plusieurs pilotes d’Air Tahiti Nui accueillent Tahiti Infos ce lundi matin. Détendue ? Presque. Car si la grève a bel et bien été levée, vendredi soir, le conflit social est loin d’être réglé au sein de la société. Les attaques par medias interposés ont laissé des traces : les pilotes, parfois visés nommément par M. Pastour dans ses communiqués, ont l’impression d’avoir été érigés en boucs émissaires par les médias.

En réponse à Cédric Pastour, qui les accuse, dans de longues interviews accordées à la presse écrite de ce lundi, d’avoir abusé du droit de grève , ils contre-attaquent point par point. Oui, ils le reconnaissent, ils avaient ce projet de grève « dans les cartons » depuis plusieurs mois. Et la procédure disciplinaire intentée contre un PNC et un co-pilote a bien été « l’élément déclencheur ».

Mais elle n’est pas le cœur du problème. Ce que ces pilotes refusent, c’est toujours l’embauche d’un pilote d’Air Calin au poste de directeur des opérations aériennes. Et le projet de nouvel organigramme de la société, qui prévoirait le remplacement d’une « dizaine de cadres de la compagnie » par des personnes venues de l’extérieur. Des embauches qui sont perçues comme un « mépris » des compétences locales.

En revanche, les pilotes nient vouloir obtenir la tête du PDG de leur société. Mais affirment aussitôt qu'une "majorité des salariés d'ATN souhaite aujourd'hui le départ de M.Pastour".

Le président du pays s’est engagé vendredi à proposer le remplacement de Cédric Pastour lors du prochain conseil d’administration, le 11 juillet. « Nous ne sommes pour rien dans cette décision », affirme Jean-Yves Saint-Marc, représentant syndical SPNT ATN auprès du CE. Pour lui, Cédric Pastour, en faisant de l'embauche de ce pilote une condition sine qua non, se met lui-même en difficulté. "Si M. Pastour veut se faire Hara-kiri, nous n'en sommes pas responsables".

Interview.

« On n’est pas si méchants que ça », dites-vous en plaisantant. Vous avez l’impression qu’on a cherché à vous diabloliser dans ce conflit ?

Oui, il y a une réelle volonté de diaboliser les pilotes. Nous, nous avons défendu notre droit à donner nos avis sur l’embauche d’un pilote, qui se fait d’ailleurs dans un cadre très précis (voir ci-dessous le document rédigé par les syndicats représentatifs des pilotes d’ATN « L’embauche d’un pilote de ligne : une responsabilité pénale avant tout ! ».) Des amalgames ont été fait volontairement.

Le président Temaru s’est engagé à proposer le remplacement de Cédric Pastour au cours du prochain conseil d’administration, le 11 juillet. C’était ça, l’objectif de votre grève ?

Absolument pas. Nous sommes restés verrouillés sur notre revendication, qui est de ne pas embaucher un pilote d’Air Calin au poste de directeur des opérations en vol. M. Pastour ne souhaitant pas négocier, le président du pays a souhaité trancher, mais les pilotes ne sont pas intervenus là dedans. Si M. Pastour décide de se faire Hara-Kiri, en disant « c’est moi avec ce pilote, ou c’est sans moi », nous ne serons pas responsables de son départ.

Néanmoins vous souhaitez son départ ?

Non, je ne suis pas un anti Pastour convaincu, bien au contraire. En tant que représentant syndical d’un très gros syndicat de l’entreprise, j’ai toujours dit qu’il fallait donner à M. Pastour sa chance, qu’il fallait le laisser travailler. Maintenant, force est de constater après 6 mois que ses méthodes ne sont pas populaires, et que la majorité des salariés de l’entreprise est contre son maintien à la tête de la société. Je dirai que c’est lui qui n’a pas su s’adapter à l’entreprise, et non le contraire.

Qu’est-ce qui vous déplaît dans ses méthodes ?

Je dirais qu’il a beaucoup dialogué, mais individuellement, syndicat par syndicat, alors que nous avons toujours demandé à être reçus tous ensemble. Il a ensuite utilisé les informations recueillies au cours de ces rencontres pour monter les gens les uns contre les autres ! Donc l’ambiance dans l’entreprise est devenue délétère, la pression exercée sur les salariés est énorme. Par exemple des « passagers mystère » sont embarqués depuis un mois sur les avions pour « fliquer » les PNC. On ne sait pas qui sont ces gens ni d’où ils viennent. De même, une dizaine de cadres ont été priés de quitter l’entreprise sans beaucoup de ménagements. Il faut arrêter ces méthodes là.

Qui sont ces cadres que M. Pastour souhaite voir partir ?


Ce sont des personnes qui font leur travail depuis 12 ans au sein d’Air Tahiti Nui et qui n’avaient pas attendu M. Pastour pour faire leur travail. M. Pastour appelle ça des départs conventionnels. Il leur dit : ‘on n’a plus besoin de vous, on va vous remplacer par des cadres qui viennent de l'extérieur.’ Il veut faire de la place pour mettre entre 8 et 10 de ses collaborateurs métropolitains.

Avez-vous vu cet organigramme ?

Non, puisque M. Pastour comptait nous l’imposer, et nous avons pris le parti de bloquer cet organigramme par notre grève. On ne peut pas accepter que l’on refuse ainsi d’utiliser les compétences locales.

