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Au cœur du combat de Eimeo Animara


Moorea, le 12 octobre 2020 - La journée mondiale  des animaux  a eu lieu le dimanche 4 octobre.  C’était une journée particulière pour l’association Eimeo Animara qui lutte, depuis des années, pour l’amélioration de la condition des animaux à Moorea. Malgré les problèmes permanents des chiots abandonnés et de la maltraitance subie par les chiens de l’île sœur, ses membres continuent à œuvrer. Josette Golasowski, la trésorière de l’association, a accepté de se confier pour faire part de leur combat quotidien.

Pourriez-vous nous présenter votre association Eimeo Animara ?

L’association compte actuellement quatre membres bénévoles. Nous intervenons sur le terrain lorsqu’il y a des animaux maltraités ou abandonnés. C’est souvent nous aussi qui allons chercher les chiots abandonnés dans les cartons. On a des familles d’accueil qui nous aident pour les accueillir, mais nous en manquons. Celles qui existent ne veulent plus accueillir de chiens car elles en ont trop. Heureusement ils sont souvent adoptés lorsqu’on fait des annonces sur Facebook. Sinon, on est obligé dans ce cas de faire euthanasier les chiots. Notre association fait également stériliser les chiens et chats qu’on recueille lorsqu’ils ont déjà 5 mois. On exige qu’ils soient stérilisés avant d'être adoptés. De même, on fait vacciner les animaux qui ont des accidents sur la route. Dans ce cas, c’est souvent nous qui payons les soins vétérinaires, notamment si on ne sait pas à qui les animaux appartiennent.
 
Il y a toujours autant de chiens abandonnés autour de l’île de Moorea, comment l’expliquez-vous ?
Pour beaucoup de propriétaires, c’est une négligence de leur part. Pour d’autres, c’est dû au fait qu’ils n’ont pas les moyens de faire stériliser leur chien car une stérilisation coûte cher. Notre association bénéficie de tarifs préférentiels. Pour une chienne, on paye 15 000 Fcfp au lieu de 25 000 Fcfp. C’est le prix qu’on fait payer aux personnes qui adoptent des chiens chez nous. Après, on peut aussi aider les gens qui n’ont pas les moyens de faire stériliser leur chien. Cela éviterait tous ces horribles abandons. Souvent, un chien abandonné meurt de faim, se fait attaquer par un gros chien ou est pris par des gens qui ont des mauvaises intentions. Un jour, j’ai trouvé par exemple un chien qui avait un gros caillou dans la gueule. J’ai été obligé de le faire euthanasier.
 
Est-ce que ce sont des problèmes spécifiques à la Polynésie française ?
Non, car je me suis abonnée à plusieurs sites web sur les animaux sur lesquels je vois, tous les jours,  des choses horribles. Il y a par exemple des jeunes qui s’amusent à torturer et pendre des chats. Puis, ils publient cela sur Facebook.  On voit ce genre de choses en France, en Italie et aux États-Unis. En Chine, c’est pire. Ils attrapent les chiens et les chats pour les mettre dans des caisses. Ils les torturent et les mangent. On ne va pas dire que les gens sont plus méchants en Polynésie qu’ailleurs. Je dis que c’est l’être humain qui est mauvais et qui devient fou. Le problème avec les propriétaires locaux, c’est qu’ils attachent souvent leur chien très court. Ils oublient de leur mettre un toit sur la tête. Ils oublient de leur donner à boire lorsqu’il fait chaud. Ils ne leur donnent pas assez à manger tous les jours.
 
Cela est dû à un manque d’informations ou de sensibilisation ? Ou, est-ce tout simplement une  négligence de leur part ?
Ils prennent les animaux pour des objets ou des jouets. Ils prennent souvent un petit chiot pour amuser les enfants. On les chouchoute dans ce cas. Mais quand ils grandissent, on leur donne un coup de pied. On leur lance des pierres pour qu’ils ne viennent pas embêter. Ces cas sont peut-être quand même plus spécifiques à la Polynésie. Mais ce n’est pas mieux en France où l’on voit des gens offrir des chiens à Noël qui sont ensuite abandonnés sur le bord de la route lors du départ en vacances.
 
Etes-vous confrontée à d’autres problématiques concernant les animaux à Moorea ?
On n’en voit pas d’autres à part la maltraitance ou la stérilisation. Il faut que les gens demandent de l’aide aux associations ou à la commune lorsqu’ils ont des problèmes. Ils devraient appeler la commune à chaque fois qu’ils ont un problème, lorsqu’ils ont trop de chiens par exemple. Pendant un temps, la commune de Moorea-Maiao participait à la stérilisation des chiens. Mais cela n’a pas duré longtemps.
 
Est-ce que vous pensez justement que la commune a un rôle à jouer dans l’amélioration de la situation des animaux ?
La commune de Moorea-Maiao devrait faire ce que l’on fait déjà. Elle devrait ouvrir une sorte de refuge propre, pas comme les deux cages qu’ils ont à Afareaitu.  Elle devrait prendre exemple sur ce qui a été fait à Huahine. Le maire de Huahine aide SOS Huahine Animara qui a pu faire un recensement de tous les animaux sur toute l’île. Le maire a fait travailler des personnes qui sont allées dans les servitudes pour recenser tous les chiens et les chats. Après avoir eu les chiffres du recensement, ils ont écrit à la fondation Brigitte Bardot. Cette association va leur envoyer dix vétérinaires qui viendront sur l’île pour opérer gratuitement 1500 chiens. L’association Eimeo Animara a écrit aussi à l’association Brigitte Bardot. Elle nous a répondu qu’elle était prête si le maire de Moorea voulait bien faire comme celui de Huahine. Il faudrait donc que le maire nous aide. Il suffirait qu’il y ait deux personnes, des services civiques ou des employés de la commune, dans toutes les servitudes de manière à ce qu’on puisse collationner ces renseignements et les envoyer à l’association Brigitte Bardot. Vous savez que notre association compte quatre membres bénévoles. On ne peut pas tout faire. Tout notre temps libre sert aux animaux. Je cumule moi-même l’accueil téléphonique, la page Facebook, le Messenger ainsi que la comptabilité de l’association, dont les coûts s'élèvent à 300 000 Fcfp par mois. Je vais aussi sur le terrain pour aller nourrir les chiens.
 
D’où viennent vos préoccupations pour les animaux ?
Mon mari et moi sommes venus en Polynésie française il y a 20  ans en emmenant avec nous notre chien de métropole. En le promenant, on a vu tous les autres chiens malheureux. On en a adopté un, puis deux, puis trois, etc. On est devenus par la suite une famille d’accueil. On a ensuite intégré l’association Eimeo Animara. On espère que d’autres personnes prendront en charge l’association après nous… on prend de l’âge.

Rédigé par Toatane Rurua le Lundi 12 Octobre 2020 à 07:36 | Lu 1036 fois