Tahiti Infos

"L'équilibre Etat-Pays est nécessaire"


Tahiti, le 21 juillet 2022 – Au terme de trois ans aux fonctions de haut-commissaire de la République en Polynésie française, Dominique Sorain quittera le dernier poste de sa carrière de haut-fonctionnaire le 27 juillet prochain. Dans une interview de départ accordée à Tahiti Infos, il évoque en détails la gestion de la crise Covid, l'exercice de l'autonomie, le sujet du nucléaire et plus généralement les problématiques institutionnelles qui, selon lui, ne doivent pas être occultées mais ne doivent pas non plus occulter les questions économiques et sociales.
 
Vous avez pris vos fonctions en août 2019 et votre séjour en Polynésie française a été particulièrement marqué par la gestion de la crise Covid. Comment cette situation exceptionnelle a-t-elle affecté vos missions et la feuille de route fixée il y a trois ans ?
 
“J'avais en effet une feuille de route et c'est vrai que la crise sanitaire est venue l'affecter. Mais ça l'a affectée sans l'affecter. Cela ne nous a pas empêchés de travailler sur tous les dossiers. La crise sanitaire nous a énormément monopolisés et a mené à réorganiser une grande partie des services du haut-commissariat. Il a fallu par exemple travailler à l'élaboration des textes, des arrêtés et des dispositifs, mobiliser des moyens… Ça a donc été une mobilisation totale du haut-commissariat, mais dans le même temps on a continué à travailler sur nos dossiers classiques et notamment sur toutes les conventions État-Pays. Des dossiers qui ont eu un coup de fouet, à la fois sur la partie sanitaire et sur la partie plus classique au travers de la venue du Président de la République et du ministre des Outre-mer. On a accéléré au contraire sur tous ces dossiers. Je prends l'exemple des dotations et de l'exécution des conventions. Chaque année, on n'utilisait pas la totalité des dotations théoriques prévues dans les conventions. Là, depuis 2020 et 2021 –et ce sera j'espère le cas en 2022–, on est allé au-delà des conventions.”
 
Avec le recul, quel regard portez-vous sur la gestion de cette crise sanitaire en Polynésie française, marquée notamment par un très grand nombre de décès lors de la vague Delta en août 2021 ? Certaines critiques parfois formulées à l'égard des autorités durant cette crise, auxquelles la Polynésie n'a pas échappée, ont-elles pu être justifiées ou étaient-elles de toutes façons inhérentes à cette situation inédite ?
 
“Les critiques sont, je pense, assez inhérentes à ce type de crises. Ceux qui étaient contre l'utilisation des masques, contre l'utilisation du pass sanitaire, contre la mise en place du couvre-feu, contre la mise en place du confinement… Mais en même temps, il y en avait d'autres qui disaient qu'on ne prenait pas assez de mesures et qu'il fallait fermer complètement le territoire. Les décisions sont compliquées à prendre en la matière. Avec le président du Pays, on a eu une gestion commune de bout en bout des dispositifs. Le Pays, avec la compétence de santé, et l'État avec la compétence en matière de libertés publiques et d'accès au territoire. Et je crois qu'on a réussi à le faire avec toujours comme objectif la protection sanitaire, mais aussi un minimum de vie économique pour éviter un effondrement du territoire. Notre critère, c'était d'éviter que le système de soins soit complètement saturé et enfoncé. Ce qui n'a pas été le cas. On a eu des périodes d'alertes en septembre et octobre 2021 où le système de soins a été mis à mal. Mais les soignants ont tenu. Des renforts importants ont été amenés de la Métropole, jusqu'à 400 médecins, infirmiers, aides-soignants, sapeurs-pompiers… Et le système a tenu. On a entendu que l'on n'avait fait que transcrire ce qui avait été fait en Métropole. C'est totalement faux. D'abord, nous n'étions pas dans le même rythme épidémique que la Métropole, où il y a eu sept vagues quand ici nous en avons eu quatre. Et à chaque fois, on a eu des dispositifs adaptés. J'étais moi-même habilité par le niveau central pour pouvoir prendre des mesures spécifiques à la Polynésie française. Bien sûr, je peux comprendre les critiques et les réactions lorsqu'on a des décès, des malades, des personnes qui sont affectées et des problèmes économiques sur le territoire. Mais à un moment donné, il faut prendre des décisions. Et je pense qu'on a réussi à les prendre dans les meilleures conditions possibles.”
 
