Tahiti Infos

Coopération française décentralisée : Vanuatu re-signe avec la Nouvelle-Calédonie, son plus proche voisin


Sato Kilman, ministre des affaires étrangères et du commerce extérieur de Vanuatu
Sato Kilman, ministre des affaires étrangères et du commerce extérieur de Vanuatu
NOUMÉA, dimanche 22 février 2015 (Flash d’Océanie) – Sato Kilman, ministre des affaires étrangères et du commerce extérieur de Vanuatu, entame lundi une visite officielle de deux jours en Nouvelle-Calédonie voisine, où le temps fort de son déplacement sera le renouvellement d’une coopération française « décentralisée » lancée en 2006.
La signature de cette convention, dont la teneur n’a pas encore été divulguée, devrait intervenir lundi avec, d’une part, comme signataires, Vincent Bouvier, Haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie pour la France et d’autre part le chef de la diplomatie de cet ancien condominium franco-britannique des Nouvelles-Hébrides, devenu la République indépendante de Vanuatu en juillet 1980.

Au cours de ce déplacement de deux jours, M. Kilman devrait aussi s’entretenir notamment avec M. Bouvier, ainsi que, au plan local, avec Mme Cynthia Ligeard, Présidente du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, ainsi qu’avec Gaël Yanno, Président du Congrès de la Nouvelle-Calédonie, a précisé vendredi 20 février 2015 le Haut-commissariat de la République en Nouvelle-Calédonie.
Par ailleurs, une séquence particulière sera consacrée à une rencontre avec les acteurs dans le secteur de la recherche scientifique, avec comme point d’orgue « la valorisation économique des substances naturelles », selon les mêmes sources.
Plusieurs instituts français de recherche sont représentés en Nouvelle-Calédonie, y compris l’Institut de Recherche pour le Développement (IRD), qui entretient depuis de longues années une coopération active avec Vanuatu, notamment dans le domaine de la recherche agronomique ou encore de la sismologie et de la volcanologie.
Par ailleurs, mardi 24 février 2015, le ministre vanuatuan se rendra au Centre de formation de la police en Nouvelle-Calédonie, dans le cadre d’une coopération naissante avec l’État mélanésien voisin, dans des domaines comme la police de proximité ou la protection des personnalités.
Pendant sa visite en Nouvelle-Calédonie, M. Kilman sera aussi accompagné de l’ambassadeur de France à Vanuatu, Alain du Boispéan, arrivé en poste à Port-Vila mi-octobre 2014, en remplacement de Michel Djokovic, qui a occupé ces même fonctions depuis 2011 et qui, pour sa part, est désormais en poste tout près de là, à Suva (Fidji).

Coopération décentralisée

La coopération française à Vanuatu possède cette particularité que depuis 2006, aux termes d’un accord de coopération « décentralisée », elle ne s’organise plus non seulement depuis Paris, mais aussi par le truchement de la collectivité française voisine de Nouvelle-Calédonie.
Régulièrement et alternativement, soit à Nouméa, soit à Port-Vila, une commission paritaire réunit officiels français et ni-Vanuatu pour définir les grandes lignes du programme d’aide au développement entre la France et Vanuatu.

Liens historiques entre la France et Vanuatu

Lors de la cérémonie de présentation de ses lettres de créances au Président de la République de cet archipel, Baldwin Lonsdale, M. du Boispéan avait rappelé les liens historiques entre la France et Vanuatu.
« Notre relation remonte à 1906 (…) et nous considérons que votre présence ici est très importante car la France est le seul pays européen à avoir encore une ambassade à Vanuatu», a notamment déclaré M. Lonsdale en rappelant que la coopération franco-vanuatuane passait essentiellement par les axes de l’éducation, le développement économique et social, ainsi que la parité.
Autre sujet abordé : l’environnement et les changements climatiques, dont les conséquences touchent déjà, de manière très concrète, plusieurs îles océaniennes, dont certaines sont située dans l’archipel de Vanuatu.
Sur ce dossier, M. du Boispéan a évoqué la collaboration franco-vanuatuane en vue de la réussite de la conférence Paris Climat 2015, qui se tiendra à Paris en décembre 2015.

Des relations bilatérales cordiales

Les relations bilatérales sont toujours considérées comme fortes et anciennes entre la France et cette République océanienne, qui demeure le seul État indépendant océanien partiellement francophone (environ trente pour cent de la population).
L’archipel de Vanuatu, plus proche voisin de la collectivité française de Nouvelle-Calédonie, est aussi le seul État océanien indépendant ayant le Français comme langue officielle, aux côtés de l’Anglais et du pidgin bichelamar.
De par son passé colonial, Vanuatu est à la fois membre du Commonwealth et de l’OIF (Organisation Internationale de la Francophonie).

