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Antilles: le chikungunya pris en charge à 100%, l'épidémie grimpe à 115.000 cas


Antilles: le chikungunya pris en charge à 100%, l'épidémie grimpe à 115.000 cas
POINTE-À-PITRE, 17 juillet 2014 (AFP) - Venue au chevet des Antilles qui luttent contre une épidémie de chikungunya qui a déjà touché 115.000 personnes, Marisol Touraine a annoncé la prise en charge à 100% par la Sécu du traitement de la maladie de "l'homme courbé".

La ministre de la Santé a atterri mercredi soir en Guadeloupe pour une visite de deux jours aux Antilles, qui la conduira également en Martinique à partir de jeudi soir.

A son arrivée à Pointe-à-Pitre, elle a annoncé deux décisions : "prise en charge à 100%" par l'assurance-maladie "des médicaments anti-douleurs et contre la fièvre sur présentation d'une ordonnance chikungunya" et "suppression des jours de carence pour les arrêts de travail répétés" liés à la maladie. Deux mesures qui s'appliqueront pendant toute la durée de l'épidémie.

"C'est une excellente décision ! Ca peut permettre à des gens qui tombent malade ou qui font une rechute de ne pas perdre de salaire ou pas trop", a réagi Béatrice Résid, directrice adjointe de la Sécurité sociale de Guadeloupe. Elle a constaté une hausse de 40% des arrêts maladie, avec un rythme de 150 par jour, "liés au chik, c'est net". "Et les arrêts de courte durée sont mal indemnisés", a-t-elle rappelé, une donnée importante dans un territoire où la précarité est forte.

Le virus du chikungunya, transmis par les piqûres de moustiques, est apparu aux Antilles et en Guyane fin 2013, touchant pour la première fois des territoires déjà habitués à la dengue, autre maladie véhiculée par les moustiques et endémique aux Antilles.

Le dernier point épidémiologique de l'Institut de veille sanitaire (InVS) publié jeudi, confirme le caractère "majeur" de l'épidémie dont on ne sait encore si elle a atteint son pic : 115.000 cas de chikungunya (dont 63.000 en Guadeloupe et 44.000 en Martinique) ont été recensés aux Antilles, pour près de 850.000 habitants. Soit 15.000 cas de plus qu'il y a quinze jours.

"Ces chiffres sont certainement en deçà de la réalité car de moins en moins de gens vont chez le médecin", a toutefois souligné Alain Blateau de la Cellule interrégionale d'épidémiologie (CIRE) Antilles-Guyane, car de plus en plus de gens ont dans leur entourage une personne l'ayant eu et savent donc comment réagir.

L'épidémie a pour l'heure provoqué 39 décès, selon le même bilan, des personnes âgées, déjà fragilisées, qui ne résistent pas au virus. Le chikungunya provoque des fièvres et des douleurs articulaires contre lesquelles aucun traitement spécifique n'existe si ce n'est le paracétamol.

- Traquer les larves -

"Nous sommes à un moment clé de cette épidémie : nous avons les moyens de la limiter (...) la meilleure solution est de se protéger et d'éviter la propagation", a fait valoir Marisol Touraine jeudi sur Radio Caraïbe Internationale.

La ministre a aussi demandé à la population de ne pas se laisser aller à la "fatalité", lors d'une visite de la commune de Baillif (5.300 habitants).

"Il faut rappeler ces gestes simples qui peuvent lasser mais qui sont utiles", a-t-elle lancé, comme mettre du répulsif, porter des vêtements longs, avoir des moustiquaires, détruire tout ce qui pourrait faire office de gîte larvaire.

"Il faut les traquer partout, dans les fûts, les jardins, les gouttières, les coupelles de pots de fleurs, les ravines", a égrené la ministre, à la fin de son parcours dans cette petite ville de 5.300 habitants, où des "brigades anti-chik" font aussi du porte à porte.

Dans l'immédiat, elle a incité aussi les collectivités à se saisir des moyens mis à leur disposition : 100 emplois aidés (payés à 95% par l'Etat) sont débloqués mais seules 42 demandes ont été présentées à la préfecture.

Elle a aussi assuré avoir pris la mesure de l'épidémie "dès le début" et rappelé les renforts de professionnels de santé, envoyés via l'Etablissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (EPRUS), comme au centre hospitalier de Basse-Terre.

La "crise du chik" met en lumière les failles de l'offre de soins en Guadeloupe : dans cet hôpital, qui accueille beaucoup de personnes âgées atteintes du chik, "l'hospitalisation est surtout due à la perte d'autonomie plus qu'à un réel besoin de prise en charge spécialisée", a relevé Nicolas Baillet, responsable d'un service de médecine.

"Ces malades ont besoin de +nursing+ et ça ne devrait pas se faire ici, mais la Guadeloupe manque d'établissements de soins de suite et d'aide à domicile", a expliqué le médecin. Le vieillissement de la population, des structures familiales plus éclatées expliquent aussi ce recours à l'hôpital. Le nombre de maisons de retraites médicalisées devrait passer de 8 à 16 d'ici à 2015.

Rédigé par AFP le Vendredi 18 Juillet 2014 à 00:28 | Lu 441 fois