Toujours sur cette gestion de la crise Covid, comment jugez-vous les relations entretenues avec le Pays pendant cette période et notamment le partage délicat des compétences sanitaires et relevant des libertés publiques ?
 
“Pour moi, ces compétences sont claires. Il y a toujours un certain niveau de complexité, qui est lié au sujet lui-même quand on parle de libertés publiques. D'ailleurs, je dois dire que nous n'avons pas eu d'annulation des textes que nous avons pris. Sauf un, je m'en souviens très bien : l'annulation du couvre-feu mis en place en 2020. Il y a eu un recours au moment où j'allais lever cet arrêté. Donc 24 heures après cette décision, le couvre-feu aurait de toutes façons été levé. C'était au mois de juin 2020. Il n'y avait plus aucun malade, plus aucune raison. Pour moi la situation est donc claire. Je crois que ça montre un équilibre dans les compétences État-Pays sur l'exercice de l'autonomie. Cet équilibre est nécessaire. Il fait partie de l'organisation de notre République… Mais par-delà l'aspect institutionnel, le Président l'a dit lorsqu'il est venu, l'État est intervenu au-delà de ses compétences. Notamment pour aider les entreprises. Nous n'avons jamais eu le moindre doute quand la question s'est posée. J'ai tout de suite demandé que la Polynésie bénéficie de ces appuis et l'État a versé 29 milliards de Fcfp d'aides directes aux entreprises. De la même façon, on a apporté un appui en matière de santé dans la compétence du Pays. On a apporté les vaccins. On a assuré la continuité territoriale. On a livré du matériel. C'est normal, c'est la solidarité républicaine. C'est l'illustration des grands principes républicains. Donc, je crois qu'il faut se poser ces questions sur la mécanique institutionnelle. Mais ce n'est pas ce qui m'apparaît le plus important au regard de la santé et du devenir des Polynésiens.”
 
Il faut donc une certaine souplesse dans l'exercice du statut d'autonomie ?
 
“Oui, il faut une certaine souplesse dans les modes de fonctionnement. Si on résonnait uniquement en termes de compétences, on ne fonctionnerait pas de façon fluide. Un exemple que je prends souvent est celui du secteur maritime, où il y a un partage de compétences. On a mis en place une commission mixte maritime. Cela fonctionne très bien. On regarde comment l’on peut fonctionner sur ces sujets, dans l'ensemble national et avec des règles particulières au territoire. Sur la pêche, le Pays prend des réglementations particulières et l'État en assure le contrôle. C'est ça la réalité de la vie institutionnelle.”
 

“L'État assume pleinement les conséquences des essais nucléaires”


Plus généralement et sans nécessairement évoquer la situation de la crise Covid, estimez-vous que le rôle du haut-commissaire est plutôt d'être un relais des préoccupations de l'État à l'égard de la collectivité ou au contraire davantage de faire remonter à Paris les enjeux et les intérêts locaux pour les défendre ?
 
“Les deux bien sûr. Je représente les membres du gouvernement central et je suis là pour appliquer leurs décisions, comme tout haut-commissaire ; mais je dois aussi faire percevoir à nos interlocuteurs parisiens les grands enjeux qu'il y a ici et faire aboutir les dossiers. Je prends l'exemple des renforts pendant la crise sanitaire. Nous avions des visio-conférences trois fois par semaine pour déterminer les besoins et le Pays était à nos côtés pour exprimer ses demandes. C'est ça l'efficacité.”
 
Pour évoquer certains dossiers de fonds, l'État s'est engagé sur le chantier de la création des abris anticycloniques, où en est ce dossier et apporte-t-il également une réponse aux défis du changement climatique ?
 
“Oui, c'est un enjeu que nous avions perçu de cette façon. Ce sont les cyclones mais c'est aussi le risque de tsunami. C'est aussi l'exemple d'un sujet dans lequel, pendant dix ans, le Pays et l'État se sont renvoyé la balle. Le Pays disant que la sécurité civile est de compétence de l'État et nous qui disions qu'il s'agissait d'une compétence du Pays. On a finalement mis en place un plan d'ampleur, puisque sur cinq ans on a 17 abris de survie qui ont été programmés. Et là aussi, on a utilisé tous les crédits et on a même été au-delà de l'enveloppe théorique en 2021. J'ai fait des déplacements et on est allé poser des premières pierres dans certains atolls. L'approche nouvelle, c'est que ces abris peuvent aussi servir à abriter une école, un dispensaire ou un centre d'incendie et de secours… C'est ce qui nous a permis de nous en sortir et d'optimiser tous les crédits à mettre en place sur ce type d'équipements. C'est, je pense, une belle réussite, transposable dans d'autres territoires de la République et dans le Pacifique.”
 
