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Alerte à la petite fourmi de feu à Raiatea


©Association Vai Ava
©Association Vai Ava
Raiatea, le 28 avril 2022 – L’inquiétude grandit face à la progression de la petite fourmi de feu sur l’île Sacrée où elle a déjà touché 31 hectares. L’association Vai Ava tire la sonnette d’alarme, puisque de nouvelles zones  ont récemment été détectées dans une certaine indifférence générale. Mireille Vaissiere, la vice-présidente de l'association recherche désespérément un interlocuteur au niveau du Pays.
 
La petite fourmi de feu (PFF) a été détectée en 2016 sur l’île de Raiatea, dans la vallée de Faatemu, entre Puohine et Fetuna. En décembre dernier, l’association Vai Ava avait déjà constaté sa grande progression sur la zone. Il y a deux semaines, sa présence a aussi été constatée sur une zone d’1,64 hectare au cœur de Opoa. Celle-ci devrait être traitée rapidement grâce programme Protege du Marae de Taputapuatea, qui lutte contre les espèces envahissantes.
 
Le week-end dernier, des prises d’échantillons ont été réalisés à Faaroa, suite à de sérieux doutes. Il y a donc de gros risques qu’il y ait également une zone infestée à cet endroit. Ces récentes découvertes portent donc à trois les zones envahies par la PFF à Raiatea. De plus, en début d’année, elle a aussi été découverte à Taha’a, sur une zone de 3,12 hectares chez un particulier dans le secteur de Vaitoare.
 
31 hectares touchés 
 
Il y a deux ans, les habitants de Faatemu ont constaté une progression de l'insecte. L'association a porté un projet auprès de l'Office français de la biodiversité et de terres et mers Ultramarines. Quatre objectifs s’en dégageaient. Tout d'abord, mettre à jour la cartographie qui datait de 2016, cela a été fait en décembre 2021. De 2,6 hectares touchés en 2016, la zone est passée à 31 hectares (voir carte) et une projection pour le futur a également été établie. L'autre objectif était de poser des panneaux de signalisation. Quatre ont été mis en place de chaque côté de la route traversière, du PK 5 à la fin de la route. Il est fortement déconseillé de se garer au bord de la route dans cette zone et d’y cueillir des végétaux. Ensuite, une autre étape a consisté à recruter des écosentinelles afin de faire le lien entre les particuliers et l'association pour faire remonter les éventuelles nouvelles zones touchées. Elle fait également appel aux bénévoles qui souhaiteraient y participer afin d’en avoir dans chaque commune et district de l’île. Enfin, l'association organise des réunions publiques afin de sensibiliser et informer la population. Plusieurs ont été organisées tout autour de l’île mais peu de personnes se sont déplacées, “on était en moyenne entre 6 et 8 personnes”.
 
À la recherche d'un interlocuteur du Pays

Un désintérêt dont se désole Mireille Vaissiere, la vice-présidente de l'association Vai Ava. Elle se sent démunie puisqu’elle n’a reçu aucune réponse de la part des mairies, hormis Thomas Moutame, tāvana de Taputapuatea et directeur de la Chambre d’agriculture et de la pêche lagonaire, qui a réagi et se sent impliqué. L’association est également en attente d’une réunion de la Circonscription des îles Sous-le-Vent, qui devrait réunir la Direction de l’agriculture, la Direction de l’environnement, l’Équipement et les autres services concernés au sujet de Faatemu.
 
Mireille rappelle “qu’en 2016, une zone à Bora Bora avait été détectée. Le maire de l’époque, Gaston Tong Sang, avait pris des dispositions et fait traiter toute la zone, ce qui fait que Bora n’est à ce jour, normalement, plus contaminée.” L’objectif actuellement est donc de faire une barrière chimique sur les 31 hectares de Faatemu pour éviter la propagation, en défrichant tout autour et en réalisant un traitement intérieur par zone. Pour l’instant, le devis pour l’épandage par drone s’élève à 3,5 millions de Fcfp. Or, il faudrait entre quatre et cinq épandages. Mireille en appelle donc aux moyens, et aimerait avoir un interlocuteur du Pays afin de connaître “la politique du Pays sur le plan environnemental concernant la petite fourmi de feu ? Y-a-t-il un budget qui peut être alloué ou laisse-t-on les petites associations se débrouiller toutes seules ?”

