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L'appel à "l'union sacrée" pour défendre la défiscalisation


Olivier Kressman, président du Médef et Christophe Plée président de la CG PME de Polynésie française demandent aux élus territoriaux, aux parlementaires polynésiens, au gouvernement et même au haussariat de défendre la défiscalisation dont la fin est annoncée pour décembre 2018 dans le projet de loi de finances pour 2016. Le temps est compté, la loi de finances 2016 nationale devrait être adoptée au plus tard le 18 décembre prochain. Les textes concernant l'outremer seront abordés dans le courant du mois d'octobre à l'Assemblée nationale puis au Sénat.
Olivier Kressman, président du Médef et Christophe Plée président de la CG PME de Polynésie française demandent aux élus territoriaux, aux parlementaires polynésiens, au gouvernement et même au haussariat de défendre la défiscalisation dont la fin est annoncée pour décembre 2018 dans le projet de loi de finances pour 2016. Le temps est compté, la loi de finances 2016 nationale devrait être adoptée au plus tard le 18 décembre prochain. Les textes concernant l'outremer seront abordés dans le courant du mois d'octobre à l'Assemblée nationale puis au Sénat.
PAPEETE, 30 septembre 2015 - A peine le projet de loi de finances pour 2016 était publié par le ministère des finances en France au cours de la nuit de mardi à mercredi, que les organisations patronales se sont penchées sur les articles qui concernent les aides fiscales en faveur des investissements en Outre-mer. La situation n'est pas favorable aux collectivités du Pacifique.

Le thème est désormais récurrent. Depuis plusieurs années déjà les organisations patronales de Polynésie française (mais c'est pareil en Nouvelle-Calédonie et Wallis et Futuna) s'inquiètent de la fin annoncée de la défiscalisation. Ils pensaient avoir réussi à plaider leur cause non seulement auprès des parlementaires nationaux, mais aussi de la ministre des Outre-mer George Pau-Langevin et même directement auprès du président de la République François Hollande lors de sa visite en novembre 2014, en Nouvelle-Calédonie. "Dans les collectivités d'outre-mer du Pacifique qui ne sont pas des départements d'outre-mer la défiscalisation est le seul outil d'aide à l'investissement des entreprises. Nous n'avons pas de crédits d'impôt, nous n'avons pas les aides européennes, aussi nous n'avons eu de cesse d'expliquer l'importance de ce dispositif. La ministre des Outre-mer nous avait dit qu'une continuité serait assurée. Or, nous apprenons par le projet de loi de finances que c'est seulement prorogé d'une année jusqu'en fin 2018" commence par exposer Olivier Kressmann le président du Médef de Polynésie.

Une prolongation d'un an qui n'est visiblement pas la "bonne nouvelle" que les patrons du Pacifique attendaient. En effet, selon eux et compte tenu des délais importants -entre 12 et 18 mois au moins pour obtenir un agrément du ministère des finances à Bercy quand il s'agit de gros investissements- ce délai ne servira à rien. "On était déjà dans le mur, quand la défiscalisation s'arrêtait à 2017 c'était déjà trop court pour renouveler, par exemple, la flotte d'Air Tahiti ou même celle d'Air Tahiti Nui. Cette fois on nous dit que la fin est en 2018 mais ça ne change rien. J'ai l'impression qu'on nous donne des miettes" poursuit Olivier Kressmann dont le discours s'échauffe au fur et à mesure que la conférence de presse décidée dans l'urgence, mercredi, par les représentants des patrons et des entreprises (la CCISM était également présente) se prolonge.

ET APRES 2018 ? IL N'Y A PLUS RIEN !

