Tahiti, le 13 juin 2025 – Plaidant la recherche d’un “consensus” avec les élus de l’opposition, Antony Géros a finalement repoussé au 3 juillet prochain “au plus tard”, l’adoption de son texte visant à créer une commission d’enquête pour évaluer la “valeur” de la Polynésie. Un report acté après plus de trois heures de débat et une suspension de séance d’une heure, salué par le Tapura et Ahip. Vent debout contre ce texte, ils souhaitent une rédaction plus précise afin qu’il réponde à de réels objectifs pour que cette commission ne soit pas détournée en outil politique servant l’idéologie indépendantiste.
Reporté. Après plus de trois heures de débat dans l’hémicycle ce jeudi, la proposition de délibération portée par le président de l’assemblée, Antony Géros, visant à créer une commission d’enquête destinée à “recueillir tous les éléments d’information relatifs aux enjeux géostratégiques, environnementaux, économiques et financiers de la Polynésie française et de sa zone économique exclusive” n’a pas été votée. Après une longue suspension de séance de près d’une heure pendant laquelle la majorité et les élus de l’opposition se sont concertés, le président de l’assemblée a annoncé son retrait et son report “au plus tard le 3 juillet prochain”. Réfractaires à la notion même d’une “commission d’enquête” partisane, Tapura et Ahip avaient plaidé pour une “mission d’information”, plus indépendante, pluraliste, et transparente, estimant que c’était le véhicule législatif le plus approprié. Sauf que les crédits dévolus à une mission d’information sont plafonnés à deux millions de francs quand cette commission d’enquête est dotée d’un budget de 25 millions.
“Mais en changeant la formulation, on peut y arriver. On ne sera pas opposés à une commission d’enquête dans la mesure où elle est formulée correctement. On n’a rien à cacher et comme vous, nous voulons des réponses”, a finalement réagi Tepuaraurii Teriitahi (Tapura), remerciant Antony Géros d’avoir “pris en compte” leur demande. Même son de cloche de la part de Nuihau Laurey (Ahip) qui a lui aussi plaidé pour une “rédaction qui satisfasse tout le monde”.
25 millions de deniers publics au service d’un parti
En effet, dans leurs interventions précédant cette décision de report, les élus de l’opposition ont fustigé la méthode employée par le locataire du perchoir à l’initiative de ce texte. D’abord Nicole Sanquer qui a souligné qu’à l’instar de la commission spéciale de décolonisation qui avait fait l’objet d’un recours, cette nouvelle commission d’enquête pourrait suivre le même chemin puisqu’elle ne répond pas non plus aux critères définis dans le règlement intérieur. Des critères qui précisent que toute commission d’enquête doit recueillir des éléments d’information, soit sur des faits déterminés, soit sur la gestion des services publics. “Monsieur le président, éclairez-moi parce que je ne vois rien de tout ça”, a-t-elle lancé, estimant que ces travaux doivent justement s’inscrire dans la continuité de ceux de la commission de décolonisation puisque l’état des lieux attendu est “justifié par la nécessité d’éclairer les choix futurs du Pays en matière de développement économique, d’autonomie et de partenariat préalable à la décolonisation”.
Et de pointer du doigt la démarche du président de l’assemblée qui “mobilise les deniers publics de l’assemblée pour financer des travaux qui ne servent qu’une idéologie (...) la cause de votre parti et non à l’ensemble des Polynésiens que cette assemblée représente”.
Réinventer le partenariat avec l’Etat plutôt que de se poser en victime
Édouard Fritch est allé également en ce sens, estimant que ce que le Tavini présente “comme un outil de connaissance est en réalité un instrument de combat politique au service de l’indépendance”. “Il est normal, légitime et même sain d’interroger les flux financiers, les enjeux stratégiques, les équilibres de notre relation avec la République, avec l’Etat. Oui, c’est normal. Mais pour le faire sérieusement il faut une méthode, une rigueur, un pluralisme, or cette commission en est dépourvue”, a claqué le patron du Tapura, accusant la majorité de piper les dés à l’avance en faisant de cette commission d’enquête “un réquisitoire, un acte d’accusation politique contre la République”.