Contacts
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Téléphone 87 79 07 31
Email [email protected]

Mireille Vaissiere, vice-président de l'association Vai Ava
“ Il faut que tout le monde se sente concerné”
 
“La petite fourmi de feu circule à Raiatea, et il y a de forts risques pour qu’il y ait d'autres zones impactées qui n’ont pas encore été détectées. J’en appelle à la population, si vous pensez être touchés par la petite fourmi de feu, ne le cachez pas ! Parce que cela serait catastrophique pour les deux poumons économiques de l’île qui sont l’agriculture et le tourisme. S’ils viennent à être impactés par la petite fourmi de feu, tout le monde sera impacté. Il faut que tout le monde se sente concerné car c’est nous qui transportons la petite fourmi par des comportements involontaires. Les gens qui sont touchés par la petite fourmi ne doivent pas culpabiliser, ce n’est pas de leur faute, ce peut-être par leurs voisins, par la route… On va rentrer en période de heiva en plus, donc pour faire les costumes, on va aller chercher des végétaux autour de l’île. Il faut faire très attention à cela. Si vous pensez être touchés par la petite fourmi, ou même que vous avez une question, un doute, nous nous déplaçons. Mieux vaut s’en assurer que de laisser dégénérer la situation. Il faut être vigilants sur le transport de tout ce qui a touché la terre et tout inspecter.”

La difficulté de son éradication

La petite fourmi de feu mesure 1 à 2 mm et est donc plus petite que la fourmi rouge classique. Elle est omnivore et s’attaque à la végétation, aux œufs dans les nids d’oiseaux, aux ruches… Les agriculteurs, les pépiniéristes et les apiculteurs sont donc les plus touchés. Elle fait partie des cent espèces au monde les plus envahissantes (ISSG, 2012). Sa piqûre, qui ressemble à une brûlure, étant très douloureuse, les particuliers envahis par la PFF sont obligés de nettoyer les espaces de vies avant de pouvoir les utiliser, “comme secouer l’oreiller et le matelas pour espérer dormir tranquille”. La PFF fonctionne avec un système de reines. Les reines pondent 70 œufs par jour, qui donneront des ouvrières ou de nouvelles reines. Or, seulement deux mois après leurs naissances, ces nouvelles reines pondent également jusqu’à 70 œufs par jour, parmi lesquelles de nouvelles reines et ainsi de suite. Elles forment alors des “supercolonies”. La PFF ne fait pas de fourmilière comme les fourmis classiques, mais des nids qui peuvent se situer par terre comme sur le haut des arbres. Il est alors complexe de les éradiquer. D’autant plus que les nids sont interconnectés, c'est-à-dire qu’ils communiquent entre eux. Tuer un seul nid ne sert à rien car les reines alentours le referont automatiquement. Il faut pouvoir éradiquer l'ensemble de la supercolonie. Enfin, la PFF étend son territoire de 50m à 150m par an, et une reine vit en moyenne un an. C’est pourquoi le traitement dure 1 an, à raison d’une pulvérisation d’insecticide tous les mois et demi.

Détecter la petite fourmi de feu dans son jardin

- Prendre une quinzaine de bâtonnets, y mettre un peu beurre de cacahuète. Les positionner à différents endroits ombragés à l’abri du vent et de la pluie
- Après 30 minutes, mettre le bâtonnet dans un sachet hermétique ou une bouteille qui ferme bien
- Observer. La PFF est plus petite que les fourmis classiques (1 à 2 millimètres), de couleur orangée presque transparente, et se déplace lentement
- Si vous avez le moindre doute, contactez l’association

Localisation et évolution de la Petite Fourmi de Feu de 2016 à 2021


Projection de l’évolution de la colonie de la PFF de 2026 à 2041


Rédigé par V.Leroi le Jeudi 28 Avril 2022 à 16:24 | Lu 1496 fois