Tahiti Infos

Jacky Bryant : "Notre fenua a grand besoin d’un Yannick Jadot"


Tahiti, le 04 avril 2022 - Statut d'autonomie, conséquences des essais nucléaires et transition énergétique. À l'approche du premier tour de l'élection présidentielle, Tahiti Infos a adressé six questions aux douze candidats nationaux dont six sont représentés localement. Premier à répondre à cette série de questions : Jacky Bryant, le porte-parole du candidat Europe Ecologie-Les Verts à la présidentielle, Yannick Jadot. Il assure notamment que l'engagement de son candidat en matière de transition énergétique est "incontestable" et qu'une "vaste étude" doit être menée sur toutes les personnes nées pendant et après les essais nucléaires.

La Polynésie française dispose d'un statut de large autonomie au sein de la République. Comment vous positionnez-vous vis-à-vis de la situation statutaire actuelle et de son évolution éventuelle ?
 
"L’intérêt supérieur de l’État a été la raison, le motif, le fondement des différentes modifications statutaires, avec pour unique objectif, maintenir la présence française dans le Pacifique. Vitale pour les essais nucléaires français, aujourd’hui et demain pour des raisons de géopolitique. Nos 5 millions de km2 de la ZEE et notre espace aérien immense sont l’objet d’une attention tout à fait particulière de l’État. Ils sont vitaux pour honorer sa place de puissance mondiale."
 
En particulier, la Polynésie française est inscrite depuis 2013 sur la liste des territoires non- autonomes de l'ONU. Pensez-vous que la France doit prendre part à ce processus aux Nations Unies ?
 
"La question ne se pose donc pas, de facto oui, bien sûr. Eu égard de la position de la France au sein de l’ONU si prompte à donner des leçons de démocratie au reste du monde, il y a lieu de s’inquiéter du silence de l’État. La manipulation, la désinformation, l’intox, l’émotion ont servi de plate-forme aux gouvernements autonomistes successifs, pour empêcher d’ouvrir ce débat démocratique de droit constitutionnel de manière dépassionnée, au même titre que le nucléaire. Ces mêmes  responsables politiques, farouchement opposés aux anti-nucléaires des années durant, ont confessé avoir menti aux Polynésiens sur l’innocuité des tests atomiques en novembre 2018. Neuf ans après, M. Édouard Fritch, son gouvernement, sa majorité espèrent la venue de la Commission d’enquête après la dernière AG de l’ONU ! Va-t-il refaire le coup du mensonge ? S’émancipe-t-il pour autant avec ce processus onusien ? Non, évidemment. Tout est question de calcul d’intérêts de l’institution étatique française. Jamais Fritch n’aurait eu le courage politique de le faire… sans y être autorisé !"
 
Sur le sujet des conséquences des essais nucléaires menés entre 1966 et 1996 en Polynésie française, le système d'indemnisation actuelle de la Loi Morin vous convient-il ? L'État doit-il accompagner davantage la collectivité sur ce dossier ?
 
"Le traitement et les réponses apportés aux victimes des essais nucléaires depuis la Commission d’enquête de l’Assemblée de Polynésie le 15 juillet 2005 sont indignes, tant pour les victimes que pour leurs familles. Formalités administratives, procédures judiciaires priment sur la prise en charge médicale du malade. Tout malade reconnu porteur d’un des 23 types de cancers identifiés dans la Loi Morin "modifiée" n’a pas à souffrir du mépris de règles d’organisation technocratiques. Sa prise en charge médicale est la priorité. Tout enfant de la deuxième génération, né pendant et après les essais, doit faire l’objet d’une  vaste étude sur tout le territoire du fenua."
 
En tant que président de la République, comment définiriez-vous le rôle de l’État dans ses compétences régaliennes en Polynésie française (armée, relations internationales, zone économique  exclusive...) ?
 
"À ces compétences à caractère régalien, il y a des sujets qui sont du quotidien des Polynésiens, l’océanisation des cadres, la protection des terres soumises à la spéculation, la place du reo mā'ohi dans nos vies… Sauf à imaginer que l’hymne du fenua, les médailles de l’Ordre de Tahiti nui… attributs d’un état indépendant, suffisent à revendiquer d'un statut de large autonomie au sein de la République."

 
Comment l'État peut-il accompagner la Polynésie française dans sa transition énergétique, notamment pour atteindre les objectifs environnementaux fixés au niveau national ?
 
"L’engagement de Yannick Jadot sur toutes ces questions liées à la transition énergétique est incontestable. Nos besoins en matière énergétique diffèrent par notre situation géographique d'avec la France. Nonobstant le solaire, la ressource pour une transition énergétique propre, renouvelable, continue au même titre que le SWAC, est l’énergie thermique des mers, ETM, pour la production électrique, rendant le coût de production de l’hydrogène compétitif pour nos moyens de transports, terre et mer. La recherche, le développement, l’industrialisation, la commercialisation est la réponse la plus  pertinente d’une collaboration de bon sens avec l’État."
 
Sur le principe d'une carte blanche offerte à tous les candidats à l'élection présidentielle, quelles sont les propositions spécifiques que vous envisagez pour la Polynésie française ?
 
"Tous les indicateurs liés aux effets prévisibles à haut risque du changement climatique, et mis en lumière par les travaux du GIEC, clignotent au rouge. En prenant conscience au plus haut niveau de l’État des risques de mouvements de populations locales, de l’aménagement du fenua provoqué par ces déplacements, de la sécurisation de nos infrastructures publiques installées sur nos littoraux, de la mise en sûreté du port de Papeete, de l’aéroport international de Tahiti-Faa'a… avec la montée des eaux, conséquence du réchauffement, notre fenua a grand besoin d’un Yannick Jadot, écologiste, président de la République."
 
 

Rédigé par Garance Colbert le Mardi 5 Avril 2022 à 03:00 | Lu 995 fois