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Affaire des "écoutes" en appel: l'accusation affirme la culpabilité de Nicolas Sarkozy


Emmanuel DUNAND / AFP
Emmanuel DUNAND / AFP
Paris, France | AFP | mardi 13/12/2022 - Le ministère public a débuté mardi ses réquisitions en affirmant la culpabilité de Nicolas Sarkozy, rejugé à Paris pour corruption et trafic d'influence dans l'affaire des "écoutes" avec son avocat historique et un ancien haut magistrat.

"Je soutiendrai une confirmation du jugement attaqué concernant la culpabilité", a déclaré d'emblée l'avocate générale Muriel Fusina en début d'après-midi.

Elle a décrit un "procès hors norme", d'abord du fait de "l'intérêt social protégé auquel les faits ont porté atteinte: l'indépendance de la justice, principe fondamental, garantie de l'Etat de droit".

"Il tient également à la qualité des prévenus dont l'un a été institutionnellement, constitutionnellement, garant de l’intérêt que je viens d'évoquer", a-t-elle poursuivi.

Ce caractère "hors norme" est aussi dû, selon la magistrate, à "l'objectif qui était recherché", "impensable pour nous tous", et par le "combat procédural mené" par la défense "pendant et après l'instruction".

En première instance, il y a deux ans, le parquet national financier (PNF) a requis quatre ans d'emprisonnement, dont deux ferme, à l'encontre des trois hommes, avec une interdiction professionnelle de cinq ans pour Me Herzog.

Le 1er mars 2021, le tribunal correctionnel a choisi une peine plus légère: trois ans de prison dont un an ferme, avec l'interdiction requise pour l'avocat. Cette décision a néanmoins fait de Nicolas Sarkozy le premier ancien président de la Ve République condamné à de la prison ferme.

Depuis le début du procès en appel le 5 décembre, l'ex-chef de l'Etat de 67 ans se démène à la barre pour clamer son innocence "avec la plus grande force", laver son "honneur" et contester avoir jamais corrompu "qui que ce soit".

Fondées sur des interceptions de ses conversations avec Me Herzog sur une ligne ouverte sous l'alias "Paul Bismuth", les accusations qui pèsent sur lui remontent au début 2014.

"L'arbre qui cache la forêt"

L'ancien président est soupçonné d'avoir alors bénéficié, via son avocat, d'informations confidentielles obtenues par M. Azibert sur un pourvoi qu'il avait formé devant la Cour de cassation dans l'affaire Bettencourt pour s'opposer à la saisie de ses agendas présidentiels.

En contrepartie, M. Azibert, alors avocat général à la Cour de cassation, aurait reçu la promesse d'un "coup de pouce" de Nicolas Sarkozy pour décrocher un poste au Conseil d'Etat de Monaco, qu'il n'aura finalement pas.

Les écoutes sur la ligne "Bismuth" ont été diffusées le 6 décembre pour la première fois dans une salle d'audience.

Dans ses premiers mots, Mme Fusina a longuement défendu l'enquête du PNF, vivement contestée par la défense, qui visait à identifier une potentielle "taupe" ayant informé Thierry Herzog et Nicolas Sarkozy que la ligne "Bismuth" était sur écoute.

Parlant d'un "étendard destiné à masquer" les faits, de "l'arbre qui cache la forêt", elle a soutenu qu'il s'agissait d'une "enquête diligentée dans le plus strict respect des dispositions légales en vigueur".

Cette enquête a finalement été classée sans suite six ans après son ouverture - la défense estime qu'elle leur a été "cachée".

"Pour ma part, je suis convaincue qu'ils ont été informés",  conclu l'avocate générale, "je ne sais ni comment ni par qui" mais "cela ne change rien à la caractérisation des infractions de corruption et de trafic d'influence".

Elle a ensuite répondu à la deuxième critique principale de la défense: la légalité des écoutes au cœur du dossier, au nom du secret des conversations entre un avocat et son client.

"Le secret professionnel de l'avocat ne saurait être absolu", a-t-elle souligné, affirmant la "légalité" des écoutes, autorisées si elles laissent paraître "des indices de participation d'un avocat à une infraction".

Le second avocat général doit prendre sa suite pour développer les arguments de l'accusation sur le fond.

le Mardi 13 Décembre 2022 à 05:51 | Lu 306 fois