Un mot sur la délinquance routière préoccupante et qui ne semble pas s'améliorer au fil des années : l'État peut-il faire plus pour endiguer ce phénomène ?
 
“C'est un problème. On a un socle de 29 à 30 tués sur les routes ces dernières années. On a eu une baisse à un moment, mais cela repart à la hausse sur le nombre de blessés et d'accidents… Ce sont essentiellement des accidents de deux-roues et avec des problèmes de consommation d'alcool et de drogue. Donc, il y a un problème de comportement. J'ai demandé aux forces de police et de gendarmerie, appuyés des mūto’i, de renforcer les contrôles et d'être extrêmement sévères par rapport aux infractions constatées. Cela nécessite aussi de faire de la prévention. On a demandé au Pays et aux communes de travailler avec nous sur ce sujet, parce que c'est vraiment un problème de société. L'alcool, on le retrouve aussi dans d'autres domaines et notamment les violences intrafamiliales. Il y a, je pense, un sursaut à avoir sur cette question.”
 
Sur l'épineux dossier des conséquences du nucléaire et du suivi de la mission Reko Tika initiée en 2021, les projets du Centre de mémoire et les discussions sur une participation de l'État aux dépenses liées à la prise en charge des maladies radio-induites par la CPS sont-elles en bonne voie à la veille de votre départ ?
 
“Après la table ronde Reko Tika, voulue par le président du Pays, le Président de la République s'est engagé sur cette voie : l'État assume pleinement les conséquences des essais nucléaires. Il a pris un certain nombre de décisions sur des sujets qui avaient déjà été abordés mais sur lesquels il n'y avait pas eu assez d'engagements forts de l'État. C'est l'ouverture des archives notamment. On a maintenant 90 000 documents accessibles. Et cela a été fait en moins d'un an. On a également mis en place, ici, une mission sur les conséquences des essais nucléaires, confiée à l'administrateur des Tuamotu-Gambier, accompagné d'un cadre et de trois agents. Parce que je m'étais rendu compte, en allant à Reao, Pukarua ou Tureia, que les gens étaient très loin et qu'il était difficile pour les ayants droit de déposer des dossiers. Cette collecte a représenté pas moins de 140 dossiers depuis le mois de février. Bien sûr, les associations peuvent toujours travailler. Il n'y a pas de monopole. Nous ne sommes là que pour faciliter les choses. Il y a également eu des mesures prises comme le nettoyage de certaines îles. Cela aurait dû être fait depuis des années et on l'a achevé. Il y a le gros dossier de Hao. Les analyses de sol qu'il fallait actualiser sont terminées. Et on va maintenant pouvoir travailler avec le Pays pour voir comment dépolluer ces terres. Et il y a le Centre de mémoire. On a cédé au Pays le terrain en 2020 à l'euro symbolique. Il y a eu un appel d'offres lancé pour déterminer le contenu de ce Centre de mémoire et le résultat n'était pas satisfaisant. Il fallait reproduire la procédure, tout cela étant ralenti par la crise sanitaire. Le Pays, maître d'ouvrage, a donc demandé à l'État d'apporter un appui. Une mission d'inspecteurs généraux du ministère de la Culture de Paris est venue il y a trois mois et j'ai remis lundi leur rapport à Édouard Fritch. Le Pays est en train de l'étudier. Il conseille au Pays de mettre en place une équipe projet. C'est très technique et pas du tout sur le contenu du Centre de mémoire.”
 
Sur la stratégie Indo-Pacifique de la France maintenant, l'évolution du contexte international et la situation géographique particulière de la Polynésie française ont-elles fait évoluer le rôle de la collectivité pour l'État ces dernières années ?
 
“Le Président de la République avait dit lors de son discours au mois de juillet ici qu'il fallait affirmer le rôle de la France dans le Pacifique et dans l'océan Indien, du fait de la présence de 2,5 millions de Français dans ces zones. La France doit assurer la sécurité de ces territoires. Bien sûr, le rôle de la France n'est pas de s'engager pour tel ou tel bloc dans cette zone. C'est de renforcer le multilatéralisme qui permet de discuter avec toutes les parties prenantes. C'est à la fois un message de fermeté et de paix. Ça passe par une affirmation de la présence des forces de souveraineté dans le Pacifique. C'est pour cette raison qu'on va recevoir deux patrouilleurs océaniques en 2023 et 2025. Il y en aura également en Nouvelle-Calédonie. Et le ministre des Armées et ancien ministre des Outre-mer, a indiqué que la présence des armées serait renforcée dans la zone.”
 

