Tahiti Infos

"L'assemblée, c'est une boîte aux lettres"


Tahiti, le 25 novembre 2022 – Réunis à la permanence du parti à Papeete, les trois leaders du A Here ia Porinetia -Nicole Sanquer, Nuihau Laurey et Félix Tokoragi- ont évoqué vendredi matin le sort de leur proposition de commission d'enquête, validée la veille en commission plus de sept mois après avoir été déposée à l'assemblée. Plus généralement, le parti vert et blanc tance la faible activité législative de l'institution…
 
Les trois leaders du A Here ia Porinetia ont organisé vendredi matin une conférence de presse à la permanence du parti à Papeete. L'occasion de revenir sur le vote de la loi du Pays sur le cannabis thérapeutique et d'anticiper celui du budget 2023, mais surtout d'évoquer le devenir de la proposition de création d'une "commission d'enquête sur la gestion de la crise sanitaire en Polynésie française". Déposée le 16 avril 2022 sur le bureau de l'assemblée par les élus A Here, cette proposition de délibération a obtenu un avis favorable en commission santé jeudi matin à l'assemblée, avec le vote du président Tapura de la commission John Toromona.
 
Longue attente
 
C'est le tāvana de Makemo et vice-président du parti, Félix Tokoragi, qui s'est lancé le premier sur cette commission d'enquête. "L'objectif, c'est de faire la lumière sur les deux années de gestion de crise Covid du Pays." L'élu des Tuamotu dénonce déjà des "carences" dans les îles, dans les hôpitaux et veut également aller sur le terrain de la gestion économique du pays pendant la crise. La présidente du parti, Nicole Sanquer, évoque également les "effets secondaires du vaccin" et les conséquences psychologiques de la crise sanitaire sur les familles. Un conflit s'annonce déjà sur la présidence de cette commission, réclamée par le A Here initiateur et par le Tapura majoritaire.
 
Mais les élus A Here ont surtout insisté vendredi sur les efforts déployés par l'assemblée et son président Gaston Tong Sang pour retarder l'inscription à l'agenda législatif de cette proposition de délibération. Déposée il y a plus de sept mois, elle n'avait pas été inscrite lors de la dernière session administrative et Nicole Sanquer a dû faire appel au règlement intérieur pour contraindre le président de l'assemblée à l'inscrire à la session budgétaire. Reste que la proposition de délibération doit encore être votée à l'assemblée où le Tapura est majoritaire, et qu'elle n'est toujours pas inscrite au planning de la dernière séance du 8 décembre prochain… "Comme ma proposition de loi sur le Pacs", a rappelé Nicole Sanquer. "On entend le président du Pays reprocher aux élus de l'opposition de ne rien faire, mais quand on veut déposer des textes, la majorité nous en empêche", a conclu l'autre vice-président du parti vert et blanc, Nuihau Laurey.
 
Laurey en sniper
 
Parmi les deux autres sujets à l'ordre du jour, Nicole Sanquer a réexpliqué ses "doutes" émis en séance sur la légalité de la loi du Pays sur le cannabis. "Ce texte est plutôt de l'opportunisme politique avant les élections", balaie l'ancienne députée. Mais c'est surtout sur l'examen à venir du budget et plus généralement sur l'organisation du travail législatif à l'assemblée en cette fin de mandature que les cadres du A Here ia Porinetia ont focalisé leurs critiques. "L'assemblée n'est même plus une chambre d'enregistrement, c'est une boîte aux lettres", a raillé le punchliner Nuihau Laurey en évoquant le programme de la séance du 8 décembre prochain qui doit être consacrée à l'examen du budget 2023. Avec le volumineux projet de budget et ses comptes spéciaux, la séance compte 31 textes au total. Et on y retrouve pas moins de quatre rapports de la chambre territoriale des comptes que l'institution gardait dans ses tiroirs… Ceci à cinq jours de la clôture de la session.
 
"La session budgétaire n'a jamais compté aussi peu de séances. Sans compter le nombre de procédures simplifiées, parce qu'il faut vite repartir à Bora Bora", tacle Nuihau Laurey à l'adresse du président de l'institution et maire de la Perle du Pacifique. Mais surtout, l'élu dénonce les absences de nombreux élus partis au Vietnam pour participer à l'assemblée de la Francophonie en pleine session budgétaire. "On a demandé à ajouter une séance, c'est impossible. Le président et les quatre vice-présidents sont indisponibles", poursuit l'élu. "Est-ce que c'est vraiment nécessaire d'aller se promener en pleine session budgétaire ?" Nicole Sanquer embraye en expliquant qu'une commission des institutions s'est tenue la semaine dernière avec… deux élus.
 
"C'est une boite aux lettres et une agence de voyage", conclut Nuihau Laurey, désormais adepte de la petite formule efficace. "Nous on propose de réduire le nombre de représentants à l'assemblée. Mais vu qu'ils ne sont jamais là, ça ne va même pas se voir."
 

Rédigé par Antoine Samoyeau le Vendredi 25 Novembre 2022 à 12:53 | Lu 1957 fois