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Canada: cannabis à des fins médicales, la bonne affaire


SMITHS FALLS, 18 février 2014 (AFP) - Dans les murs d'une ancienne chocolaterie, au milieu de la campagne à une heure d'Ottawa, Chuck Rifici cultive du cannabis. Fournisseur agréé par l'administration canadienne, il nourrit de grandes ambitions.

Sa petite société Tweed Inc bénéficie à plein d'une nouvelle législation qui, à partir du 1er avril, interdira aux particuliers d'avoir quelques plants pour subvenir à leur traitement médical et encourage la production à grande échelle dans des serres.

Tweed est l'une des six entreprises à avoir obtenu un agrément du gouvernement et elle sera bientôt la première du genre à être cotée en bourse.

Déjà les premiers clients ont déjà passé commande pour une production à venir qui sera commercialisée entre 4 et 12 dollars (3 et 8 euros) le gramme.

Avec une production de 50 à 100 kilos tous les deux mois pour ses débuts, Tweed Inc compte bien atteindre rapidement son quota de 15 tonnes par an.

En attendant, la peinture à peine sèche, l'eau nécessaire en abondance pour la culture hydroponique est stockée dans des cuves qui, il y a encore quelques mois, servaient au sucre pour les confiseries au chocolat.

Une fois coupé et séché, le cannabis sera gardé précieusement dans un coffre-fort avant son expédition par colis sécurisé et distribué par des entreprises de messageries. C'est que la valeur du contenu de ce coffre-fort pourra atteindre 150 millions de dollars. L'exploitation est située juste en face du poste de police local.

La sécurité est prise au sérieux et chaque employé doit passer son badge en entrant ou en sortant des différentes salles et toute l'entreprise est sous surveillance vidéo.

- Eblouissant comme le soleil -

"C'est comme si on cultivait à l'intérieur d'une banque", s'amuse Chuck Rifici. Une banque certes, mais sous les tropiques, car "ce sera éblouissant comme le soleil ici", explique-t-il à l'AFP en montrant des rangées de lampes d'une puissance totale de 40.000 watts dans la serre où les employés porteront lunettes de soleil et des vêtements couvrants la peau pour éviter les brûlures.

Le Canada a autorisé en 1999 l'usage du cannabis à des fins médicales et plus de 37.000 Canadiens ont une ordonnance pour en consommer, le profil moyen étant un homme dans la quarantaine fumant environ 10 grammes par jour.

L'administration a d'abord tenté de produire le cannabis, avant de le sous-traiter à quelque 30.000 producteurs individuels. Mais les autorités locales se plaignaient de la difficulté de les surveiller et la police de la criminalité.

Le ministère de la santé a reçu environ 450 demandes d'agrément pour les structures plus industrielles que prévoit la nouvelle réglementation. A en croire Chuck Rifici, la demande va exploser avec 450.000 "patients" consommateurs dans les dix ans.

Jusqu'ici les six sociétés reconnues sont centrées sur le marché intérieur, mais certaines regardent déjà vers l'export ou passent des accords avec des partenaires comme par exemple Bedrogan Canada, une co-entreprise avec le néerlandais spécialiste du cannabis médicinal Bedrogan.

Si l'usage récréatif du cannabis est interdit au Canada, la nouvelle législation met en place un système de production et de distribution de cannabis qui pourrait servir au-delà de l'usage médical, note Rifici qui évalue à un million le nombre de consommateurs de cannabis à usage récréatif au Canada.

Le patron du parti libéral, Justin Trudeau, s'est prononcé l'an dernier pour la dépénalisation de l'usage du cannabis.

Avec 20 salariés, Tweed compte bien grossir pour employer plus d'une centaine de personnes, donnant un peu d'air à cette bourgade qui a perdu 1.700 emplois avec la fermeture du chocolatier Hershey.

Dennis Staples, le maire de Smiths Falls, avoue que sans l'installation de Tweed "l'usine aurait été détruite et la ville aurait perdu sa capacité industrielle".

Maintenant, Smiths Falls pourrait avoir sa première société cotée en bourse. Mais, compte tenu de l'activité, Tweed ne peut pas faire de la publicité. Pas idéal pour écouler des actions dans le public et lever des fonds pour grandir.

amc/mbr/jca/cac

Rédigé par Par Michel COMTE le Mardi 18 Février 2014 à 06:29 | Lu 350 fois