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Grève générale : Le rendez-vous de la dernière chance


Tahiti, le 22 novembre 2021 – Gouvernement et syndicats signataires du préavis de grève générale se sont réunis pour un quatrième jour de négociations lundi. Des discussions “apaisées” mais de modestes avancées en vue d’un protocole de sortie de crise. Une ultime rencontre est prévue mardi avant l’échéance du délai de préavis.
 
Un quatrième jour de négociations et encore des avancées qui restent timides. Les syndicats signataires du préavis de grève générale ont de nouveau été reçus lundi après-midi à partir de 16h30, pour poursuivre les discussions entamées samedi sur la base du dernier projet de protocole de sortie de crise présenté par le gouvernement. Deux points essentiels ont été abordés lundi : la revalorisation du Smig et le projet de réforme de la gouvernance du système de Protection sociale généralisée (PSG). Mais des différends subsistent et laissent le champ libre pour une ultime rencontre mardi à partir de 17 heures. Faute d’accord, la grève générale pourrait débuter dès mercredi à zéro heure.

Aussi, lundi les syndicats ont-ils poursuivi la tournée des secteurs stratégiques en prévision de négociations qui viendraient à capoter le lendemain. “On fait le tour de nos amis”, ironisait lundi Patrick Galenon, le secrétaire général de la CSTP-Fo. Cyril Le Gayic, le leader de la CSIP n’a d’ailleurs pas participé à la rencontre avec le gouvernement, tout occupé à galvaniser ses troupes sur le terrain. En cas de grève, des débrayages dans le secteur des hydrocarbures et parmi les pompiers de l’aéroport de Tahiti-Faa’a seraient suffisants pour maintenir une pression optimale, même en cas de faible mobilisation.

On est dans la rédaction. On complète, on ajuste le protocole présenté samedi”, assurait optimiste le ministre de l’Economie Yvonnick Raffin, lundi soir. L'ultime séance de négociations, ce mardi, promet d’être longue. Ce sera le rendez-vous de la dernière chance. Sur les cinq points de revendication communs à l’ensemble des préavis de grève déposés en début de semaine dernière, les avancées sont pour l’instant trop modestes pour chasser le risque de grève générale.
 
Sur la gouvernance de la PSG
 
C’est un point de blocage essentiel. Le projet de loi du Pays visant à réformer le système de gouvernance de la Protection sociale généralisée (PSG). Les préavis de grève dénoncent “la mort de la gestion paritaire au profit d’une gouvernance politique” avec l’entrée dans un conseil d’administration limité à 15 membres, de cinq représentants du gouvernement, aux côtés des cinq du patronat et des cinq des salariés. Si le gouvernement propose de concéder la présidence du conseil d’administration au ministre en charge de la protection sociale généralisée “soucieux de ne pas bousculer les équilibres convenus entre partenaires sociaux”, un problème demeure pour les syndicats avec la mise en place du système tripartite envisagé : comme cela a été admis durant les négociations, avec ce projet de loi réformant la gouvernance de la PSG, le Pays siègerait au sein du conseil d’administration en tant qu’employeur public. Et cette qualité cause un déséquilibre de représentation et place les syndicats de salariés en infériorité numérique. Les syndicats demandent cinq représentants supplémentaires. De 15 membres le conseil d’administration passerait à 20, avec 10 représentants des salariés. Le gouvernement propose de gonfler leur représentation au sein du Comité stratégique de la protection sociale universelle. Proposition balayée par les syndicats.
 
Sur la revalorisation du pouvoir d’achat
 
Le gouvernement a proposé samedi une augmentation du salaire minimum interprofessionnel garanti (Smig) de 2% dès le 1er janvier 2022, puis une éventuelle revalorisation de 1% supplémentaire en juillet 2022, si l’indice des prix à la consommation devait évoluer à la hausse. Les syndicats demandent 4% dès le 1er décembre et ne considèrent pour l’heure la proposition du Pays que comme “un maigre rattrapage”. “Nous restons sur une réévaluation au 1er janvier”, martelait lundi soir le ministre de l’Economie, Yvonnick Raffin. Sur ce point, pour l’instant, le bras de fer est maintenu.
Une réflexion tripartite est par ailleurs proposée par le gouvernement aux partenaires sociaux, dès le 1er décembre, pour évaluer l’impact d’une revalorisation salariale par secteur avec la nécessaire harmonisation des grilles salariales pour les petites catégories (1 à 5) dans les 14 secteurs d’activités de l’économie polynésienne.” 
 
Sur la caisse de chômage
 
L’intersyndicale demande la mise en place “immédiate” d’un fonds d’aide aux salariés ayant perdu involontairement leur emploi. Le CSTP-Fo propose au Pays de consacrer 2,5 milliards de Fcfp pour son financement. Il s’agirait de la moitié des dépenses engagées en 2020 par le Pays pour financer les contrats aidés CAE. “On a renvoyé tout cela à des discussions plus apaisées”, explique Yvonnick Raffin, en évoquant des discussions tripartites dans les prochaines semaines et une nécessaire réflexion pour le financement de ce dispositif. Le projet de protocole présenté samedi évoquait déjà “l’engagement d’une réflexion sur le traitement de la compensation de la perte d’activité pour les salariés”. 
 
 Sur l’obligation vaccinale

Si c’est l’autre gros point d’achoppement, la loi sur l’obligation vaccinale n’aura pas été évoquée lundi. Le projet de protocole d’accord présenté samedi promet “un discernement bienveillant” de la part des services chargés des contrôles à partir du 23 décembre. Les syndicats demandent l’abrogation pure et simple de ce texte. “On ne lâchera pas”, martelait lundi matin Atonia Teriinohorai, secrétaire général de O oe to oe rima. Le texte pourrait être amendé en faveur des dockers qui travaillent en plein air. Le président Fritch a beaucoup insisté jeudi pour rappeler l’utilité de cette règlementation en termes de santé publique. Les syndicats dénoncent une mise en œuvre chaotique en entreprise et les pressions subies par les salariés avec la mise en place de ce texte. “On attend des réponses qui nous conviennent”, indiquait lundi Patrick Galenon. Dans la négociation à tiroirs engagée depuis la semaine dernière, cette loi prend l’allure de l’ultime point de désaccord qui pourrait être à l’origine du mouvement social dès mercredi.
 
Sur la protection de l’emploi local

Si la demande de mise en œuvre de la loi sur la protection et la promotion de l’emploi local est une des cinq revendications communes à l’ensemble des préavis de grève générale déposés en début de semaine, c’est aussi le plus simple à résoudre. Le gouvernement s’est en effet engagé à mettre en œuvre les dispositions de ce texte dès avril 2022. Dans le protocole d’accord présenté samedi le gouvernement propose au demeurant un “examen partagé des modalités de mise en œuvre” de la loi pour la promotion et la protection de l’emploi local.

Rédigé par Jean-Pierre Viatge le Lundi 22 Novembre 2021 à 20:23 | Lu 3576 fois