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​Un assassinat au rôle des assises


Tahiti, le 17 novembre 2025 - Lors de la dernière session de la cour d'assises de l'année, qui se déroulera du 21 novembre au 5 décembre, les jurés jugeront un homme de 48 ans poursuivi pour avoir porté de nombreux coups de couteau à l'un de ses voisins qui était décédé le 25 janvier 2023 à Faa'a.
 
Du 21 novembre au 5 décembre, quatre affaires seront jugées par la cour d'assises de Papeete dont une portant sur des faits d'assassinat passibles de 30 ans de réclusion criminelle.
 
Les faits s'étaient déroulés le matin du 25 janvier 2023 à Faa'a lorsque l'accusé avait porté 13 coups de couteau à l'un de ses voisins avec lequel il entretenait de mauvaises relations car il lui reprochait notamment de laisser traîner ses chiens dans la servitude. Malgré l'intervention des secours, la victime était décédée sur place des suites d'un arrêt cardiaque. Interpellé à son domicile par les policiers municipaux, l'auteur des faits avait reconnu avoir poignardé son voisin tout en affirmant que c'est ce dernier qui avait commencé à l'agresser. À son domicile, les forces de l'ordre avaient trouvé deux couteaux de boucher ensanglantés et des “livres religieux emplis d'annotations, de calculs et d'extraits soulignés” tel que le rapporte le juge d'instruction dans l'ordonnance de mise en accusation (OMA).
 
Propos délirants
 
Le médecin qui avait examiné l'accusé ayant relevé que ce dernier faisait preuve d'un “total détachement quant à la gravité des faits” et qu'il tenait des “propos délirants mégalomaniaques”, la garde à vue avait été jugée incomptatible avec son état psychique. Déjà suivi en psychiatrie pour un trouble bipolaire, l'individu avait finalement été interné sur demande d'un représentant de l'État. Malgré cela, il était ressorti de deux expertises psychiatriques que la “simple altération de son discernement” au moment des faits ne remettait pas en cause sa responsabilité pénale.
 
Bien que l'accusé ait nié avoir volontairement voulu donner la mort à la victime, le juge d'instruction a estimé que l'“intention homicide” découle de “la nature de l'arme utilisée, de la multitude des coups portés, de la localisation des plaies mais également des différents témoignages attestant d'un conflit latent entre les deux hommes” avec des menaces proférées par le mis en cause à l'encontre de la victime.
 
De plus, si l'accusé avait “varié à plusieurs reprises sur le déroulé des faits et plus précisément sur le moment des coups portés et l'attitude de la victime”, il convient de “souligner que lors de sa première audition en garde à vue, il avait admis avoir chargé la victime et lui avoir porté un premier coup de couteau au niveau de son ventre”.
 

Au terme de ce procès, qui se déroulera du 1er au 3 décembre, l'accusé encourt trente ans de réclusion criminelle.

​Les autres affaires

Violence avec infirmité permanente
 
Lors de cette session, les jurés devront également juger un homme de 42 ans poursuivi pour “violence suivie de mutilation ou infirmité permanente”. Le 14 juillet 2023 à Tumara'a, ce primodélinquant avait frappé sa femme au visage lors d'une dispute. Le lendemain, la victime avait dû être évasanée à Tahiti en raison d'un traumatisme crânien. Les différents examens médicaux pratiqués après les faits avaient permis d'établir que les coups avaient provoqué une “infirmité permanente chez la victime qui souffrait de troubles cognitifs et psycho-comportementaux ainsi qu'un ralentissement idéo-moteur important”.
 
Concernant l'accusé, les experts psychiatres avaient relevé que ce dernier était un “homme frustre, d'intelligence faible, d'expression orale basique avec des difficultés d'introspection et d'analyse des situations, sans évocation de déficience intellectuelle”. Ils avaient également jugé que le quadragénaire présentait des “traits de personnalité antisociale marquée par une immaturité affective et des difficultés de gestion émotionnelle”.
 
Le procès aura lieu du 21 au 24 novembre.
 
Meurtre sur ascendant
 
Renvoyée en raison d'une incompatibilité relative à la composition de la cour d'assises, l'affaire portant sur le meurtre d'une femme commis par son propre fils à Taiarapu-Est sera jugée du 26 au 28 novembre. Les faits s'étaient déroulés le 9 octobre 2022 lorsque l'accusé avait étranglé sa mère jusqu'à ce qu'elle ne cesse de respirer. Placé en garde à vue, l'homme avait indiqué qu'au cours des derniers mois, il avait déjà pensé à tuer sa mère ou à se suicider. Il avait également expliqué que la victime était “omniprésente” dans sa vie et qu'il éprouvait une “culpabilité intense” vis-à-vis de son acte dont il endossait “l'entière responsabilité”. L'expertise psychiatrique pratiquée sur l'accusé avait démontré l'absence d'anomalies mentales.
 
L'expert avait aussi relevé que l'évaluation de la dangerosité criminologique chez l'accusé était “complexe” et devait être “nuancée” “car si le crime de matricide est dans la plupart des cas directement lié aux conflits dyadiques mère/enfant et n'a, par définition, pas de récidive”, “la violence du passage à l'acte, son élaboration encore précaire et le détachement avec lequel il décrit son geste matricide indiquent la présence d'une dangerosité criminologique”.
 
Selon un second expert, le passage à l'acte était survenu “dans un contexte de malaise psychique évoluant depuis plusieurs mois et qui prenait sa source dans un conflit pulsionnel intrapsychique où il était tiraillé entre devoir et désir, amour et haine envers sa mère et refoulait un désir de mort à son égard”. Tuer sa mère était pour lui “une manière de reprendre son désir, son autonomie et il n'a pas su faire autrement pour se défaire d'une relation aliénante”. Le meurtre sur ascendant est passible de la réclusion criminelle à perpétuité.
 
 
Viols incestueux
 
Un homme de 62 ans sera également jugé pour viols incestueux et agression sexuelle incestueuse sur un mineur de plus de 15 ans les 4 et 5 décembre lors d'une audience qui pourrait se tenir à huis clos en raison de la nature des faits.
 
En 2022, c'est la victime qui s'était présentée à la gendarmerie pour dénoncer les faits en expliquant que son père, un homme violent selon elle, l'avait violée à plusieurs reprises. Entendu en garde à vue, l'accusé avait reconnu qu'il avait eu des relations sexuelles avec sa fille tout en assurant qu'elles étaient “consenties”.

Rédigé par Garance Colbert le Lundi 17 Novembre 2025 à 15:17 | Lu 2924 fois