Pourtant votre grève, et le préavis déposé par les PNC, ont été mal perçus au sein même de la société, puisque le personnel au sol s’est prononcé contre. Comment réagissez-vous face à cette levée de boucliers ?

La partie du personnel au sol qui s’est prononcée contre la grève protestait contre les méthodes employées, mais pas contre les objectifs, puisque nous nous étions rencontrés la semaine précédente et ils étaient tous d’accord avec nous.

Certains ont tout de même parlé « d’abus de droit de grève », expression reprise par M. Pastour dans plusieurs interviews. N’y avait-il pas d’autres moyens de vous faire entendre ?

Je ne pense pas. Nous avons utilisé le droit de grève pour bloquer l’embauche d’une personne qui n’avait pas sa place dans l’entreprise, et ce n’est pas une utilisation abusive du droit de grève.

Vous demandez à M. Pastour de privilégier la promotion interne plutôt que de faire appel à des personnes venues de l’extérieur. Vous avez quelqu’un en tête en disant cela ?

Nous avons fait un référendum et des réunions entre pilotes, et il y a bien quelqu’un au sein de l’entreprise qui serait tout à fait qualifié pour occuper ce poste.

On peut savoir qui c’est ?

Ce n’est pas à moi de le révéler, ce serait plutôt à lui de le faire s’il le souhaite.

Vous avez proposé sa candidature à M. Pastour ?

Oui. Il nous a répondu qu’il n’avait jamais, à aucun moment, envisagé de recruter cette personne en interne. Je répète là ses propres mots. M. Pastour veut travailler avec ses amis, ce que je peux comprendre, mais ce que nous ne nous pouvons pas accepter.

Mais les embauches ne sont-elles pas, comme M. Pastour le répète depuis le début, une prérogative exclusive de la direction générale ?

C’est une prérogative d’un PDG lorsqu’il a monté la compagnie et qu’il l’a financée avec ses propres moyens ! Là nous parlons d’une SEM (société d’économie mixte) dont le pays est actionnaire majoritaire, et M. Pastour doit écouter ce que le pays lui dit. L’entreprise n’appartient pas à M. Pastour.

Si Cédric Pastour est démis de ses fonctions par le CA le 11 juillet, voyez-vous sur le territoire une personne apte à le remplacer ?

Ce n’est pas à moi de le dire. Le CA est souverain pour le choix du PCA et du directeur général, mais je rappelle que nous avons vécu 7 mois l’année dernière sans président du conseil d’administration, sous la gouvernance de M. Rispal, et que cette situation pourrait très bien se reproduire, ce qui laisserait le temps de trouver quelqu’un de compétent, ici ou ailleurs.

M. Pastour accuse 4 pilotes de ligne grévistes d’avoir déposé des arrêts-maladie pour toucher leur salaire. Et il vous met en cause en affirmant que vous avez signé la feuille de présence et que vous n’étiez pas gréviste...

(Rires parmi les pilotes présents) On ne sait pas trop de quoi parle M. Pastour, puisqu’il n’y a pas de feuille de présence. Quant aux arrêts maladie, je peux vous parler du cas d’un pilote qui s’est cassé la cheville en parapente ! Cet arrêt maladie me semble plutôt justifié !

Donc il n’y a pas eu 4 arrêts maladie parmi les grévistes ?

Je confirme qu’il n’y a pas eu 4 arrêts maladie liés à la grève.

Vous avez été personnellement mis en cause par M. Pastour à de nombreuses reprises. Y a-t-il un conflit personnel qui vous oppose ?

Je déplore que M. Pastour en fasse une affaire personnelle. Comme je vous l’ai dit, j’ai fait partie de ceux qui ont défendu M. Pastour à son arrivée. Ce que M. Pastour ne comprend pas, c’est que je ne suis que le porte-parole, le « meneur » si l’on peut utiliser ce mot, d’un mouvement social plus ample dans l'entreprise. Moi en tout cas je n’en fais pas une affaire personnelle avec lui.



Bagarre à l'hôtel Tokyu de Narita : les précisions du SPNT ATN

"Un copilote s'est interposé pour mettre fin à une bagarre entre un PNC d'ATN et un PNC d'une autre compagnie aérienne. On lui a reproché d'avoir agrippé cet autre PNC et donc d'avoir pris part à la bagarre, ce qui est faux. Le conseil de discipline lui a reproché de ne pas avoir "désamorçé" la bagarre et c'est pour cela qu'il a été mis à pied quinze jours. Un récit totalement erroné de cette altercation a été fait dans les journaux, et nous nous réservons le droit de porter plainte contre un quotidien de la place".




"L'EMBAUCHE D'UN PILOTE DE LIGNE : UNE RESPONSABILITE PENALE AVANT TOUT"

Ci-dessous le courrier signé par les "syndicats représentatifs des pilotes d'ATN" qui dénonce l'embauche d'un pilote d'Air Calin, non qualifié sur Airbus A 340."Il aurait été tout à fait irresponsable vis-à-vis de la sécurité de nos passagers de mettre aux commandes de nos A340 un commandant de bord n'ayant aucune expérience sur cet avion", explique notamment ce courrier.

"La majorité des salariés est contre le maintien de M. Pastour à la tête d'ATN", selon le SPNT

"La majorité des salariés est contre le maintien de M. Pastour à la tête d'ATN", selon le SPNT

le Lundi 4 Juillet 2011 à 11:54 | Lu 6282 fois