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Cette créatrice réimagine ses vieux jeans en vêtements à la mode


Josseline avec une veste créée à partir d'un vieux jeans que son fils avait abandonné dans un placard. On ne sait pas ce que le jeune homme pense de ce sacrifice pour la mode...
Josseline avec une veste créée à partir d'un vieux jeans que son fils avait abandonné dans un placard. On ne sait pas ce que le jeune homme pense de ce sacrifice pour la mode...
PAPEETE, le 8 juillet 2019 - Une paire de jeans qui traîne dans un placard, pour beaucoup d'entre nous c'est le souvenir d'une époque où on avait quelques kilos en moins… Pour la créatrice Josseline Cadet et ses couturières, c'est l'occasion de laisser libre cours à leur imagination, comme en témoignent les créations qu'elles ont présenté à la Tahiti Fashion Week.

La créatrice Josseline Cadet participe tous les ans à la Tahiti Fashion Week avec les couturières de son atelier de confection sur-mesure, KDCO Maison. Normalement elles confectionnent des pièces d'ameublement – des coussins, des parures de lit, des rideaux… – mais pendant les semaines précédant l'événement mode de l'année, elles consacrent toute leur énergie créatrice à élaborer des vêtements de mode uniques.

Ces pièces ont fait sensation lors du défilé de la Tahiti Fashion Week dans les jardins de l'Assemblée, le 12 juin dernier.
Ces pièces ont fait sensation lors du défilé de la Tahiti Fashion Week dans les jardins de l'Assemblée, le 12 juin dernier.
Cette année, elles se sont données un défi particulièrement intéressant : réutiliser des jeans qui traînent dans leurs placards pour créer des pièces de mode dignes d'être présentées au défilé officiel. Elles ont ainsi élaboré des vestes, des robes, des jupes… Une collection "Denim in Love" très réussie, qui ne cherche pas à cacher l'origine de la matière de départ. Elle les met même en valeur ! Sur sa veste préférée, Josseline nous montre ainsi fièrement les poches du pantalon original, nous expliquant "il n'y a plus qu'à mettre une ceinture pour identifier le jeans du premier coup d’œil !"

La créatrice a réalisé cette collection par défi, par amour de la mode, mais surtout pour envoyer un message : non à la "quick fashion". Les vêtements ont un impact important sur l'environnement, et plutôt que de jeter vos fringues après quelques utilisations seulement, un peu d'imagination et une machine à coudre les transformeront en de nouveaux objets uniques ! Et on ne fait pas plus à la mode que ça. La preuve, depuis le défilé, les pièces en jeans créées par Josseline et ses couturières s'arrachent dans sa boutique du centre-ville.

Josseline Cadet, couturière

Josseline et la fameuse robe à lacets
Josseline et la fameuse robe à lacets
"On vit à une époque où on court toujours après du neuf, du neuf, du neuf, alors qu'on a des vêtements très bien fabriqués et costauds"

Quelle est l'origine de ces pièces ?

Donc je participe depuis trois ans à la Tahiti Fashion Week en tant que créatrice, car j'ai un atelier de confection sur mesure, même si on travaille dans l'ameublement. Je travaille pour les hôtels, des particuliers… Mais j'ai toujours eu la passion de la mode.

Cette année tu as donc fait quelque chose de différent ?

Cette année je me suis laissée embarquer dans deux défilés, ce qui est toujours difficile puisqu'il faut faire deux collections différentes… Alors pour le défilé public dans les jardins de l'Assemblée, j'ai décidé de travailler sur la manière de revisiter un jeans avec la collection Denim in Love. J'ai des garçons qui sont partis faire leurs études, ils ont laissé de nombreux vêtements tels quels, et j'avais ces jeans qui dormaient, pliés et bien rangés dans mes placards… Alors je me suis dit qu'on vit à une époque où on court toujours après du neuf, du neuf, du neuf, alors qu'on a des vêtements très bien fabriqués et costauds… On ne les porte plus parce qu'il ne sont plus à la mode. En concéquence, dans l'habillement on a une industrie qui pollue énormément. Donc là c'était l'occasion rêvée pour présenter des jeans transformés en pièces relookées "coutures".

Peux-tu nous présenter quelques une de tes créations ?
Là par exemple il y a une petite robe qui est un jeans qui a été retourné, frangé, on a ajouté ces petits lacets qui vont rendre la pièce très sexy. On peut la porter avec un T-shirt ou un maillot de bain en dessous pour la journée, ou avec des talons hauts pour être plus sexy en changeant le look ! Une des autres pièces les plus emblématiques est cette veste en jeans. C'est une de mes pièces préférées parce qu'elle est très facile à réaliser. On prend un jeans, on le retourne, on coupe les jambes, on fait un petit col en V, là j'ai ajouté un morceau de passe-poil pour faire plus habillé et avoir une jolie finition… A priori ce n’est pas évident au premier regard que cette veste est un jeans retourné, c'est quand on regarde dans les détails que ça apparaît. On pourrait même y passer une ceinture et ça devient évident ! Je fais ça parce que la Fashion Week ne n'est pas seulement pour vendre des pièces, c'est aussi partager des idées et créer des courants. Je veux m'élever contre le gaspillage de ce qu'on appelle la "quick fashion", la mode rapide, où on porte un vêtement une fois et on le jette ! A Tahiti on ne crée pas de tissu, mais avec un peu d'imagination et un tout petit peu de travail, on peut prendre un vêtement qu'on ne porte plus comme un jeans et en faire un vêtement revisité et tendance !

Tu fais donc travailler les 8 couturières de ton atelier sur ce projet ?
Oui. Donc dans notre atelier, on travaille sur de l'ameublement, la mode ce n'est pas notre métier. Mais pour la semaine de la Fashion Week, une parenthèse s'ouvre pendant trois semaines ou une grande partie de la l'atelier travaille sur la confection de vêtements dédiés à la Fashion Week. Là on a créé 28 pièces pour les défilés. C'est le moment pour nous de nous lâcher, de se libérer et de créer ! On travaille toutes ensembles et on met notre imagination en commun.

Rédigé par Jacques Franc de Ferrière le Lundi 8 Juillet 2019 à 17:45 | Lu 2082 fois