Ce qui inquiète le plus ces patrons ? Une petite phrase glissée dans l'exposé des motifs de l'article 43 du projet de loi de finances. Une petite phrase qui fait état de "l'extinction de certains régimes d'aide fiscale à l'investissement outre-mer". Pour les organisations patronales polynésiennes il faut comprendre qu'à l'issue des systèmes de défiscalisation encore en cours aujourd'hui, il n'y aura rien d'autre, "il n'y a aucune mesure de transition proposée". Pourtant, depuis plusieurs années, ces organisations patronales s'évertuent à présenter à Paris, au gouvernement ou aux élus nationaux les spécificités des territoires ultramarins du Pacifique. Car, si les départements d'outremer ont obtenu en lieu et place de la défiscalisation des crédits d'impôt, ce système ne peut pas fonctionner dans les collectivités d'outremer en raison de leurs statuts d'autonomie (voir en encadré). "Il n'y a aucune amorce de réflexion pour proposer autre chose dans les collectivités d'outremer. Pour nous, le temps de mener cette réflexion il faudrait poursuivre la défiscalisation nationale actuelle dans l'idéal jusqu'en 2025, comme la défiscalisation locale, ou au plus court jusqu'en 2022 et trouver autre chose, un autre dispositif pour la suite".

Car, faute de ce soutien aux entreprises par la défiscalisation (qui peut atteindre jusqu'à 25% de du montant total d'un investissement), nombre d'entreprises n'auraient pas pu ni se développer ni conquérir de nouveaux marchés et encore moins renouveler des équipements dont le coût dans les territoires ultramarins du Pacifique, très éloignés de tout, est nettement plus élevé que dans les DOM (départements d'outremer) et a fortiori sur le territoire métropolitain. Et de citer l'exemple de l'Aranui 5. Ce navire de fret et de croisière de luxe doit arriver en novembre prochain en Polynésie française : l'investissement total dépasse les 4 milliards de Fcfp, mais grâce aux dispositifs de défiscalisation (nationale et locale) obtenus dès l'année 2012, moins d'un quart de la somme a été réellement déboursée par l'armateur pour en faire l'acquisition.

"Nous sommes surpris de cette orientation prise dans le projet de loi de finances 2016 qui est différent de ce qui avait été amorcé. Aussi, il y a urgence aujourd'hui à mobiliser la classe politique polynésienne dans son ensemble et plus particulièrement le gouvernement local et le président Fritch pour demander à ce que le dispositif de défiscalisation soit prorogé jusqu'en 2022" détaillait encore Olivier Kressmann. Pour la CG PME, Christophe Plée, il "en va du droit de la Polynésie française à la solidarité nationale car la défiscalisation est un outil de rattrapage économique". Aussi, il "demande l'union sacrée de l'ensemble des politiques pour défendre la défiscalisation auprès des plus hautes autorités de l'Etat", une "union sacrée" qui s'exprimera à travers les trois territoires ultramarins du Pacifique, tous logés à la même enseigne.

DOM, COM y a-t-il une méconnaissance de Paris ?

Visiblement sur la défiscalisation, il y a parfois entre Paris, Papeete et Nouméa un véritable dialogue de sourds. Inquiets, depuis longtemps de l'avenir du dispositif pour les territoires du Pacifique, les organisations patronales polynésiennes ont interpellé plusieurs fois les autorités nationales à ce sujet. Car, rien n'est prévu pour remplacer cette aide directe à l'investissement des entreprises, alors que dans les DOM (départements d'outremer) les crédits d'impôts sont venus pallier la fin de la "défisc". Mais faute d'être soumises à la fiscalité nationale, ce régime particulier ne s'applique pas aux collectivités d'outremer à statut d'autonomie. Double effet de cette différence de traitement les DOM (départements d'outremer) bénéficient d'aides européennes parce qu'ils sont des RUP (régions ultra périphériques) de l'Europe. Des aides européennes qui n'existent pas dans les collectivités du Pacifique qui sont, elles, classées en PTOM (Pays et territoire d'outremer).

Rédigé par Mireille Loubet le Mercredi 30 Septembre 2015 à 17:27 | Lu 1612 fois