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La libération de Yannick Mai ou le mandat d'arrêt qui divise


La libération de Yannick Mai ou le mandat d'arrêt qui divise
Tahiti, le 31 mars 2021 – Condamné en première instance à neuf ans de prison ferme pour sa participation à un trafic qui a permis l'importation de six à huit kilos d'ice en Polynésie, l'ancien guide touristique Yannick Mai a été libéré mardi par la cour d'appel. Dans son arrêt, auquel Tahiti Infos a eu accès, la juridiction a en effet considéré que le mandat d'arrêt délivré contre l'intéressé était illégal puisqu'il n'était ni en fuite, ni résident aux États-Unis mais juste détenu. Une analyse qui n'avait été partagée ni par le juge d'instruction, ni par le parquet, ni même encore par le tribunal correctionnel. Saisie par le parquet général, la Cour de cassation va désormais devoir trancher.
 
Libre comme l'air. La cour d'appel de Papeete a fait droit mardi à l'exception de nullité soulevée par l'avocat de l'ancien guide touristique Yannick Mai, Me Vincent Dubois, et a ainsi ordonné la remise en liberté de l'intéressé. Ce dernier a pu quitter la maison d'arrêt de Nuutania où il était incarcéré depuis sa condamnation, le 16 juin dernier, à neuf ans de prison ferme pour avoir participé à un trafic d'ice qui avait permis, entre le 1er juin 2016 et le 11 juin 2017, l'importation de six à huit kilos d'ice en Polynésie. Dans son arrêt, auquel Tahiti Infos a eu accès, la cour d'appel motive sa décision en expliquant que le mandat d'arrêt qui avait été délivré par le magistrat instructeur en charge de l'affaire était irrégulier puisque Yannick Mai n'était ni en fuite, ni résident aux États-Unis.
 
Pour comprendre les fondements de cette décision qui a grandement fait réagir l'opinion publique mardi, encore faut-il remonter à l'origine des faits incriminant Yannick Mai. Le 11 juin 2017, et alors qu'il faisait déjà l'objet d'une information judiciaire ouverte à Tahiti pour trafic de stupéfiants, Yannick Mai avait été interpellé à l'aéroport de Los Angeles en possession de 3,7 kilos d'ice. Il avait alors été jugé en Californie, condamné à 37 mois de prison et incarcéré. Le 6 décembre 2017, le magistrat instructeur en charge de l'affaire à Tahiti avait délivré un mandat d'arrêt contre Yannick Mai qui purgeait déjà sa peine aux États-Unis. Au terme de celle-ci, l'ancien guide touristique avait finalement rejoint Tahiti où il avait été mis en examen et condamné le 16 juin 2020 à neuf ans de prison ferme.

Exception de nullité

Ayant fait appel de cette condamnation, Yannick Mai a donc comparu devant la cour d'appel le 4 mars dernier. Lors de cette audience, et tel qu'il l'avait déjà fait lors du procès en première instance, son avocat, Me Vincent Dubois, a soulevé une exception de nullité en demandant au tribunal de "constater" que le mandat d'arrêt délivré contre son client le 6 décembre 2017 ne répondait pas aux critères de l'article 131 du code de procédure pénale. Cet article précise qu'un juge d'instruction peut délivrer un mandat d'arrêt si “la personne est en fuite ou si elle réside hors du territoire de la République”.
 
Or, la cour d'appel a considéré mardi que lorsqu'il était incarcéré aux États-Unis, Yannick Mai ne répondait à aucune de ces deux situations et a affirmé dans son arrêt qu'il ne “peut évidemment être considéré qu'un individu détenu est en fuite”. Elle s'est ainsi opposée à l'analyse qui avait été faite par le juge d'instruction et par le tribunal correctionnel lors du procès de première instance selon laquelle Yannick Mai était résident aux États-Unis du fait de sa détention, en affirmant que l'on ne pouvait pas considérer que la situation de détention induisait une situation de résidence.
 
La cour d'appel ayant donc déclaré mardi que le mandat d'arrêt décerné à l'encontre de Yannick Mai était “nul” et que l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel pour la partie le concernant était “irrégulière”, l'intéressé a été libéré de Nuutania et pourrait jouir de sa liberté durant un certain temps. Car, si le parquet général a annoncé qu'il allait se pourvoir en cassation, la décision de la juridiction parisienne ne devrait pas intervenir avant plusieurs mois.

Rédigé par Garance Colbert le Mercredi 31 Mars 2021 à 17:39 | Lu 1858 fois