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Crash d'Air Moorea : peines de prison ferme requises


PAPEETE, le 24 octobre 2018 -Le procureur de la République a rendu ses réquisitions ce mercredi dans le cadre du procès d'Air Moorea, qui avait coûté la vie à vingt personnes le 9 août 2007. Des peines de prison ferme ont été demandées à l'encontre de Guy Yeung, Freddy Chanseau et Andriamanonjisoa Ratzimbasafy. Une amende de 23 millions de francs a également été requise contre la compagnie poursuivie en qualité de personne morale.

A l'aube de ses réquisitions dans le procès du crash d'Air Moorea, le procureur de la République, José Thorel, rend un hommage appuyé à Michel Santurenne, le pilote du Twin Otter qui s'est abîmé en mer avec 19 passagers à son bord il y a onze ans. " Je souhaite rendre hommage au courage dont cet homme a fait preuve le jour de l'accident. Il a vu la mort en face, a tenté de sauver sa vie et celles des passagers" déclare le représentant du ministère public avant d'évoquer les "omissions" qui ont "concouru ou contribué à la mise en place de la situation ayant causé ces homicides involontaires."

Selon le représentant du ministère public, le crash ne peut être dû qu'à la rupture du câble en plein vol. A l'appui de cette affirmation, José Thorel égrène les nombreux "manquements" relevés durant l'information judiciaire : la situation de "laxisme", de "mauvaise organisation" de l'atelier mécanique, le non-respect par la direction des "conditions spécifiques d'exploitation de l'appareil", l'erreur faite sur la date de dépôt du câble, qui constitue une "erreur importante et déterminante dans la survenance de l'accident", l'absence d'"inspection spéciale de l'avion" malgré un incident un mois avant le crash. Autant de manquements qui ont abouti à une "situation imputable à toute une série de fautes et d'omissions."




"Organisation humaine de l'entreprise"

Avant ces réquisitions, la matinée avait été consacrée aux plaidoiries des avocats des parties civiles. Pour Me Rosenthal, ce "procès illustre ce que l'on rencontre dans le cadre d'autres accidents collectifs où il y a souvent une cause matérielle qui se dessine, et des causes indirectes qui impliquent l'organisation humaine de l'entreprise." Pour l'avocat, le tribunal se retrouve aujourd'hui face au "résultat d'un processus mortel définitivement engagé lors de la mise en service de l'aéronef" à une date à laquelle il n'était plus possible de considérer qu'il était apte à voler. L'homme de loi a d'ailleurs fait remarquer que si le parquet avait ouvert une information avec un réquisitoire "plus large" avec la qualification de "mise en danger de la vie d'autrui", les 76 personnes qui ont effectué les quatre rotations précédant le crash à bord du Twin Otter, auraient pu se constituer partie civile.

Les avocats de la défense devraient plaider demain. La décision sera ensuite mise en délibéré à une date ultérieure.

Les peines requises :

Guy Yeung, Freddy Chanseau et Andriamanonjisoa Ratzymbasafy : trois ans de prison dont deux avec sursis, interdiction définitive d'exercer une activité d'encadrement ou de contrôle dans le domaine de la navigabilité et de l'exploitation des aéronefs. Amende de 2, 4 millions de francs.

Jacques Gobin : trois ans de prison avec sursis, interdiction définitive d'exercer une activité d'encadrement ou de contrôle dans le domaine de la navigabilité et de l'exploitation des aéronefs. Amende d'1, 2 million de francs.

Didier Quemeneur, Jean-Pierre Tinomano et Stéphane Loisel: deux ans de prison avec sursis, interdiction définitive d'exercer une activité d'encadrement ou de contrôle dans le domaine de la navigabilité et de l'exploitation des aéronefs.

Air Moorea : 23 millions d'amende et la publication dans les médias de tout ou partie de la décision de justice pendant une semaine aux frais des prévenus.

Rédigé par Garance Colbert le Mercredi 24 Octobre 2018 à 17:15 | Lu 4164 fois