En autonomiste convaincu, Édouard Fritch s’est fait l’avocat de l’État en rappelant que c’est la France qui paie ses fonctionnaires, qui est là en temps de crise, qu’elle soit sanitaire ou environnementale, qui garantit des institutions stables, qui finances nos infrastructures, assure une monnaie forte ou encore une surveillance de notre ZEE . “Notre avenir ne repose pas dans le rejet de ce partenariat, je crois qu’il repose dans sa réinvention, dans son amélioration, dans sa consolidation, mais cela suppose de sortir de ce discours victimaire”, a-t-il plaidé. Nuihau Laurey a lui aussi insisté sur la garantie des transferts financiers de l’Etat, avec des fonctionnaires qui sont sûrs d’être payés à la fin du mois, alors “personne, même un cabinet ultra spécialisé ne pourra me garantir que dans 10 ou 15 ans, les 10,100 ou 1000 milliards vont sortir du fond de l’océan (...) on va se retrouver à comparer des mape à des fe’i”.
“Notre contribution est bien réelle mais peu mesurée”
Pour Allen Salmon (Tavini), cette commission d’enquête a un “objectif aussi simple que fondamental : établir un état des lieux clair et juste. Car trop souvent, on nous parle de ce que la France nous donne : 100 milliards par ci, 225 milliards par là, mais rarement de ce que la Polynésie permet : présence militaire, rayonnement diplomatique, accès à des ressources stratégiques.... Notre contribution est bien réelle mais hélas peu mesurée”. Ce à quoi ne sont pas fondamentalement opposés les élus du Tapura et de Ahip, à condition que cela soit fait avec sérieux, rigueur, et en toute objectivité. Un amendement a d’ailleurs été déposé en ce sens par la majorité pour préciser les missions de cette fameuse commission d’enquête qui devra notamment “s’attacher à évaluer la nature quantitative et qualitative des relations financières entre la Polynésie française et la France”.
Tepuaraurii Territahi plus en accord avec cette rédaction a demandé à ce que cet amendement remplace tout bonnement l’article 1 du projet de délibération. Descendu de son perchoir pour défendre son texte dans l’hémicycle, Antony Géros n’y était pas favorable avant que sa collègue Maurea Maamaatuaiahutapu ne demande une suspension de séance. Il faut dire aussi que la composition même de cette commission d’enquête semble diviser encore une fois la majorité. Allen Salmon a d’ailleurs évoqué ce sujet d’emblée, s’étonnant que cette question n’ait pas été réglée avant d’examiner ce texte en plénière. Résultat des courses, de retour après une heure de suspension, Antony Géros a donc annoncé le retrait de son projet de délibération pour laisser le temps de la concertation d’ici la séance du 3 juillet prochain "au plus tard", date de clôture de la session administrative.
Reporté. Après plus de trois heures de débat dans l’hémicycle ce jeudi, la proposition de délibération portée par le président de l’assemblée, Antony Géros, visant à créer une commission d’enquête destinée à “recueillir tous les éléments d’information relatifs aux enjeux géostratégiques, environnementaux, économiques et financiers de la Polynésie française et de sa zone économique exclusive” n’a pas été votée. Après une longue suspension de séance de près d’une heure pendant laquelle la majorité et les élus de l’opposition se sont concertés, le président de l’assemblée a annoncé son retrait et son report “au plus tard le 3 juillet prochain”. Réfractaires à la notion même d’une “commission d’enquête” partisane, Tapura et Ahip avaient plaidé pour une “mission d’information”, plus indépendante, pluraliste, et transparente, estimant que c’était le véhicule législatif le plus approprié. Sauf que les crédits dévolus à une mission d’information sont plafonnés à deux millions de francs quand cette commission d’enquête est dotée d’un budget de 25 millions.
“Mais en changeant la formulation, on peut y arriver. On ne sera pas opposés à une commission d’enquête dans la mesure où elle est formulée correctement. On n’a rien à cacher et comme vous, nous voulons des réponses”, a finalement réagi Tepuaraurii Teriitahi (Tapura), remerciant Antony Géros d’avoir “pris en compte” leur demande. Même son de cloche de la part de Nuihau Laurey (Ahip) qui a lui aussi plaidé pour une “rédaction qui satisfasse tout le monde”.
