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Décharge de Faa’a : La commune va-t-elle passer à la caisse ?


Tahiti, le 8 octobre 2020 - Un premier dossier d’indemnisation déposé par un propriétaire foncier concernant l’utilisation d’un terrain pour la décharge de Faa’a a été étudié par le Tribunal administratif de Papeete. Il pourrait conduire à des demandes d’indemnisation en cascade auprès de la commune. 
 
Difficile de savoir s’il s’agit du début ou de la fin d’un dossier épineux. La commune occupe depuis bientôt 60 ans des parcelles sur la terre Mumuvai afin d’y enfouir annuellement des tonnes de déchets sans accord avec les propriétaires fonciers. Une utilisation illégale de terres privées qui avait été pointée du doigt à de multiples reprises. La Chambre territoriale des comptes indiquait en 2011 que "la commune ne peut se satisfaire de l’état actuel en justifiant son absence d’action par le seul fait que la terre concernée est dans une situation d’indivision confuse et compliquée", lui enjoignant à prendre des actions au plus vite pour résoudre ce problème. L’occupation illégale a perduré et a notamment donné lieu en décembre 2015 au blocage de l’accès par les familles Mai et Salmon qui souhaitaient que la mairie achète le terrain et indemnise pour les décennies d’utilisation. La mairie avait expliqué attendre "la décision du tribunal".
 
Le tribunal foncier démêle les successions
 
En 2017, le tribunal se penche une première fois sur le dossier à la demande d’un seul ayant droit. La juridiction constate que "l’ouvrage public est irrégulièrement implanté sur un terrain dont il est propriétaire indivis et que cet ouvrage est à l’origine d’une emprise irrégulière". Il acte l’obligation pour la commune de procéder à une indemnisation "réparant le préjudice résultant de l’occupation irrégulière de cette parcelle" alors estimée à 10% de la valeur vénale du terrain. Mais il y a un problème : il est impossible de déterminer quelle succession est propriétaire de quelle partie dans la parcelle de 2,6 hectares concernée. "Il n'appartient qu'à l'autorité judiciaire de trancher les questions relatives au droit de propriété". Le tribunal administratif décide de sursoir en attendant que le tribunal foncier, à peine créé, s’occupe de la question. Il faudra attendre trois ans pour que la question soit réglée. Par un jugement d’août 2020, le téméraire requérant peut se prévaloir de 1/28e de la parcelle et donc autant d’indemnisation.
 
Indemnisation à prévoir pour la commune
 
À peine le jugement du tribunal foncier rendu, retour de l’affaire au tribunal administratif pour fixer l’indemnité. À l’audience de mardi, le rapporteur public a conclu que, compte tenu de la valeur, de la durée et de la quotité, le demandeur pouvait espérer 1,4 millions de Fcfp pour l’immobilisation du terrain depuis 2011. Impossible selon la magistrate de revenir avant en vertu de la prescription quadriennale. Si les conclusions du rapporteur sont suivies, il n’y aura donc pas d’indemnisation pour les quelques six décennies d’occupation. Mais la décision du tribunal, attendue pour le 20 octobre prochain, pourrait ouvrir la porte à d’autres demandes et obliger la commune à sortir enfin le chéquier. 
 
Ainsi, des demandes qui seraient formulées en 2020 par les détenteurs des 27/28e restants dans l’indivision leur permettraient d’être indemnisés par la commune pour l’occupation de leur parcelle à partir de 2015. Si la facture est réduite pour Faa’a compte tenu de la durée d’exploitation de la décharge, elle n’est pas définitive. Chaque année, les propriétaires pourront ainsi demander une indemnisation pour l’année concernée et jusqu’à ce que la terre leur soit rendue ou achetée. Des factures probables qui pourraient inciter la commune à résoudre le problème une bonne fois pour toute.
 

Rédigé par Sébastien Petit le Jeudi 8 Octobre 2020 à 07:40 | Lu 3691 fois