“L'État ne s'est jamais désengagé”


Votre séjour a également été marqué par la visite présidentielle d'Emmanuel Macron l'année dernière, que retenez-vous de cet événement ?
 
“C'est un voyage qui a permis d'accélérer et de clarifier. C'est un voyage long pour un Président de la République, de trois jours et demi. Il a pu aller aux Marquises où jamais aucun chef d’État n'était allé. Il a pu aller aux Tuamotu à Manihi. Et ça a été l'occasion d'affirmer un certain nombre de choses fortes, notamment pour évoquer comment pouvait fonctionner l'autonomie dans la République. Chacun dans ses compétences, on le disait, mais avec un appui fort de l'État au territoire. Ça lui a permis de s'exprimer sur les conséquences du nucléaire, on l'a dit, et de synthétiser l'ensemble des engagements de l'État. De même, il a fait un certain nombre d'annonces. Il a confirmé les crédits pour les abris. Il a confirmé les crédits pour l'énergie renouvelable. Je crois qu'il a eu un discours très ouvert sur ce qui devait être le fonctionnement des relations entre la Polynésie française et la République. Il a dit que rien n'était figé. On peut parler de tout, mais il faut savoir dans quel but on aborde ces sujets. Et tous les engagements ont été tenus.”
 
Très récemment, le débat politique local s'est fait plus pressant autour de la notion de citoyenneté polynésienne au sein de la République française avec les sujets de la taxe pour les investissements des non-résidents, de la protection de l'emploi local ou du retour des fonctionnaires d'État polynésiens au fenua. Comment jugez-vous cette évolution ?
 
“Il n'y a pas à ce stade de position de l'État en la matière, mais quand même un commentaire sur la taxe de 1 000% sur les transactions immobilières pour les non-résidents. Je l'ai déférée au Conseil d'État pour rupture de l'égalité entre les citoyens. Et d'ailleurs, elle semble pénaliser davantage les Polynésiens, puisqu'il ne ressort pas des signalements des banquiers et notaires qu'un afflux d'investisseurs métropolitains viendrait acheter des maisons ici. Sur la citoyenneté, et notamment les questions liées à l'emploi, quel est l'objectif qui doit être poursuivi ? Je crois que c'est celui de faire en sorte que les Polynésiens puissent se loger et puissent travailler. Avant de se poser la question de la mécanique institutionnelle, cela passe à mon sens par faire en sorte qu'il y ait du travail pour les Polynésiens, que l'on crée de la richesse, de l'emploi et de l'activité économique. Que l'on puisse former les jeunes pour qu'ils aient le niveau pour occuper ces emplois dans l'économie. Ensuite, il faut se poser la question de savoir de quels outils institutionnels on a besoin. Cela me semble être la logique, la méthode. Mais c'est une opinion personnelle. (…)”
 
Le résultat récent des dernières élections législatives, avec la victoire d'un parti indépendantiste, est-il de nature à faire évoluer les relations de l'État avec la collectivité ou du moins la vision de l'État vis-à-vis de la situation statutaire de la Polynésie française ?
 
“Nous continuerons à travailler avec le Pays. Ce sont des élections législatives qui se sont tenues et d'ailleurs, pour avoir suivi la campagne, l'indépendance n'était pas me semble-t-il au cœur du sujet. C'est un peu plus compliqué à analyser. Mais cela ne remet absolument pas en cause les liens entre l'État et le Pays pour continuer à travailler. Le gouvernement local est élu. Il a sa majorité. Les députés polynésiens porteront leurs voix et leur message, puisque c'est pour cela qu'ils ont été élus à l'Assemblée nationale.”
 
Une évolution de la situation politique polynésienne ne changerait donc en rien la vision de l'État vis-à-vis de la collectivité ?
 
