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Jean-Marc Regnault signe "Pouvana’a et de Gaulle, la candeur et la grandeur"


PAPEETE, le 21 octobre 2016 - L’ouvrage de Jean-Marc Regnault, paru chez Api Éditions, montre "la volonté du gouvernement central à écarter Pouvana'a quitte à violer les règles" et "l’arrestation de ce dernier dans le but d’installer le Centre expérimentation du Pacifique". Les preuves se trouvent dans des archives déclassifiés que l’auteur a pu consulter.

C’est le quatrième ouvrage de Jean-Marc Regnault. Pouvana’a et de Gaulle, la candeur et la grandeur est "plus qu’une biographie, c’est une étude de la vie politique entre 1945 et 1960", résume l’auteur. Cet ouvrage est né naturellement grâce à l’accès aux derniers documents d’intérêt dans l’affaire Pouvana’a a Oopa, et notamment au fonds Foccart. "Grâce aux deux derniers présidents de la République, on sait désormais qui a commandité l’arrestation de Pouvana’a, on a le compte-rendu du conseil des ministres décidant de se débarrasser de l’homme politique polynésien." Cet ouvrage, l’auteur ne l’avait pas imaginé lorsqu’il a commencé ses recherches en 1985.

"C’était encore des sujets tabu"


À cette époque, Jean-Marc Regnault était professeur à l’École normale, chargé de préparer des cours sur l’histoire. "Il y avait alors peu de documents publics sur l’histoire contemporaine en Polynésie, en particulier sur Pouvana’a a Oopa et le Centre d’expérimentation de Polynésie. On avait quelques coupures de presse, c’était encore des sujets tabu. J’ai donc commencé des recherches plus poussées pour avoir accès à des documents plus officiels." Ses premiers éléments ont donné naissance à un premier ouvrage. "Ensuite, à chaque fois que je me replongeais dans ce travail de recherche je découvrais de nouveaux éléments." Des éléments qu’il a souhaité porter à la connaissance de tous. D’où la publication d’ouvrages réguliers.

Pour avoir accès aux documents officiels, Jean-Marc Regnault a frappé à de nombreuses portes, aux ministères de l’Intérieur, de la Justice, des Armées, de l’Outremer… Il a essuyé beaucoup de refus. Mais, le temps a joué en sa faveur. "Je recevais des autorisations de consultation au compte-goutte", se rappelle-t-il. En 2003, il s’est tourné vers la classe politique polynésienne pour faire ouvrir les archives. Divisée, la classe politique n’a pas apporté son soutien. Seuls Daniel Millaud, ancien sénateur et suppléant de Pouvana’a O Oopa et Philip Schyle, l’actuel marie d’Arue, ont répondu présent.

Écarter Pouvana’a pour préparer le CEP

Finalement, en 2012, le fonds Foccart (de Jacques Foccart, l’homme politique de l’ombre des années de Gaulle), a été rendu accessible. Jean-Marc Regnault s’est rendu sur place pour le consulter, la classe politique polynésienne s’est rassemblée. Depuis, l’auteur peut désormais affirmer : "la volonté du gouvernement central à écarter Puvana’a quitte à violer les règles" et "l’arrestation de ce dernier dans le but d’installer le Centre expérimentation du Pacifique".

Il poursuit : "l’arrestation de l’homme politique polynésien n’était pas une vengeance ou un acte en lien avec le referendum mais c’était bien pour préparer le CEP. En 1957, lorsque la France a décidé de se doter de l’arme nucléaire, le pays savait que le Sahara n’était qu’un espace d’expérimentation provisoire. La première décision pour préparer les essais a été la construction de l’aéroport, la seconde l’arrestation de Pouvana’a a Oopa."

Concernant le procès, le dossier est entre les mains de la Cour de cassation. "En 2014, une demande de révision a été envoyée à la garde des Sceaux. Celle-ci a saisi le mercredi 18 juin la commission de révision des condamnations pénales d’une requête en révision de la condamnation de Pouvana’a. La Cour de cassation enquête et pourrait rendre son jugement d’ici 2 à 3 ans."

Enfin, "pour revenir sur l’innocence de l’homme politique, le sujet est complexe. On lui reproche d’avoir fait incendier la ville de Papeete. Or, quand le capitaine de gendarmerie a été appelé dans la nuit du 10 au 11 octobre 1958, il ne savait rien des événements. Pouvana’a était suivi et écouté depuis un moment. Cela parait peu probable que la gendarmerie n’ait rien su des incendies si Pouvana’a était vraiment derrière tout ça."


L’auteur vu par son éditeur

Jean-Marc Regnault, né en novembre 1944 à Lille d’un père français et d’une mère tchèque à exercer la profession d’instituteur de 18 à 25 ans. Il a obtenu l’agrégation en 1974 et est devenu professeur d’histoire-géographie. En 1984, il a obtenu un poste à l’École normale de Papeete où il a été chargé de la formation des instituteurs et des professeurs de collège.
Un territoire d’outre-mer ayant la possibilité d’adapter les programmes scolaires, il s’est lancé dans la recherche documentaire et a écrit des manuels scolaires destinés à la Polynésie française. Il a préparé une thèse sur la vie politique et les institutions de la Polynésie française qu’il a soutenue en 1994.
Devenu maître de conférence il a enseigné à l’université du Pacifique, en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française. En 1999, il a obtenu l’habilitation à diriger des recherches. Il a écrit une douzaine d’ouvrages sur l’histoire du Pacifique et une cinquantaine d’articles. Retraité depuis septembre 2005, il continue à conseiller les chercheurs qui travaillent dans la région, à écrire des livres et signer des articles.


Dédicace

L’auteur le dédicacera "Pouvana’a et de Gaulle, la candeur et la grandeur" à la librairie Archipels demain samedi 22 octobre de 9 heures à midi.


Rédigé par Delphine Barrais le Vendredi 21 Octobre 2016 à 10:39 | Lu 2082 fois