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En Indonésie, les ravages des mines d'or clandestines


Tabir Ouest, Indonésie | AFP | mercredi 21/06/2017 - Sur les berges de l'île de Sumatra, des excavateurs défigurent la jungle, les mines d'or clandestines prospèrent et les chercheurs de métal jaune souvent pauvres prennent beaucoup de risques. Un fléau auquel les autorités indonésiennes s'attaquent timidement, depuis peu.
Dans la province de Jambi, de nombreux travailleurs mal payés dans les plantations de caoutchouc ont abandonné leur emploi pour se lancer dans la recherche d'or en toute illégalité, dans l'espoir de gagner un peu mieux leur vie, à l'image d'Iwan.
Depuis deux ans, cet homme de 43 ans ramasse des petits bouts de métal jaune au bord de la rivière Tabir, mais ses conditions de vie ne se sont pas beaucoup améliorées.
"Il y a des jours où on ne trouve pas d'or, mais c'est toujours mieux que d'être dans une plantation de caoutchouc", où le salaire était inférieur, raconte à l'AFP Iwan.
Un bon mois, il peut gagner avec l'or jusqu'à 10 millions de roupies (670 euros), après avoir déduit tous les frais, notamment la location d'un excavateur et le paiement des six personnes qui travaillent avec lui.
A Jambi, dans le centre de Sumatra, les mines d'or clandestines ont fait leur apparition en 1997 et connu un véritable boom ces dernières années. Aujourd'hui, elle s'étalent sur une centaine de sites, où la forêt a été saccagée et la vie sauvage dégradée.
A proximité d'une rivière, des hommes creusent des puits peu profonds sans être inquiétés. D'autres, comme Iwan, profitent de l'impunité pour venir avec des pelleteuses, de plus en plus nombreuses dans ce paysage éventré de mines à ciel ouvert.
 

- Seule source de revenu - 

 
Beaucoup de chercheurs d'or n'ont aucune autre source de revenu. Ils continuent donc d'affluer à leurs risques et périls, bien que les accidents mortels soient fréquents et que le recours au mercure pour extraire l'or soit nocif pour la santé: brûlé avec d'autres minerais bruts pour extraire le métal jaune, le mercure cause notamment des tremblements et des toux persistantes dues à l'inhalation de fumée.
Les autorités de Jambi ont commencé à s'attaquer à ces activités illégales il y a deux ans et les contrôles se sont multipliés ces derniers mois, avec des opérations coups de poing de la police.
Parfois, les forces de l'ordre se heurtent à des actions de représailles. L'an passé, un poste de police à Jambi a été incendié après l'arrestation de personnes impliquées dans un trafic d'or provenant d'une mine clandestine.
Parallèlement, la région offre des formations aux techniques agricoles, afin de proposer une alternative à ceux tentés par la ruée vers l'or illégal.
Conscientes que les opérations de police à elles seules ne sont pas la solution, les autorités de Jambi tentent aussi de réguler cette industrie illégale en offrant la possibilité de chercher de l'or légalement.
Depuis décembre, la région propose ainsi aux amateurs d'or d'être candidat à l'ouverture d'un puits dans une "zone minière populaire", une enceinte légale où l'on peut chercher de l'or après avoir obtenu un permis, explique un responsable à Jambi, Karel Ibnu Suratno.
 

- S'attaquer aux 'gros poissons' -

 
Objectif des autorités: contrôler les activités, limiter les dégâts à l'environnement. Et "améliorer la vie des gens" en permettant aux chercheurs de métal jaune de sortir de la clandestinité et tirer profit de leur activité, explique M. Suratno.
Car dans les mines illégales, ils sont exploités par quelques individus qui s'enrichissent en restant dans l'ombre, ajoute-t-il. "La plupart d'entre eux ne gagnent pas beaucoup" en cherchant du minerai, relève M. Suratno.
Mais comme ces chercheurs d'or n'ont bien souvent aucune alternative d'emploi, ils continuent leur activité illégale. "C'est tout ce que je peux faire pour gagner ma vie", dit ainsi Iwan.
Depuis la création de la "zone minière populaire" en décembre, seul un site clandestin a demandé et obtenu avec succès un permis d'exploiter, en raison des lourdeurs de la bureaucratie.
Et "il est difficile de mettre fin aux mines illégales ici tant que les gens qui les financent ne sont pas identifiés et arrêtés", souligne un défenseur de l'environnement sous couvert d'anonymat.
Pour y parvenir, les autorités devront s'attaquer aux "gros poissons", de riches individus qui ont des relations.

le Mercredi 21 Juin 2017 à 04:23 | Lu 628 fois