25 millions de deniers publics au service d’un parti
En effet, dans leurs interventions précédant cette décision de report, les élus de l’opposition ont fustigé la méthode employée par le locataire du perchoir à l’initiative de ce texte. D’abord Nicole Sanquer qui a souligné qu’à l’instar de la commission spéciale de décolonisation qui avait fait l’objet d’un recours, cette nouvelle commission d’enquête pourrait suivre le même chemin puisqu’elle ne répond pas non plus aux critères définis dans le règlement intérieur. Des critères qui précisent que toute commission d’enquête doit recueillir des éléments d’information, soit sur des faits déterminés, soit sur la gestion des services publics. “Monsieur le président, éclairez-moi parce que je ne vois rien de tout ça”, a-t-elle lancé, estimant que ces travaux doivent justement s’inscrire dans la continuité de ceux de la commission de décolonisation puisque l’état des lieux attendu est “justifié par la nécessité d’éclairer les choix futurs du Pays en matière de développement économique, d’autonomie et de partenariat préalable à la décolonisation”.
Et de pointer du doigt la démarche du président de l’assemblée qui “mobilise les deniers publics de l’assemblée pour financer des travaux qui ne servent qu’une idéologie (...) la cause de votre parti et non à l’ensemble des Polynésiens que cette assemblée représente”.
Réinventer le partenariat avec l’Etat plutôt que de se poser en victime
Édouard Fritch est allé également en ce sens, estimant que ce que le Tavini présente “comme un outil de connaissance est en réalité un instrument de combat politique au service de l’indépendance”. “Il est normal, légitime et même sain d’interroger les flux financiers, les enjeux stratégiques, les équilibres de notre relation avec la République, avec l’Etat. Oui, c’est normal. Mais pour le faire sérieusement il faut une méthode, une rigueur, un pluralisme, or cette commission en est dépourvue”, a claqué le patron du Tapura, accusant la majorité de piper les dés à l’avance en faisant de cette commission d’enquête “un réquisitoire, un acte d’accusation politique contre la République”.
En autonomiste convaincu, Édouard Fritch s’est fait l’avocat de l’État en rappelant que c’est la France qui paie ses fonctionnaires, qui est là en temps de crise, qu’elle soit sanitaire ou environnementale, qui garantit des institutions stables, qui finances nos infrastructures, assure une monnaie forte ou encore une surveillance de notre ZEE . “Notre avenir ne repose pas dans le rejet de ce partenariat, je crois qu’il repose dans sa réinvention, dans son amélioration, dans sa consolidation, mais cela suppose de sortir de ce discours victimaire”, a-t-il plaidé. Nuihau Laurey a lui aussi insisté sur la garantie des transferts financiers de l’Etat, avec des fonctionnaires qui sont sûrs d’être payés à la fin du mois, alors “personne, même un cabinet ultra spécialisé ne pourra me garantir que dans 10 ou 15 ans, les 10,100 ou 1000 milliards vont sortir du fond de l’océan (...) on va se retrouver à comparer des mape à des fe’i”.
“Notre contribution est bien réelle mais peu mesurée”
Pour Allen Salmon (Tavini), cette commission d’enquête a un “objectif aussi simple que fondamental : établir un état des lieux clair et juste. Car trop souvent, on nous parle de ce que la France nous donne : 100 milliards par ci, 225 milliards par là, mais rarement de ce que la Polynésie permet : présence militaire, rayonnement diplomatique, accès à des ressources stratégiques.... Notre contribution est bien réelle mais hélas peu mesurée”. Ce à quoi ne sont pas fondamentalement opposés les élus du Tapura et de Ahip, à condition que cela soit fait avec sérieux, rigueur, et en toute objectivité. Un amendement a d’ailleurs été déposé en ce sens par la majorité pour préciser les missions de cette fameuse commission d’enquête qui devra notamment “s’attacher à évaluer la nature quantitative et qualitative des relations financières entre la Polynésie française et la France”.
Tepuaraurii Territahi plus en accord avec cette rédaction a demandé à ce que cet amendement remplace tout bonnement l’article 1 du projet de délibération. Descendu de son perchoir pour défendre son texte dans l’hémicycle, Antony Géros n’y était pas favorable avant que sa collègue Maurea Maamaatuaiahutapu ne demande une suspension de séance. Il faut dire aussi que la composition même de cette commission d’enquête semble diviser encore une fois la majorité. Allen Salmon a d’ailleurs évoqué ce sujet d’emblée, s’étonnant que cette question n’ait pas été réglée avant d’examiner ce texte en plénière. Résultat des courses, de retour après une heure de suspension, Antony Géros a donc annoncé le retrait de son projet de délibération pour laisser le temps de la concertation d’ici la séance du 3 juillet prochain "au plus tard", date de clôture de la session administrative.