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Après 25 ans de paix, Caldoches et Kanaks toujours pas sur un pied d'égalité


Après 25 ans de paix, Caldoches et Kanaks toujours pas sur un pied d'égalité
NOUMÉA, 26 juillet 2013 (AFP) - Vingt cinq ans après les accords de Matignon, le rééquilibrage social et ethnique entre Européens et Kanaks demeure un enjeu clé en Nouvelle-Calédonie où Jean-Marc Ayrault est arrivé vendredi pour un déplacement de trois jours.

Dans cet archipel du Pacifique sud, la France espère faire aboutir dans la paix le processus de décolonisation initié par les accords de Matignon puis confirmé par celui de Nouméa en 1998.

La visite du Premier ministre intervient à l'aube d'échéances cruciales. En mai 2014, les élections provinciales marqueront le début du dernier mandat de l'accord de Nouméa, au cours duquel un référendum d'autodétermination doit être organisé.

En Nouvelle-Calédonie, ces perspectives électorales creusent les divisions au sein des deux grandes familles politiques, droite non-indépendantiste et indépendantistes, mais depuis la réconciliation de "Matignon" jamais la paix civile n'a été remise en question.

En 25 ans, le visage de l'archipel a considérablement changé. Les provinces du nord et des îles Loyauté, majoritairement kanakes et sous développées, se sont dotées de nombreux équipements: dispensaires, hôpitaux, lycées, électrification, routes, etc.

Le programme Cadres Avenir a permis la formation de près de 1.000 cadres kanaks tandis que le Centre Culturel Tjibaou, dernier des grands travaux de François Mitterrand inauguré en 1998, a consacré la reconnaissance de la civilisation millénaire des Kanaks.

La construction de logements sociaux, la mise en place d'une couverture sociale généralisée, la création d'une université ou encore la redistribution de terres illustrent également cette dynamique.

En avril dernier, le projet phare du rééquilibrage économique, fruit d'un long combat des indépendantistes, a été inauguré. L'usine de traitement de nickel Koniambo de taille mondiale est entrée en production dans le nord, à Voh.

Cette unité, que visitera Jean-Marc Ayrault, repose sur un partenariat inédit dans l'industrie minière entre le géant suisse Glencore-Xstrata et la SMSP, société publique des Kanaks de la province nord, qui détient 51% du capital de Koniambo.

Inégalité ethnique devant l'école

Malgré ces évolutions, la société calédonienne reste marquée par de profondes inégalités. Le PIB par habitant (28.570 euros en 2011) est supérieur à celui de la Nouvelle-Zélande, mais l'Indice de développement humain (IDH) est équivalent à celui d'il y a 18 ans dans l'Hexagone.

En mai dernier, des milliers de personnes sont descendues dans la rue pour dénoncer la vie chère et l'injustice de la fiscalité, qui pèse lourdement sur les salaires et peu sur le capital. Les syndicats ont conclu un accord avec les autorités pour tenter de réformer l'économie.

En moyenne, les prix sont en Nouvelle-Calédonie 34% plus élevés qu'en métropole alors que le salaire minimum y est 30% inférieur.

A la périphérie de Nouméa, quelque 10.000 personnes vivent dans des cabanes en tôle et en bois. Nombre de ces familles sont originaires des îles Loyauté, en proie à l'exode de sa population faute de développement économique en dépit des milliards d'argent public déversés.

L'inégalité ethnique devant l'école est également patente, témoignant d'une difficulté d'adaptation à son environnement culturel alors que l'enseignement primaire et secondaire ont été transférés aux autorités locales.

A peine 12% des lauréats au bac S sont d'origine kanak et seul un jeune Kanak sur 20 est diplômé de l'enseignement supérieur contre un Européen sur 5.

Malgré la progression de la délinquance juvénile et de taux de suicide, d'alcoolisme et de consommation de cannabis alarmants chez les jeunes Océaniens, aucune politique publique d'envergure n'a été menée à ce jour.

"La pauvreté morale et culturelle émerge de façon marquante. On voit de plus en plus de jeunes perdus entre la culture kanake et la culture occidentale. Les valeurs coutumières et religieuses, le respect dans anciens se perdent", déplore Jeff Kerrand, responsable du Secours catholique. cw/sla

Rédigé par Par Claudine WERY le Vendredi 26 Juillet 2013 à 05:57 | Lu 648 fois