Tahiti Infos

Affaire « Papy Ellis » : Le procès se tient sans Tamatoa Alfonsi


Tamatoa Alfonsi ce mardi au tribunal de Papeete.
Tamatoa Alfonsi ce mardi au tribunal de Papeete.
PAPEETE, le 15 janvier 2019 - Le procès de l’affaire dite "Papy Ellis" s’est ouvert ce mardi devant le tribunal correctionnel. Dans ce dossier, onze personnes sont poursuivies pour avoir participé à l’importation et à la revente d’environ 1,6 kilogramme d’ice au cours de l’année 2017. Tamatoa Alfonsi, qui devait également comparaître aux côtés de ses co-prévenus durant les trois jours d’audience, a demandé un délai pour préparer sa défense. Il sera donc jugé le 19 février prochain.

Bien que l’on ait nommé cette affaire du nom de l’un de ses prévenus, Frédéric Ellis, il semble pourtant que le personnage central de ce dossier soit un autre prévenu, Poutoru Amaru. À la barre du tribunal correctionnel ce mardi, le jeune homme est hâbleur et souriant. Il reconnaît avoir organisé plusieurs voyages entre la Californie et la Polynésie française afin d’importer de l’ice. L’homme comparaît auprès de huit autres prévenus dont le multirécidiviste, Franckie Tumahai, et Frédéric Ellis, dit "Papy Ellis". Deux autres prévenus sont absents : Jud Zimmerman, qui possède la nationalité américaine, a réussi à rejoindre les États-Unis malgré un contrôle judiciaire lui interdisant de quitter le territoire. Tamatoa Alfonsi, dont l’avocat a été saisi le 11 janvier dernier, a demandé un renvoi pour préparer sa défense. L’homme, interpellé au Mexique, sera jugé le 19 février prochain.


Renseignement anonyme

Cette affaire avait été mise au jour sur la base d’un renseignement anonyme qui avait permis l’arrestation de Frédéric Ellis et d’une autre mule le 22 juin 2017 à l’aéroport de Tahiti-Faa’a. À eux deux, ces individus transportaient 495 grammes d’ice in corpore. L’enquête avait permis de révéler un trafic portant sur une dizaine de voyages pour une quantité totale avoisinant 1,6 kilogramme de méthamphétamines. Si Poutoru Amaru apparaissait comme le principal commanditaire, certains voyages avaient également été organisés par Jud Zimmermam et Eremoana Tamuera. Frédéric Ellis occupait principalement le rôle de mule en ayant cependant investi 2500 dollars à une reprise. Tamatoa Alfonsi officiait, quant à lui, en qualité de financier.



Menace sur les territoires du Paficique sud

Durant la première journée de procès ce mardi, Frédéric Ellis et Poutoru Amaru ont été longuement interrogés. Dès le début de l’audience, en revenant sur toutes ses déclarations faites durant l’instruction, Frédéric Ellis a tenté de blanchir Tamatoa Alfonsi. L’homme, qui reconnaît les faits, possède un lourd passé judiciaire puisqu'il a été condamné à vingt ans de prison en 2002, pour des viols commis sur sa fille et sa belle-fille.

Mais l’intervention la plus marquante de cette journée aura certainement été celle de Poutoru Amaru. Du haut de ses 25 ans, le jeune homme a apporté des réponses fournies qui étaient entrecoupées de grands sourires. Visiblement pas mécontent de s’exprimer, Poutoru Amaru a expliqué qu’au cours d’un voyage avec Frédéric Ellis, ils avaient dépensé pas moins de 9000 dollars en une nuit, alors qu’ils se trouvaient à Hollywood. Interrogé sur la destination de cet argent, le trafiquant a notamment expliqué qu’il avait distribué des "tips" à tour de bras.

Plus tôt dans la journée, le président du tribunal avait tenu à lire un document des services américains de sécurité intérieure. Dans ce dernier, rédigé en février 2018, il était indiqué que la "forte augmentation du trafic d’ice menace de plus en plus les territoires du Pacifique sud".

Le procès devrait s’achever demain.

Me Bennouar, conseil de Tamatoa Alfonsi

"Mon client a été présenté devant le tribunal correctionnel après l’exécution d’un mandat d’arrêt. La difficulté de ce dossier, indépendamment du renvoi avec la disjonction, est sa position dans cette affaire. Le renvoi était bien évidemment acquis puisque c’est l’exercice naturel et élémentaire des droits de la défense et l’on peut légitimement attendre d’un tribunal qu’il permette à son défenseur d’organiser sa défense. Le parquet avait demandé la disjonction par écrit, avait réitéré cette demande oralement, l’avait soutenue à l’audience, mais cela avait toujours été refusé. Étrangement, aujourd’hui, le tribunal a accepté en prenant le contre-pied de ses précédentes décisions et de la décision du juge d’instruction. Tout cela est dit sous réserve puisque je ne connais pas encore le détail de l’affaire sur le fond et peut-être que le fond nous révélera un dossier où la présence de Tamatoa Alfonsi n’était pas aussi importante, cruciale et déterminante pour les débats. L’on peut cependant se demander pourquoi le mandat d’arrêt le concernant n’a été signifié que ce matin [mardi matin, NDLR]. Ce qui m’interpelle le plus, c’est l’évolution du dossier, puisque le juge d’instruction a délivré un mandat d’arrêt alors que l’on savait pertinemment où se trouvait mon client, il avait été parfaitement localisé. Il y a une forme de tardiveté qui est le fait de l’instruction qui aurait pu être plus diligente."

Rédigé par Garance Colbert le Mardi 15 Janvier 2019 à 17:19 | Lu 4526 fois