“Je crois –pour travailler dans les outre-mer depuis plusieurs années consécutives et vraiment sans vouloir rentrer dans une mécanique politique– que la situation des territoires ultra-marins est vue de très près par le gouvernement national. Quand je vous parlais des mesures annoncées par le Président de la République, tout a été mis en œuvre en un an. Ça ne montre pas un désintérêt. Quand on voit l'appui financier qui a été apporté, alors que ce n'est pas dans la compétence de l'État mais que c'est normal au titre de la solidarité républicaine, on ne peut pas dire que le gouvernement ne s'intéresse pas au territoire. Il s'agit de solidarité nationale. Quand on aide des entreprises, quand on apporte des renforts humains en Polynésie avec le même degré de priorité que le territoire national, quand les doses de vaccins ont été livrées ici –et proportionnellement, nous en avons eu plus et il était plus facile de se faire vacciner en Polynésie qu'en métropole– cela ne montre pas un abandon des territoires ultra-marins par l'État. Lorsqu'ici on engage 207 milliards de Fcfp d'apports de l'État pour financer des enseignants, des internes pour l'hôpital, des infirmiers pour les atolls, lorsqu'on dote le Pays et les communes en fonctionnement, lorsqu'on apporte des appuis à l'investissement au travers des différentes conventions, ça ne dénote pas un désintérêt et un désengagement de l'État.”
 
Pour finir sur un ton plus léger, avez-vous été marqué par votre mission en Polynésie française et que regretterez-vous des spécificités de cette collectivité ?
 
“Il se trouve que j'ai toujours eu un intérêt très fort pour les outre-mer. En début de carrière, je n'ai pas occupé de postes ultra-marins mais j'ai servi dans des ministères sur des dossiers concernant les outre-mer. Ces dernières années ensuite, j'ai été en poste à La Réunion, à Mayotte et ici. J'ai été directeur de cabinet de la ministre des Outre-mer. Donc ça me marque. La Polynésie aussi m'a marqué. D'abord parce qu'il y a eu la crise sanitaire et qu'humainement ça été quelque chose de dur à traiter avec les décès et les malheurs qu'il a pu y avoir sur le territoire. C'est aussi un territoire où il y a beaucoup de choses à faire avec des spécificités. (…) Je crois beaucoup aux projets économiques, aux projets sociaux qu'il faut traiter. Et après en se posant la question institutionnelle. Bien évidemment, il ne faut pas l'occulter. Parce que je crois beaucoup à une autonomie forte. Il faut qu'elle fonctionne pleinement et que tous les outils soient utilisés. Et on le voit, c'est aussi le pendant dans un contexte mondial déstabilisé avec des crises sanitaires et économiques, qu'un État fort doit être en capacité d'apporter un appui. Je suis viscéralement attaché à ces territoires d'outre-mer qui sont véritablement une part de notre République. Ce n'est pas de la langue de bois. C'est une richesse de notre République. Il n'y a pas un autre État dans le monde qui a cette approche. C'est pour cela que la Polynésie m'a marqué. Parce que c'est un territoire qui fonctionne différemment des autres du fait de ce statut d'autonomie. Mais c'est, je crois, un bon équilibre qui permet aux Polynésiens d'avoir leur liberté de choix dans un ensemble plus vaste.”
 

Remboursement des maladies radio-induites : “La réponse est favorable”

Sur le dossier du nucléaire, le haut-commissaire s'est également exprimé au sujet de la prise en charge par l'État des frais engagés par la CPS pour les maladies radio-induites. “Pour les personnes reconnues victimes, les frais engagés par la CPS faisaient l'objet d'un remboursement par le Civen jusqu'en 2016. À cette date, un arrêt du Conseil d'État est venu mettre fin à cette pratique, considérant que la loi Morin était basée sur un principe de solidarité nationale et non de responsabilité de l'État”, rappelle Dominique Sorain. “La question s'est posée lors de la visite du Président de la République de remettre en place ce système : La réponse est favorable.”

Reste à discuter de la méthode de calcul. Et le sujet est “ouvert”, insiste le haut-commissaire. Mais il ne concernera a priori que les dossiers reconnus par le Civen. “Pour les dossiers que le Civen a acceptés, il faut maintenant rechercher les moyens de voir comment on peut indemniser la CPS.” Quid des situations de personnes atteintes de maladies radio-induites qui auraient été soignées, mais qui n'auraient pas déposé de demande d'indemnisation auprès du Comité ? “C'est aussi pour ça qu'on fait tout pour que les personnes puissent déposer les dossiers”, répond le haut-commissaire. Restera donc à trancher la question de savoir si l'indemnisation se fera en fonction des frais réels ou par un système forfaitaire. “Ce travail devrait commencer dans les semaines qui viennent”, assure Dominique Sorain.

Rédigé par Antoine Samoyeau le Jeudi 21 Juillet 2022 à 21:10 | Lu 2547 fois