Entre Paris et Port-Vila, un accent particulier est placé sur la coopération et l’aide au développement.
Parmi les trois collectivités françaises du Pacifique (Nouvelle-Calédonie, Wallis-et-Futuna et Polynésie française), la plus proche est la Nouvelle-Calédonie, avec laquelle une coopération déléguée et décentralisée a été mise en place depuis juin 2006.
Cette coopération déléguée et pragmatique, enclenchée en juin 2006 par un premier accord intervenu entre la France, la collectivité de Nouvelle-Calédonie et Vanuatu, vient s’ajouter à la coopération bilatérale franco-vanuatuane menée depuis Paris.
Cette coopération franco-vanuatuane, qui touche aussi bien les domaines de l’éducation, de la santé, de la culture ou de l’économie et de la bonne gouvernance, est largement alimentée par des dotations provenant du Fonds Pacifique du gouvernement français.
Le Fonds Pacifique finance chaque année des projets ayant comme dénominateurs communs un processus d’intégration et de multiplication des échanges entre pays et territoires océaniens.
Parmi tous les États océaniens éligibles, Vanuatu en demeure le plus important bénéficiaire.

formation, francophonie, éducation, culture et police

Au cours des dernières années, au titre de cette nouvelle coopération décentralisée Paris/Port-Vila via Nouméa, et qualifiée de « riche et efficace » par la France, les grands axes récurrents ont été la formation, l‘éducation, la culture et la police.

À titre d’exemple ces dernières années, en juillet 2012, le montant de l’enveloppe approuvée a été annoncé à près de 530.000 euros.
Cette somme avait alors été annoncée pour le financement de projets dans les domaines de la formation (francophone) de la fonction publique vanuatuane, l’équipement d’un laboratoire de science pour les élèves préparant un diplôme francophone d’enseignement supérieur DEAU, un projet de collecte et de transcription des légendes et récits des premières rencontres entre les populations autochtones et les navigateurs et les commerçants européens ou encore une assistance à la formation en police judiciaire et police scientifique.

Seule ombre au tableau : l’épineux dossier concernant les îles Matthew et Hunter

Seule ombre au tableau ces dernières années : l’épineux dossier concernant les îles Matthew et Hunter, minuscules cailloux émergés situés dans des eaux entre le Sud Vanuatu et le Nord-ouest de la Nouvelle-Calédonie.
Ces terres émergés et inhabitées sont revendiquées à la fois par Paris et Port-Vila depuis l’indépendance de Vanuatu, en juillet 1980.
Le contentieux refait surface régulièrement pour troubler des relations par ailleurs cordiales.
Dernier épisode en date : lors de la visite de M. Kilman à Nouméa, le 28 mai 2012 et des entretiens avec le Président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, à l’époque Harold Martin, la question de la souveraineté sur les îles Matthew et Hunter aurait figuré en bonne place dans cet entretien, que la partie française a considéré comme « convivial et sincère » et de nature à « avancer sur le règlement du différend ».
Côté français, on déclarait à l’époque avoir réitéré la position exprimée par la France.

Les minuscules ilots Matthew et Hunter représentent surtout un intérêt en matière de délimitation des eaux territoriales, permettant d’ajouter un périmètre de quelque deux cent miles autour d’elles, pour la puissante reconnue souveraine.
Jusqu’ici, les cartes maritimes officielles de Vanuatu et du territoire français de Nouvelle-Calédonie font chacune figurer ces îles dans leurs eaux.
Ces dernières années, plusieurs incidents en mer impliquant l’arraisonnement de bateaux de pêche réputés en infraction par la France ont eu lieu.
Après examen, les bateaux de pêche étaient en possession de permis en bonne et due forme délivrés par les autorités vanuatuanes, pour une zone comprenant aussi Matthew et Hunter.

Sur ce dossier, par ailleurs, on peut lire sur le site du ministère des affaires étrangères
http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/pays-zones-geo/vanuatu/la-france-et-le-vanuatu/
que « le Rapporteur spécial sur les droits des populations autochtones, M. James Anaya, a saisi notre Représentation Permanente (de la France) auprès des Nations-Unies à Genève d’une communication (i.e. une plainte individuelle) afin d’obtenir, avant le 28 janvier 2012, des explications ou des renseignements complémentaires de la part du Département sur les informations qui lui ont été transmises au sujet du "refus de la France de permettre aux populations autochtones de la République de Vanuatu d’accéder aux îles d’Umaenupne et d’Umaenea (noms locaux de Matthew et Hunter), sous souveraineté française, afin qu’ils puissent à exercer des rituels culturels et religieux". »

« Dans sa réponse en date du 24 janvier 2012, le Département a fait valoir que les deux îlots, mentionnés par le Rapporteur Spécial lui-même comme étant sous souveraineté française, étaient partie intégrante du territoire de la Nouvelle-Calédonie et qu’à ce titre, les autorités françaises y exercent les pouvoirs qui sont reconnus aux entités souveraines par le droit international, en particulier celui de contrôler l’accès à cette partie de son territoire et à la mer territoriale. Il a également informé le Rapporteur Spécial de l’absence d’indications relatives à des pratiques culturelles ou religieuses périodiques sur Matthew et Hunter. »

pad

Rédigé par PAD le Lundi 23 Février 2015 à 06:19 | Lu 1223 fois