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Aide à mourir: le gouvernement ne masque pas ses divisions


Fred TANNEAU / AFP
Fred TANNEAU / AFP
Paris, France | AFP | lundi 12/05/2025 - Le gouvernement ne masque pas ses divergences sur la proposition de loi sur l'aide à mourir : François Bayrou est lui-même assez réservé et des ministres LR sont montés au créneau contre le texte avant même le début de son examen ce lundi à l'Assemblée.

Fer de lance de cette opposition, Bruno Retailleau a dénoncé ce week-end un texte "profondément déséquilibré" et qui "fait sauter tous les verrous". 

"S’il était voté en l’état, il deviendrait plus facile de demander la mort que d’être soigné", n'a pas hésité à affirmer le très catholique et conservateur ministre de l'Intérieur.

Autre LR du gouvernement, la porte-parole Sophie Primas est sortie de sa traditionnelle réserve lundi matin.

Tout en déclarant "ne pas savoir ce qu'elle voterait" si elle était encore sénatrice, elle n'a pas caché son opposition de fond, renvoyant à une tribune publiée sur le site de l'Humanité par un collectif inconnu, "de citoyens et de soignants de gauche", qui appelle à rejeter une loi "antisociale et validiste" (discriminante envers les personnes vulnérables).

Da façon plus nuancée, le ministre MoDem des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot a affirmé dimanche que, "tel qu'il est sorti de commission", le texte "va trop loin" pour "sa conscience", rejoignant ainsi les réserves du Premier ministre.

Catholique pratiquant, se voulant héritier de la démocratie-chrétienne, François Bayrou n'a pas masqué ses réserves depuis sa nomination à Matignon. 

Au grand dam des partisans du suicide assisté, comme la présidente de l’Assemblée Yaël Braun-Pivet, il a décidé de scinder le texte en deux propositions de loi, l'une plutôt consensuelle sur les soins palliatifs et l'autre sur l'aide à mourir, rendant ainsi plus facile l'expression de l'opposition à cette dernière.

Début mai, tout en disant ne pas être "aveugle" car "il existe des cas de souffrance et de désespoir que nul ne peut ignorer", le locataire de Matignon a affirmé être "spontanément du côté du soin et de la défense de la vie" dans un entretien au JDD. 

Le lendemain, lors d'un discours devant les francs-maçons de la Grande Loge de France, Emmanuel Macron - qui avait ouvert la voie l'année dernière à l'adoption d'un projet de loi avant que son examen ne soit interrompu par la dissolution - lui avait indirectement répondu en affirmant que le débat ne pouvait "être réduit" à pour ou contre la vie, mais devait poser la question du "moindre mal".

- Vautrin "pense l'inverse" de Retailleau -
Au sein du gouvernement, c'est l'ex-LR Catherine Vautrin (plus allante sur le sujet que son ministre LR chargé de la Santé Yannick Neuder), qui portera le texte à l'Assemblée et est devenue de facto la voix de ses partisans. 

Comme d'autres responsables, elle a reconnu avoir "évolué" par "son expérience de vie" même si elle défendra plusieurs amendements pour encadrer strictement le recours à l'aide à mourir.

Du fait de ces amendements, Mme Vautrin "pense exactement l'inverse" de Bruno Retailleau quand celui-ci parle de "texte de l'abandon". Le garde des Sceaux Gérald Darmanin a aussi fait part de son "désaccord profond" avec son homologue de l'Intérieur.  

"Elisabeth Borne, Gérald Darmanin, Manuel Valls ont tous les trois dit qu'ils soutenaient totalement ce texte, cela fait trois ministres d'Etat sur quatre. Donc il ne faudrait pas réduire la position du gouvernement à celle très dure de Bruno Retailleau", note le rapporteur du texte Olivier Falorni (apparenté MoDem).

Il espère que le gouvernement ne va pas chercher à faire trainer les débats en longueur entre l'Assemblée et le Sénat jusqu'à la fin du quinquennat.

"Si le Parlement n'était pas en mesure de s'exprimer sur un sujet de société aussi majeur, qui est le fruit d'une convention citoyenne, ce serait un problème de fonctionnement de notre démocratie", prévient-il.

le Lundi 12 Mai 2025 à 07:47 | Lu 234 fois