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​La gérante de Haumani Sécurité condamnée pour avoir détourné 15 millions


​La gérante de Haumani Sécurité condamnée pour avoir détourné 15 millions
Tahiti, le 12 août 2020 - Le tribunal correctionnel de Papeete a condamné mardi l’ancienne gérante de la société Haumani Sécurité à un an de prison avec sursis pour abus de bien sociaux. La prévenue, à laquelle il était notamment reproché d’avoir détourné 15 millions de Fcfp, a en revanche été relaxée des faits de banqueroute pour lesquels elle était également poursuivie. 
 
Il fut un temps où, tel que l’a rappelé le président du tribunal correctionnel de Papeete mardi, la société Haumani Sécurité employait « jusqu’à deux cents » personnes et avait
« pignon sur rue au fenua » dans son secteur. Vaiana Haumani, la gérante de cette société qui se trouve désormais en liquidation judiciaire, a en effet comparu mardi devant cette juridiction pour répondre des faits d’« abus des biens ou du crédit d’une SARL par un gérant à des fins personnelles » et de « banqueroute, détournement ou dissimulation de tout ou partie de l’actif » commis entre le 1er janvier 2010 et le 31 décembre 2013. 
 
Il lui était d’abord reproché de s’être « octroyé une rémunération excessive » à hauteur de 15 millions de Fcfp sans « aucune contrepartie comptable ». Elle était ensuite poursuivie pour avoir tenté de dissimuler le détournement de cette somme en ayant maquillé la comptabilité de son entreprise, alors que cette dernière venait d’être placée en redressement judiciaire à la suite d’une assignation en redressement devant le Tribunal de commerce (TMC) de la Caisse de prévoyance sociale (CPS), envers laquelle elle était redevable à hauteur de 80 millions de Fcfp. 
 

Acomptes personnels

Assistée de Me François Quinquis, la gérante de l’entreprise "familiale" a expliqué à la barre qu’elle avait utilisé ces 15 millions pour faire verser des « acomptes » à ses employés de l’époque. Poussée dans ses retranchements par le président du tribunal, elle a finalement concédé qu’elle s’était également versée des acomptes personnels en assurant que ces sommes avaient été déduites de ses salaires. Une explication fragile qui n’a pas convaincu le parquet qui a demandé à plusieurs reprises les éléments comptables qui permettaient de confirmer ces déclarations. Confrontée aux faits de banqueroute qui lui étaient également reprochés, la quadragénaire a invoqué la responsabilité de son comptable de l’époque en soulignant sa propre ignorance dans le domaine de la comptabilité. 
 
Lors des débats, le président du tribunal a déploré l’ancienne gestion de cette entreprise,
« organisée avec une structure juridique et comptable complètement déconnectée des sommes en jeu et du nombre de salariés ». « C’est triste de voir qu’une telle entreprise, qui était connue en Polynésie, ait été gérée de cette manière », a-t-il ainsi commenté avant de relever que l’entreprise était passée du statut d’entreprise unipersonnelle à celui de SARL sans que la façon de gérer de Vaiana Haumani ait été adaptée.

Interdiction d’exercer

Pour le procureur de la République, qui a requis un an de prison avec sursis et cinq ans d’interdiction de gérer une entreprise à l’encontre de la prévenue, cette dernière n’est pas une « délinquante en puissance ». Mais elle est venue mardi « les mains vides sans avoir fourni la preuve comptable que ces sommes aient bien été des avances sur salaire destinées à ses employés de l’époque ». Pour le représentant du ministère public, les acomptes que Vaiana Haumani se versait à elle-même « sont venus en sus de sa rémunération » et n’étaient donc pas « complémentaires » de son salaire. 
 
Pour la défense de la prévenue, Me François Quinquis a tout d’abord soulevé la prescription des faits d’abus de biens sociaux en expliquant que, selon lui, le dernier acte d’enquête dans cette affaire datait de 2014. Puis, s’attardant sur l’infraction de banqueroute, il a affirmé que cette dernière n’était pas constituée puisqu’il « ne ressort pas du dossier » que sa cliente avait « manifestement essayé de trafiquer les comptes de sa société ». L’avocat a conclu sa plaidoirie en expliquant que sa cliente avait « reversé » des acomptes à ses employés car « les gens sont solidaires au fenua »
 
Après en avoir délibéré, le tribunal correctionnel a finalement suivi les réquisitions du parquet et a condamné la prévenue pour les faits d’abus de biens sociaux à un an de prison avec sursis et à l’interdiction de gérer une société pendant cinq ans. Il a cependant considéré qu’elle n’avait pas sciemment essayé de maquiller sa comptabilité et l’a donc relaxée du chef de banqueroute pour lequel elle était poursuivie. Au terme de ce délibéré, le conseil de la prévenue, Me François Quinquis, a indiqué que cette décision était un « non-événement » en précisant toutefois qu’il se réservait le droit de faire appel. 

 

Rédigé par Garance Colbert le Mercredi 12 Août 2020 à 14:33 | Lu 8540 fois