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Fraude à la défisc' : Relaxe générale pour les petites mains de l'affaire Sofipac


Tahiti, le 23 février 2021 - Le tribunal correctionnel a suivi les réquisitions du parquet en prononçant mardi la relaxe des 17 agriculteurs, éleveurs et prestataires touristiques poursuivis pour "recel" dans le cadre de l'affaire de fraude massive à la défiscalisation du cabinet Sofipac. Le parquet a estimé que ces petites mains du dossier n'avaient pas eu conscience du caractère frauduleux du montage grâce auquel elles avaient bénéficié de défiscalisations illégales.
 
Il n'aura fallu que deux heures d'audience et trente minutes de délibéré pour que le tribunal correctionnel de Papeete relaxe mardi les 17 agriculteurs, éleveurs ou prestataires touristiques poursuivis pour recel dans le cadre de l'énorme fraude à la défiscalisation à la loi Girardin dans l'affaire Sofipac.
 
En avril 2020, la Cour de cassation avait définitivement condamné la tête pensante de cette fraude, William Bernier, pour escroquerie en bande organisée et blanchiment à cinq ans de prison dont trois avec sursis et à une amende de 50 millions de Fcfp. Entre novembre 2006 et décembre 2009, ce dernier, aidé de ses apporteurs d'affaire, l'intrigante Yolande Wong Lam en tête, avait procédé, via son cabinet de défiscalisation de Papeete, au montage administratif et financier de 311 dossiers de défiscalisation pour une escroquerie pharaonique chiffrée à plus de 3,8 milliards de Fcfp.
 
"Paradis des escrocs"
 
Malgré un non-lieu rendu par le juge d'instruction en charge de l'affaire, le parquet avait décidé de poursuivre les 17 agriculteurs, éleveurs et prestataires touristiques, qui avaient confié leurs dossiers au cabinet Sofipac et qui avaient bénéficié de défiscalisations illégales comprises entre un et dix millions de Fcfp. Après de multiples renvois, leur procès devant le tribunal correctionnel s'est ouvert mardi en présence de cinq des dix-sept mis en cause. Deux d'entre eux étant décédés depuis l'ouverture de l'enquête...
 
Alors que certains avocats de la défense avaient demandé un renvoi puisque le dossier principal concernant le fond de l'affaire ne leur avait toujours pas été transmis, le tribunal a décidé de retenir l'affaire. Après des débats particulièrement courts en raison de l'absence de la plupart des prévenus, le procureur de la République a affirmé d'emblée qu'il n'était pas en mesure d'apporter la preuve que les prévenus avaient eu connaissance qu'ils participaient à une escroquerie en bande organisée. "Ici, c'est le paradis des escrocs car vous avez affaire à des gens naïfs. Et asseoir une condamnation sur la naïveté est impossible", a-t-il ainsi affirmé avant de requérir la relaxe générale des prévenus.
 
"Méconnaissance du contexte"
 
Après de telles réquisitions, les avocats de la défense n'ont eu, tel que l'avait prévenu le représentant du ministère public, qu'à "enfoncer le clou". Ils se sont donc succédé à la barre pour louer "l'honnêteté intellectuelle" et "l'intégrité" du procureur, en affirmant tour à tour que leurs clients avaient seulement vu l'opportunité de bénéficier d'une aide en "méconnaissance totale du contexte frauduleux" du montage mis en place par William Bernier et ses apporteurs d'affaire. Moins d'une heure après les plaidoiries, le tribunal correctionnel a relaxé l'ensemble des prévenus. 
 

Rédigé par Garance Colbert le Mardi 23 Février 2021 à 16:09 | Lu 2408 fois